Société d’ Histoire de Revel Saint-Ferréol PARU DANS LES CAHIERS DE L’ HISTOIRE NUMERO 15 - 2010 |
LES PLANS « MAGUÈS » par Jean Paul Calvet |
vers les anciens plans de Revel
En 2009, M. Charles Maguès domicilié à Toulouse, classant des archives familiales, a découvert trois plans originaux particulièrement intéressants de la ville de Revel et de ses environs immédiats (les faubourgs). Ces archives avaient appartenu à ses aïeux Jean Polycarpe et son fils Urbain Maguès, qui en leur qualité d’architectes du Canal du Midi, ont présidé aux destinées du Canal du Midi pendant plus de 60 années au XIXème siècle. Ces plans se trouvaient mêlés à de nombreux autres documents concernant le Canal du Midi, qui étaient depuis plus de 130 ans conservés par la famille. Des courriers datant de 1830, destinés à Urbain Maguès, étaient associés aux plans. L’expéditeur était un notaire toulousain. Ces documents complètent ainsi les archives des Voies Navigables de France (V.N.F). M. Charles Maguès par l’entremise de la Conservation du Musée et Jardins du Canal du Midi à Saint-Ferréol, en faisait don à la mairie de Revel au mois de mai 2009. M. Alain Chatillon, sénateur-maire de Revel, faisait part immédiatement à la Société d’Histoire de Revel Saint-Ferréol de l’acquisition par les archives municipales de ces documents. Une étude pouvait être entreprise. Elle fait l’objet de la présente publication (une étude plus détaillée des remparts est en cours de réalisation, elle fera l’objet d’une importante publication ultérieure dans un prochain « Cahier de l’Histoire »de la Société d'Histoire de Revel Saint-Ferréol). |
description des documents
Les trois plans sont tracés sur de grandes feuilles de papier en « rouleau ».
1/ LE GRAND PLAN (numéro 1)
C’est le plan le plus détaillé, il constitue un document remarquable, permettant d’avoir un aperçu général du système défensif de la ville. Il mesure 53 cm d’est en ouest et 153 cm du nord au sud.
L’espace concernant la ville de Revel mesure 35 cm sur 30 cm environ ; une grande place est faite aux voies externes à la ville et son urbanisme « débutant ».
a) CONTROLE DE L’EXACTITUDE DU PLAN
Lorsque nous avons pris connaissance de ce plan, nous avons été très agréablement surpris de pouvoir y trouver des détails en grand nombre. Le problème était de savoir s’ils reflétaient la réalité du terrain.
Concernant l’exactitude du plan, nos contrôles nous ont permis de tirer cette conclusion :
Quelques exemples :
- les tracés des piliers des « Garlandas » et de la halle centrale semblent bien le reflet de la réalité.
- le plan de l’église (très détaillé) suit la même rigueur d’exécution.
Mais précision du tracé, ne veut pas dire obligatoirement que tous les détails sont fiables…Sur ce plan, nous avons aussi essayé de contrôler les éléments portés sur ce document.
Tout d’abord, grâce aux renseignements relevés dans les délibérations des conseils de la communauté et communiqués par M. Jean Hébrard et Albin Bousquet, et notamment l’étude de Victor Collado (alias « Bénarès») sur notre ville au XVIIIème siècle (voir bibliographie), nous avons pu recouper plusieurs informations :
Plan de l' église |
La « maison Jammes ». Remarquer le petit rectangle qui empiète dans la rue de Toulouse
Près de "l'Hôtel de ville" les mesures à grains parfaitement détaillées. |
- les petites anomalies du tracé du rempart sont bien posées et bien tracées sur le plan, y compris ce qui pourrait être une « sorte d’échauguette » sur le rempart sud.
- l’emplacement des croix et fontaines, de l’écorchoir et de la boucherie correspond bien aux documents d’archives de l’époque.
