Société d’ Histoire de Revel Saint-Ferréol LES CAHIERS DE L’ HISTOIRE |
GENTILHOMMES
VERRIERS article paru sur CDA Info n°26 -3° trimestre 2006 |
LES
GENTILSHOMMES-VERRIERS, QUI SONT-ILS ?
L'histoire ou la légende voudrait
que l'art de souffler le verre soit arrivé en France avec le retour
de la 7ème croisade. Il semblerait que le long séjour de Louis IX
dans le royaume franc de Jérusalem ait permis à certains chevaliers
de s'initier à « l’art de verrerie ». Cependant, les premiers textes
connus datent du XlVème siècle. Ces chevaliers reviennent des
croisades ruinés et sans terre. Le grand problème est que ces
chevaliers sont nobles et qu'en dehors du travail de la terre, ils
ne peuvent travailler sans déroger, c'est-à-dire sans perdre leur
noblesse. Pour établir une verrerie, il fallait un privilège,
c'est-à-dire une autorisation du roi donnée par lettre patente. Un
des plus anciens privilèges octroyé aux verriers est un acte signé
de Charles VII. Ce document est daté du 24 janvier 1399. Il y est
écrit que : « droicts et privilèges sont donnés à tous gens
travaillant aux fours à verre. Permission est donnée aux nobles de
naissance d'exercer le mestier de verrier sans déroger à leur «
noble estat ».
On leur accorde alors le droit de souffler le
verre sous certaines conditions, je n'en citerai que quelques unes :
- transmission de père en
fils uniquement
- interdiction de prendre un
ouvrier non noble
- interdiction de vendre
leur marchandise en dehors de la verrerie (c'est le rôle des
marchands)
- les fours doivent fonctionner six à sept mois dans l'année,
période que l'on appelle (la réveillée)
- obligation de déplacer le
four tous les cinq ans (clause qui n'est pas toujours, pour ne pas
dire jamais, respectée).
De nombreux procès opposèrent les gentilshommes - verriers et les
communautés où ils étaient installés.
Ils coupaient les forêts et ne replantaient pas malgré les obligations
royales.
Les fréquents
déplacements dans les forêts, à la recherche continuelle du
combustible, leur dictait une construction rapide et simplifié.
Il est vrai que la vie active menée par ces artisans du feu, les
obligeait à demeurer plus souvent autour du four qu'à l'intérieur de
leur maison.
Du fait des règles de transmission de leur art, les familles de
gentilshommes verriers avaient des liens dans tous les lieux de
travail du verre : Montagne Noire (versant sud et nord), forêt de la
Grésigne, Ariège (piémont pyrénéen), Gard, où ils se déplaçaient au
gré du travail.
C'est dans ce réseau familial que l'on peut intégrer leur adhésion
aux idées de la réforme.
Les mariages unissaient les mêmes familles de génération en
génération et ainsi ils conservaient les secrets de leur art.
LES VERRERIES FORESTIÈRES DE LA MONTAGNE NOIRE.
« A la fin du Moyen Âge et durant l'époque moderne, la
verrerie forestière se définit en premier lieu par sa localisation
au sein d'un massif boisé, l'implantation liée au combustible
qu'elle emploie » (Lisa Caliste).
En
effet, les fours de fusion qui devaient atteindre un degré élevé de
température (1400° environ) étaient alimentés de manière
discontinue, nuit et jour durant six à sept mois de l'hiver et
nécessitaient une grande quantité de combustible.
Les verreries de la montagne noire sont
donc situées dans les grandes hêtraies du massif, entre 500 m et
1000 m d'altitude et généralement à proximité d'un point d'eau.
Sur ces versants parfois abrupts, des plateformes
étaient aménagées pour recevoir l'ensemble des structures
nécessaires au fonctionnement d'une verrerie.
Ces sites verriers se composent classiquement
d'une halle d'une superficie moyenne de 100 m2 et de plan
rectangulaire, d'une zone de stockage des matières premières et des
produits finis, d'une zone de rejet des déchets et d'une zone
d'habitat.
Six hommes au moins étaient nécessaires au fonctionnement d'un atelier et occupaient les lieux avec leur famille pendant la saison de production.
La halle qui constitue l'atelier principal de fabrication est
consacrée à la préparation de la matière première (concassage
des silices), à la cuisson et au soufflage du verre.
D'après quelques fouilles, les halles de la Montagne Noire
sont bâties en pierre sèches sur sol en terre battue et munies
d'une couverture de lauze.
La halle abrite donc le four de fusion et probablement
un four de recuit.
Ce dernier permettait d'apporter doucement les pièces
de verre à température ordinaire.
Les fours de fusion observés jusqu'à ce jour mesurent de 6 à 7 m de long et sont composés d'un foyer en cloche de forme circulaire prolongé par deux murettes constituant le cendrier, structure nécessaire à l'évacuation des cendres.
Le foyer est surmonté de la chambre à creusets dont on
ne retrouve aujourd'hui que la sole d'environ 2,20m de diamètre.
Les
soles pouvaient être composées de 8 à 12 creusets.
Ces
derniers sont fabriqués en terre réfractaire et leur diamètre varie
entre 35 et 40 cm.
«Dans la chambre à creusets, le mélange
vitrifiable était chauffée entre 1200° et 1400° .
Les verriers pouvaient alors atteindre la pâte vitrifiée à l'aide
d'ouvreaux façonnés dans la partie haute du four et au niveau de
chaque creuset.
Les
verriers cueillaient le verre en fusion grâce à une canne. (...)
Une fois la pâte vitreuse formée, à l'abri de la halle, les
verriers soufflaient la paraison afin de la modeler. L'objet produit
devait ensuite subir un refroidissement lent et progressif, étape
indispensable à sa résistance.» (LC) De ces fours à creusets seuls
subsistent aujourd'hui le foyer, la sole et le cendrier »..
Ces
paragraphes ont pu être rédigés grâce aux actes du colloque de Soréze, réalisé
sous la direction d'Yves Blaquière, (T.I, Le Verre, T.II, Abraham de Robert et
les siens, Anne-Marie Denis éditeur, 2004) et le rapport de Stage de Lisa
Caliste 2006 DESS Histoire et Gestion du Patrimoine culturel –Paris
et WIKIPEDIA site internet
LA
« RÉVÉILLÉE »
LES ÉQUIPES SE
RELAYAIENT TOUTES LES 12 HEURES SANS AUTRE ARRÊT QUE CELUI DU
DIMANCHE (DU SAMEDI VERS MINUIT AU LUNDI À UNE HEURE DU MATIN).
LE FOUR RESTAIT ALLUMÉ 12 À 15 MOIS ET MÊME DAVANTAGE, JUSQU'À CE
QU'IL EÛT BESOIN D'ÊTRE RÉPARÉ. LE TEMPS DE LA RÉPARATION ÉTAIT
APPELÉ LA MORT DU FOUR ET LA PÉRIODE DE TRAVAIL UNE RÉVÉILLÉE. LES
GENTILSHOMMES VERRIERS SIGNAIENT UN CONTRAT POUR UNE RÉVEILLÉE ET
RECEVAIENT DU MAÎTRE-VERRIER UN CHAPEAU BRODÉ ET UN POT À VIN EN
ARGENT. DÈS QUE LA RÉVÉILLÉE AVAIT COMMENCÉ, ILS DEVENAIENT LES
HÔTES DU MAÎTRE-VERRIER QUI LES RECEVAIT DANS SON MANOIR ET À SA
TABLE, FAISAIT ENTRETENIR LEUR LINGE ET LEURS ARMES, SOIGNER LEURS
CHEVAUX ET LEURS CHIENS.
TRAVAIL DIFFICILE
!
LA CHALEUR ÉTAIT TERRIBLE
DEVANT LE FOUR ET LE SOUFFLAGE DU VERRE ALTÉRAIT BEAUCOUP, AUSSI , À
PROXIMITÉ DE LA HALLE, ÉTAIT AMÉNAGÉE UNE SORTE DE BUVETTE.
TOUTES LES HEURES, LES PETITS TISEURS CRIAIENT SUR UN TON CHANTANT:
A BOIRE POUR CES MESSIEURS! EN AJOUTANT LE NOM DE CELUI QUI DEVAIT
ALLER CHERCHER LE CIDRE FRAIS.