- le besoin de bien détailler: la représentation de la « Rue du Rieu », ses établissements surplombant le « Mayral supérieur », les pontets, et les passerelles piétonnes, est la preuve d’une grande rigueur de travail.
- enfin quel plaisir de pouvoir imaginer la structure des portes, la présence des corps de garde avec les escaliers les desservant, le tour de ronde sur les remparts, les tours, les ponts enjambant les fossés …
Une question reste en suspens et est à ce jour sans réponse – quels étaient la destination et l’objectif de ce plan ?
Peut-être est-il l’avant projet permettant d’ouvrir les quatre portes supplémentaires à celles existant déjà, de restaurer les remparts (1778), de mettre en place les boulevards périphériques qui permettraient de ne plus passer par la place centrale, de créer les espaces d’aménagements notamment par la plantation des 760 arbres en 1779 ou de créer la « Patte d’Oie »…
b) LA DATATION DU PLAN
Plusieurs éléments peuvent nous permettre d’approcher la date d’exécution de ce plan (nous considérerons à la vue de nombreuses analogies, que le plan n° 2 est à peu près contemporain, ou en tout cas est une copie moins détaillée de celui ci).
On reconnaît en bas à gauche l’échelle linéaire en toise (mesure de l’ancien régime – la toise équivaut à 1,959 mètre)
- le titre du plan rappelle l’appartenance de « Revel, au diocèse de Lavaur » (qui disparaîtra à la Révolution).
Pour finir un peu, on tiendra compte de plusieurs autres éléments clairement datés :
- le plan de l’église qui est un peu postérieur à 1736-1740 (date de reconstruction)
- le fait qu’il n’y ait que quatre portes prouve que le plan date d’avant 1776 et 1778 (1776 – ouverture de la rue de Dreuilhe et de Vauré - 1778, la porte de Castres trop étroite est agrandie … sur le plan elle est très étroite !)
La porte de Castres |
- en 1749, construction du chemin actuel de Revel à Puylaurens, l’ancien chemin passant par Vauré et le Pont-Pauly reste toutefois « en service » ; sur le plan le « chemin de Puylaurans » existe déjà
- la carte de Monseigneur Dillon en 1771, reprend tous les détails de cette carte, y compris l’urbanisme extra-muros
Le plan de Monseigneur Dillon – 1771.
Extrait de la « Carte générale du canal du Languedoc »
- on retrouve les tracés des chemins de la Carte du Diocèse de Lavaur (169.) par Monseigneur Charles le Goux de Laberchère, évêque de Lavaur
- les projets de petite et grande fontaine effectués en 1763 et 1764 par Albarède, dessinés par Renauld correspondent peut-être aux fontaines dessinées sur le plan – sur un des projets (celui de 1763 – la petite fontaine) il est écrit « projet de la fontaine qui sera adossée contre le mur de la boucherie »…) – cf. Collado pages 188-191
- plan de Revel en 1770 (voir Collado page 39)
- voir aussi les plans à la page 32 de la publication de Collado
- la maison de la rue des Ecuries est démolie en 1791 (maison « Jammes » - rue de Toulouse sur le plan)
- destruction de la porte de Soréze en 1775 (cf. Collado page 299)
- construction en 1777 de la « Maison du Portier » à la porte de Soréze (cf Collado page 299)
Grâce à tous ces éléments objectifs, on peut avec beaucoup de certitude dater ce plan dans la décennie 1760 – 1770.
c) ANALYSE DU « CONTENU »
LEGENDE DU PLAN
Pas de légende particulière, seul est mentionné le titre
« PLAN DE LA VILLE
Et Faubourgs De Revel, au Diocèse De Lavaur »
L’échelle du plan est dessinée sur une règle divisée par repères de 10 toises (de 0 à 100 toises donc 10 repères) , avec une autre subdivision unitaire sur la gauche de 0 à 10 toises (sont mentionnés 0 – 5 et 10).
Les points cardinaux sont bien mentionnés :
Par contre, il y a inversion de l’orientation (le nord est en bas de la feuille, le sud est en haut).