QUAND LE MOMENT DU DINER APPROCHAIT, LES PETITS TISEURS
CRIAIENT TROIS FOIS HORS DE LA HALLE: A DÎNER POUR CES MESSIEURS!
LES VERRIERS PASSAIENT ALORS UN HAUT-DE-CHAUSSE ET SE RENDAIENT À LA
SALLE À MANGER OÙ ON LEUR SERVAIT UNE SOUPE, UN MORCEAU DE VIANDE
BOUILLIE ET UNE ENTRÉE. UNE HEURE PLUS TARD LE TRAVAIL REPRENAIT.
Les gentilshommes
verriers
Les nobles étaient
d'abord des hommes de guerre. Ils pouvaient aussi cultiver la terre,
mais non point se livrer à l'industrie ou au commerce.
Cependant, par exception, la verrerie était considérée comme un art
noble. Cela ne voulait pas dire qu'on devenait noble en devenant
verrier, mais qu'un noble pouvait exercer ce métier sans déroger.
Un
dicton du Moyen-âge, relevé dans l'ouvrage de Gerspach, dit que pour
faire un vrai gentilhomme-verrier, il fallait d'abord trouver un
noble né et en faire un bon ouvrier.
La noblesse d'alors acceptait assez mal ce
partage de privilèges, elle appelait les verriers : « roturiers du
verre ». Boileau, qui raillait tant le poète français de
Saint-Amand, descendant justement de la noblesse verrière, lui fit
décocher par Meynard cette petite épigramme :
Votre noblesse est mince
Car ce n'est pas d'un Prince Daphmis que vous sortez,
Gentilhomme de verre
Si vous tombez à terre Adieu vos qualités.
Mais eux, les rudes travailleurs des fournaises à
verre, tenaient beaucoup à leur qualité de noble. Ils avaient le
titre d'Écuyer du Roi, portaient l'épée et le chapeau brodé. Ils
possédaient cheval et chiens de chasse et profitaient des privilèges
de la noblesse.
Par privilège du
roy...
Les gentilshommes verriers ont toujours soutenu que leurs
privilèges avaient été octroyés par le roi saint Louis qu'ils
avaient suivi en croisade; en réalité c'est plus
vraisemblablement à Philippe III le Hardi (règne : 1270-1285)
son fils, qu'ils durent les privilèges attachés à la qualité de
verrier.
Il n'existe pas de documents authentiques se rapportant
à cette époque, mais le procureur du roi, Ignace Chrétien,
disait: « ce n'est qu'après avoir versé leur sang et ruiné leur
fortune que ces nobles obtinrent de la générosité du roi saint
Louis une planche après leur naufrage. »
Pour établir une verrerie, il fallait un
privilège, c’est-à-dire une autorisation du roi donnée par
lettre patente:
En l'an 1330 fut donné le pouvoir par le roi
Philippe IV à Philippe de Cazeray, écuyer, premier inventeur des
plats de verre appelé verre de France, comme portant son nom, de
faire établir une verrerie proche Bézu en Normandie, qui fut
nommée La Haye.
En Normandie, quatre familles nobles, les
Caqueray, Bongars, Brossard et Le Vaillant, reçurent de tels
privilèges pour l'établissement de grosses verreries fabriquant
du verre à vitres.
Dans les petites verreries, on soufflait vases, gobelets et
verres à boire.
Les verriers bouteillers soufflaient bouteilles et flacons. Les
patenôtriers fabriquaient chapelets, perles, boutons, bracelets,
colliers en verre coloré ou émaillé.
Un des plus anciens privilèges octroyé aux verriers est
un acte signé de Charles VII. Ce document, daté du 24 janvier
1399, fait partie de la collection Moreau à la Bibliothèque
nationale.
On peut y lire que
« Droicts et privilèges sont donnés à tous gens travaillant
aux fours à verre. Permission est donnée aux nobles de naissance
d'exercer le mestier de verrier sans déroger à leur « noble
estat ».
En
1448, après les guerres qui par longue espace de temps ont régné
audit pays (la guerre de cent ans), quatre familles nobles de
verriers lorrains obtenaient d'importants privilèges:
- Ils étaient autorisés à
établir ou rétablir des verrières (ou voirreries).
- Ils étaient dispensés de tous impôts et du logement des gens de
guerre.
- Leurs marchandises
pouvaient circuler librement sans payer aulcun passaige, gabaile, ni
tributz quelconques.
- Ils avaient le droit de
couper dans les forêts le bois nécessaire au chauffage au four et
aux réparations des bâtiments moyennant une faible redevance.
- Ils pouvaient enfin chasser les bestes grosses et rousses à
chiens et harnois de chasse et faire paître dans les bois 25 porcs
par verrerie.
Pour tous ces droits et privilèges, le cens (ou la redevance)
réclamé était souvent minime.
En exemple, en 1416, les de Cacqueray, propriétaires exploitants de
plusieurs verreries versaient « ung escu d'or » par année. D'autres
60 boisseaux d'avoine. En Lorraine, en l'an 1502, les de Hennezel
(que l'on retrouve aussi en Languedoc) avaient à fournir au duc de
Lorraine comme charge « un petit assortiement de voèrres pour la
table à chaque an ».
Jusque
vers la fin du XVIe siècle, les gentilshommes-verriers vivaient
comme de véritables patriarches.
Leurs rudimentaires demeures construites sommairement et en pleine
forêt tenaient beaucoup plus des cabanes de charbonniers ou de
bûcherons que des somptuaires habitations des « aultres nobles du
Royaume ».
Les fréquents déplacements dans les forêts, à la recherche
continuelle de combustible, leur dictait un batissement rapide et
simplifié.
Il est vrai
que la vie active menée par ces artisans du feu les obligeait à
demeurer plus souvent autour du four qu'à l'intérieur de leurs
rustiques maisons.
VERRERIE DU LAC DE SAINT FERREOL :
fouilles archéologiques de 1995.
Devant l'altération chronique de ce site proche de la disparition,
devant le rare mobilier archéologique recueilli et devant le faible
laps de temps de notre étude, seules les grandes lignes concernant
l'existence de cet atelier peuvent être tracées dans cette synthèse.
La
confirmation d'un atelier de verrier
En premier lieu et avant d'avancer plus dans notre
étude, il parait nécessaire de noter ici que ce site correspond bel
et bien à un atelier de verrier.
La quantité de
fragments de creusets, encore encrassés de glaçures, les divers
déchets de verre au panel chromatique variant dans la gamme des
couleurs primaires, ou encore les vestiges de sole de four,
recueillis sur l'ensemble du site en témoignent de façon évidente.
L'implantation
Son implantation près du lit d'un ruisseau, le Laudot
(rivière qui alimenta en eau le lac de Saint-Ferréol) permettant
ainsi d'en utiliser son sable en est un des premiers motifs.
Mais il
faut aussi tenir compte ici de la proximité des vastes forêts de la
Montagne Noire, forêts offrant ainsi le combustible nécessaire de
l'énorme quantité de bois que demandaient les fours de verriers.
Enfin la
position géographique, à quelques kilomètres au dessus de Revel, en
assure ainsi la ventilation mercantile de ses produits.
La durée de vie de cet
atelier
Il semble que cet atelier de verrier eut une durée de
vie d'une centaine d'années environ.
Existant au XVIe s. les plus anciens tessons ne semblent pas
remonter au delà du début du XVIe s.
Il fut submergé en 1680 par les travaux de P. RIQUET à
Saint-Férréol.
Selon Monsieur ADJE, l'un des grands historiens du
Canal du Midi, il n'est fait à cette date aucune allusion de ce
bâti, debout ou ruiné, sur le site du futur lac.
Ainsi en 1680, cet atelier, pas même signalé en tant que ruine,
semble déjà être totalement détruit.
Un essor
économique ?
Si l'on prend appuie sur les extensions des bâtiments, cet
atelier semble avoir connu une certaine "réussite économique".
Tous les bâtiments observés lors de notre étude, furent dotés d'un
ajout de bâti postérieur, lequel ajout, se matérialise par de
simples murs, eux aussi de pierres sèches, mais de moindre épaisseur
que ceux composant les corps de bâtiments plus anciens.
Ces parties ultérieures
apparaissent comme simplement plaquées contre les murs antérieurs,
sans qu'il soit prévu d'encrage direct dans les maçonneries.