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LES ANNOTATIONS
Certains toponymes sur ce plan ne semblent pas typiquement « revélois ».
Ainsi « la rue du Rieu » (qui localement n’a jamais porté ce nom) et la « Rue couverte » sont un vocabulaire ne correspondant pas à la « culture révéloise » (le vocabulaire du géomètre n’a parfois rien à voir avec celui utilisé à Revel à l’époque).
LES BATIMENTS
Si la plupart des « moulons » sont illustrés par de grands rectangles grisés qui ne permettent pas de lire la trame des parcelles, quelques annotations désignent toutefois les fonctions de certains bâtiments : « thuillerie » - four – écorchoir – boucherie – hôtel de ville – bastion – église. Un bâtiment situé vers le sud (en haut de la feuille) est désigné fort curieusement par la lettre majuscule « A » désignant ainsi la particularité de ce bâtiment. Quel était la fonction de cette maison?
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Revenons à l’angle de la rue Notre-Dame et de la rue de Toulouse (rue des Ecuries actuellement) : un petit rectangle empiète fortement sur la rue de Toulouse, il s’agit d’une chambre construite sur pilotis ayant appartenu à un dénommé Jammes (elle existait depuis plus d’un siècle - cf. Collado page 70). Dans un souci d’améliorer la circulation et le « passage de l’air », elle sera achetée en 1791 par la ville et sera démolie.
Quatre « thuilleries » avec four sont localisées à l’extérieur des remparts, une autre se situe plus au sud (à quelque distance du « Padouvenc Notre-Dame »).
Si les « Thuilleries » sont nommément désignées, c’est qu’elles constituent un élément important de la vie de la cité.
Le plan de l’église est particulièrement soigné. On notera la présence d’une croix avec socle dans l’angle extérieur sud-ouest.
Un début d’urbanisation disséminé est présent tout autour de la ville et « extra-muros », il est plus dense vers le nord autour du « chemin de Puylaurens » (Route de Castres).
LA PLACE CENTRALE
Ici aussi le « géomètre » a le souci du détail (le nombre et la situation des piliers correspondent à la réalité). Par contre, l’emplacement des piliers sous la halle n’est pas figuré.
Les « garlandas » sont appelées « rue couverte » on sait qu’avant la création des boulevards toute la circulation était obligée de passer par le centre ville.
Arrivée à la place centrale et venant d’une des quatre entrées de la ville (une des quatre portes), la circulation se faisait sous « las garlandas » y compris les chariots et charrettes. Les galeries étaient des … rues !
Evidemment lorsqu’on venait d’une des portes et qu’on devait traverser la ville pour sortir par une autre porte (qui obligatoirement ne se trouvait pas dans le même alignement), un tracé en baïonnette était effectué au niveau de l’entrée de la place. La pénétration directe vers le centre de la place n’était pas possible, en effet à l’intersection des rues perpendiculaires, les piliers étaient rapprochés (au niveau du premier étage les ensembles de maisons accolés faisant une sorte d’arc au dessus de l’embranchement des rues).
Cette situation est parfaitement illustrée sur ce plan.
La présence de piliers au « centre » du croisement des « garlandas » est évidente sur le plan.
Dans le quadrilatère formé par la place, une croix et son socle sont situés dans le quart nord-ouest, deux fontaines sont localisées dans les quarts sud-ouest et nord-est (correspondent-elles aux projets élaborés en 1763 et 1764 par Albarède ?).