Toutefois d'après la stratigraphie observée, les maçonneries
ultérieures semblent avoir été réalisées peu de temps après
l'élévation des premiers corps de bâtiments.
Manifestement, les occupants de l'atelier de
Saint-Ferréol ont manqués de place nécessaire, ceci pouvant alors se
traduire par une extension et donc la construction de réduits
postérieurs.
Faut-il voir en ces transformations le corollaire direct d'une
relative réussite de l'artisanat de cet atelier?
Fabrice Chambon
Le premier monument réglant le statut des
verriers est l'octroi de privilèges, par Charles VII, Roi de France
en 1445.
Cette réglementation est venue unifier en partie une situation de fait .
De nombreuses verreries existaient antérieurement à cette époque, mais
elles existaient en vertu de concession particulière, et il est
impossible d'en trouver les textes originaux.
Ce qui confirme cette théorie, ce sont les termes
même des privilèges ci-dessus :
"Premièrement que nul ne doit exhiber ledit art de verrier s'il
n'est noble et procrée de noble génération et de généalogie de
verriers".
Nous jugeons utile de reproduire ci-dessous le texte des privilèges accordés par Charles VII, reproduit in extenso dans l'ouvrage de M. de Cazanove ("Les gentilshommes verriers du Languedoc")
"Privilèges octroyés par le Roy de France aux gentilshommes verriers du
pays de Languedoc et par Sa Majesté confirmés lus et publiés en jugement
par-devant M. Jean de la Roche, lieutenant de messire Pierre de
Roquebletry, chevalier et conseiller du Roi, son capitaine viguier de la
ville et viguerie de Sommières, juge et conservateur de ces privilèges,
l'an mil quatre cens quarante cinq, régnant Charles septième, Roy de
France.
Premièrement que nul ne doit exhiber ledit art de verrier s'il n'est
noble et procrée de noble génération et de généalogie de verriers.
Item, que nul maistre de four de verrerie n'y autre ne peult et ne doilt
monstrer ledit art à personne qui ne soit procréé de noble et ancienne
génération et qu'il n'est justifié de noblesse par-devant le viguier
dudit Sommières, commissaire et conservateur des privilèges de toute la
Sénéchaussée de Beaucaire et Nismes et pays du Languedoc et prins,
par-devant ledit conservateur, le serment en tel cas accoutumé et iceux
nobles voulant prendre le serement et exercer ledit art, et de justifier
leur noblesse dans deux mois et ceux qui sont habitans hors de la dite
sénéchaussée, en ont autre terme de quatre mois.etc…………..
Il nous faut mentionner une série de lettres patentes relatives aux gentilshommes verriers (1438-1592), qui se trouvent dans les archives départementales du Tarn (Côte A2). Lettres patentes des Rois Charles VII, Louis XI, François Ier, Charles IX et Henri IV, accordant certains privilèges aux verriers.
François Ier, par son ordonnance du 5 septembre 1523, confirme les privilèges accordés aux gentilshommes verriers par les rois Charles VII, Louis XI, Charles VIII et Louis XII.
On voit combien cette ordonnance de François Ier augmentait le nombre de bénéficiaires de l'exemption de droit de péage puisqu'elle s'étendait non seulement aux gentilshommes verriers, à leurs familles et à leurs serviteurs, mais encore à tous ceux leur apportant les matières indispensables à la fabrication du verre.
En mars 1565, le roi Charles IX à Toulouse, confirme en des termes semblables les privilèges accordés par François Ier, et il mentionne en outre que les verriers "d'autant qu'ils n'ont eu confirmation lesdits privilèges des feus rois, mes très honorés seigneurs père et frère, les rois François et Henri, ils craignent qu'on les veuille contraindre auxdits subsides, comme l'on fait les marchands en toutes marchandises, à ces causes désirant subvenir auxdits exposants leur confirmons les privilèges, franchises dessus dires."
Le vidimus ci-dessus est extrait d'une copie du privilège trouvé entre
les mains de noble Pierre de Riols, excuyer verrier aux verreries hautes
de
Moussans.
Signalons en passant (nous insisterons plus loin) que Pierre de Riolz,
escuyer, verrier de la verrerie hault de Moussans, obtint du roi Charles
IX des lettres patentes le maintenant en possession de ladite verrerie,
appartenances et dépendances. Ces lettres patentes furent données à
Toulouse le 14ème jour du mois de mars 1565; et le 18 septembre 1565,
elles furent suivies de l'ordonnance du sénéchal de Carcassonne
Henri IV confirme les privilèges des maîtres verriers et ouvriers, par lettres patentes données au Camp des Stampes le 20ème jour de novembre l'an 1592 et de son règne le quatorzième. Les dites lettres patentes ont été enregistrées à la Cour des Aydes de Montpellier, par l'arrêt de la dite Cour du 2 mai 1602.
Louis XIII, roi de
France et de Navarre, à la suite de la requête de Charles de
Franquefort, résidant en Saintonge, Jean Robert et Jacques Grenier en
Bassadois, Jean Paupalle, Joachim Robert en Agenois, Pierre Bouget en
Armagnac d'après laquelle "de tout temps et ancienneté, eux, leurs
serviteurs, ensemble les marchands en gros et en détail menant et
conduisant la marchandise de verrerie et matières dont est fait et
composé le verre, par eau et par terre, ont été affranchis quittes et
exempts de toutes tailles, aides et subsides, impôts, censives,
terrages, passages, bourrages, chaussée, péages, courrages, landages,
revenages, pontonage des ponts et de toutes autres exception anciennes
et nouvelles …"
Le roi Louis XIII confirme les dits privilèges à Paris, au mois de mai
l'an de grâce 1615 et de son règne le cinquième.
Louis XIV en des termes
à peu près analogues donne des lettres de confirmation aux gentilshommes
verriers.
"…Nous avons de notre grâce spéciale, pleine puissance et autorité
royale confirmé et confirmons par ces présentes signées de notre main,
lesdits exposants en tous leurs privilèges, franchises et exemptions,
pou en jouir eux et leurs successeurs, ainsi qu'ils en ont bien et
durement joui et usé, jouissent et usent encore dès à présent sans
qu'ils puissent être troublés et sous quel prétexte que ce puisse être
…Nous avons fait mettre le scel à ces dites présentes l'an de grâce 1655
et de notre règne le troisième;
Par le Roy, signé : Phelypeaux"
Les Présidents trésoriers et Grands Voyers de France au Bureau des Finances et domaine de la Généralité de Toulouse, chevaliers, conseillers du Roy, vu les patentes données à Paris, au mois de décembre 1655, obtenues par les gentilshommes verriers et confirmant leurs privilèges, firent enregistrer à leur Bureau les dites lettres patentes et de confirmation :
"… Faisant défense à tous ceux qu'il appartiendra de leur donner
aucun trouble, ni empêchement, au contraire, à la charge de contribuer
aux tailles et deniers royaux, chacun comme le concerne, suivant leur
compoix et le tenement de leurs biens et fonds par eux jouis et
possédés, en la province, attendu que les tailles sont réelles en
languedoc.
Fait à Toulouse au Bureau des Finances, le 29 May 1661".
Parmi les extraits des
Registres du Conseil d'Etat (du 14 juin 1701, n°55), nous trouvons une
requête de Helliès Mercier, marchand et syndic des marchands de verre de
bordeaux, contre la seconde présentée par Pierre Domergue, ci-devant
fermier général des Fermes Unies de Sa Majesté.
La première se basait sur les privilèges accordés aux gentilshommes
verriers, confirmés par lettres patentes de décembre 1655.
La seconde, présentée par Maître Domergue, tendait à assimiler les
verres aux autres marchandises et à leur faire payer des droits d'entrée
et de sortie.
L'ordonnance rendue par M. de Bezons, Intendant de Languedoc, du 4
décembre 1669, en faveur du nommé de Laroque, et lui accordant main
levée de la saisie de quatre charges de verres saisies à la requête de
Jean Rivière, fermier du droit de Leude et péages du lieu de
Sainte-Colombe, justifiait la première thèse.
Etant donnés les précédents, "le roy, en son conseil, sans s'arrêter
à la requête dudit Domergue, a ordonné et ordonne que les verres et
bouteilles provenant des Verreries de Périgord, qui seront transportés
dans la sénéchaussée de Bordeaux seront exempts des droits de
connétablie".
Nous verrons plus loin une requête analogue présentée à Monseigneur de
Basville, intendant de Languedoc, par noble Marc de Robert, sieur de
Lagarrigue, gentilhomme verrier aux Verreries de Moussans.
Louis XV, par lettres
patentes données à Versailles en août 1727, et de son règne le douzième,
confirme lui aussi les privilèges des gentilshommes verriers.
"Nos chers et bien aimez les gentilshommes verriers de notre province
de Languedoc, nous ont très humblement fait représenter, que de temps
immémorial eux et leurs prédécesseurs ont joui de l'exemption des droits
de péages, chauffages, landages, pontages et autre, dans laquelle
exemption ils ont été maintenus et confirmés par lettres patentes du feu
Roy de glorieuse mémoire notre très honoré seigneur et ayeul, du mois de
décembre 1655, registrées en notre Cour des Comptes, Aydes et Finances
de Montpellier le 15 décembre 1656 … avons confirmé et confirmons par
ces présentes signées de notre main les exposants dans l'exemption … qui
leur a été accordée et dans laquelle ils ont été maintenus, pour en
jouir par lesdits exposants et leurs successeurs de même et tout ainsi
qu'ils en ont et leurs successeurs joui ou dû jouir, et qu'ils en
jouissent actuellement pourvu toutefois que lesdites franchises et
exemptions n'ayent esté révoqués par aucuns édits, déclarations et
arrests."
Cette déclaration fut
enregistrée au Contrôle Général des Finances, Fontainebleau, le 2
novembre 1727.
L'arrêt du Conseil du 9 mars 1728 exempte les gentilshommes verriers des
droits de censive et des droits seigneuriaux. Ils ne sont pas astreints
à la taille sur leurs biens propres ni sur les terres et les bois
servant à l'entretien journalier de leurs fours.
Toutefois ces privilèges et toutes ces prérogatives furent peu à peu restreints.
C'est d'abord en
janvier 1518, l'interdiction de s'approprier du terrain dans le domaine
forestier de la Couronne.
En 1543, les bois des particuliers sont
soumis à l'inspection des maîtrises des Eaux et Forêts, et le nombre des
fours est limité.
Dès 1680, les verriers
sont obligés de se défendre contre les prétentions des municipalités,
qui voudraient les astreindre au paiement d'une quote-part de
l'indemnité pour le logement des troupes.
Une ordonnance royale du 18 juillet 1741, enjoint
aux verriers de représenter les titres en vertu desquels ils ont été
autorisés à établir des usines dans la généralité de Montpellier; elle
est basée sur l'arrêt du Conseil du 21 septembre 1700, faisant des
observations sur le danger des coupes de bois, faites trop fréquemment
par les gentilshommes verriers aux abords des villes.
Les arrêts du conseil du 9 août 1723 et du 7 août 1725 imposaient
l'octroi de lettres patentes : l'ordonnance de 1741 enjoint aux
verriers, sous quinzaine, de représenter les arrêts du Conseil ou les
lettres patentes en vertu desquelles ils se sont établis. Toujours hanté
par la crainte de la pénurie du bois de chauffage, le pouvoir royal
exige que les verreries de la généralité de Montpellier aillent
s'établir sur les monts de l'Aïgoual, sous peine d'une amende de 500
livres, de confiscation des ouvrages pour la première fois et de plus
grande en cas de récidive.
Une série de procès ont lieu, pour des coupes de bois faites indûment dans le domaine de la Couronne. Signalons :
En
1663, Isaac de Robert, sieur de La Plane est condamné à une amende de
1000 livres, pour dégâts commis dans la forêt de Minerve.
Sous l'administration de Louis de Froidour, sieur
de Cerilly, maître des Eaux et Forêts, les amendes pleuvent sur les
maîtres verriers.
En 1667, Jacques de Robert de Fraissinet est condamné à une amende de 50
livres, pour dégâts commis dans la forêt de Campaureil.
Enfin, le 18 juin 1671, les verriers de Moussans sont assignés pour
avoir usurpé des terres dans les domaines du Roi. Ce sont : Jean de
Riols, sieur du Causse; Nataniel de Robert, sieur de Cantelauze; Abel de
Colon, le sieur de Terme; Philémon de Robert; Jeanne de Riols, veuve de
Samuel de Robert-La-Grenade.