Sous la halle on notera la présence d’un écorchoir et d’une boucherie (précisions écrites sur le plan). Le rectangle figuré au sud-ouest sous la halle illustre la présence des « mesures à grains », on en dénombre neuf (si le souci du détail a été poussé jusque là), actuellement 6 mesures sont exposées à Revel, elles portent les mentions décalitre – double décalitre – etc…
Deux séries opposées de marches permettent de monter sur le support des mesures (voir Collado page 85 et la publication de Jean Hébrard sur « Les anciennes mesures de Revel - les Cahiers de l’Histoire n° 5 - 1999)…
La base du beffroi (désignée sur le plan par la mention « Hôtel de Ville ») est bien délimitée, on note une « volée » de marches sur la façade nord (cet ensemble de marches semble interrompu par un espace horizontal en son milieu (décrit d’après les archives dans la monographie de Collado voir page 91) . Si le haut du beffroi a bien été reconstruit en 1829, la base actuelle correspond bien au dessin de ce plan (les marches sont toujours situées au même endroit).
RUE DU RIEU
On notera le souci du détail dans ce plan pour la « rue du Rieu » appelée aussi rue des Affacheries (rue du Temple actuellement) .
Ainsi sont figurées en grisé les parties surplombantes sur la rue (en solier) qui sont ou étaient autant d’ateliers de tanneries (voir dessin de Collado page 11) . Des galeries piétonnes permettaient ainsi de longer le « Rieu ».
Le ruisseau coulant au dessous permettait cette activité. Remarquer aussi la présence de « pontets », celui de la rue du Taur étant plus étroit que celui qui mène à la porte de Castres. Trois ensembles de deux petits traits parallèles doivent indiquer la présence au milieu de la rue de petites passerelles piétonnières permettant de traverser le ruisseau. Le « Rieu » (ruisseau ou « Mayral supérieur ») est bien indiqué, montrant à ses extrémités orientales et occidentales le passage de l’eau dans un aqueduc souterrain (vers l’est, l’eau passe sous une tour figurée en pointillés, donc certainement assez délabrée), l’alimentation se fait par l’actuelle rue Alexandre Monoury.
Deux petits rectangles « surgrisés » situés à l’est du pontet de la rue de Castres figurent peut-être la jonction de bâtiments entre les deux rives au premier étage.
Notons que dans sa partie orientale, le « Rieu » n’est pas dans la partie médiane de la rue, son tracé suit la base des façades des maisons en sa rive droite.
La rue du Rieu (actuelle rue du Temple) appelée aussi « rue des Affacheries » à une certaine époque, passage du « Mayral supérieur ».
Analyse des détails de « La rue du Rieu » (actuelle rue du Temple), les différentes zones « grisées » permettent de situer :
Le « Mayral supérieur » avait une largeur de 1,60m pour une profondeur de 2m, les parapets construits dans le prolongement des murs qui canalisaient le ruisseau mesuraient 0,90 m de hauteur.
La section du « canal » était rectangulaire (même largeur en haut au niveau de la rue et dans le fond).
Fin XVIIIème et début XIXème siècles, il était construit en briques, le fond était pavé de dalles en briques carrées posées « plat » (cf. page 200 de la publication de Collado).
LE MAYRAL INFERIEUR ou « RIEU MERDAL »
Comme son nom l’indique, il récupérait toutes les eaux usées de la ville. Son tracé est parfaitement dessiné, montrant en particulier son entrée extérieure au rempart vers l’est, et son exutoire près de la place du « Patis » à proximité du « Bastion ».
LES LIMITES DE LA VILLE
Le plan « Magues » montre que la ville était ceinturée d’un rempart renforcé par six tours (trois sont déjà fortement délabrées – elles sont figurées en pointillé).
Un bastion important est présent vers l’ouest (désigné par la mention « Bastion »), ainsi qu’une petite échauguette ( ?) semble-t-il sur le rempart sud (à quelques dizaines de mètres vers l’ouest de la porte Notre-Dame).
Présence d’une échauguette ( ?) dans le rempart sud…
Quatre portes sont présentes et sont nommées :
Le détail du dessin permet de supposer la présence de portes fortifiées avec pour certaines un système de doubles portes, la porte de Soréze en aurait-elle trois ( ?), précédées d’un pont enjambant des fossés.
Collado a bien retrouvé dans les archives la notion des six piliers structurant la porte de Soréze, mais il en a déduit que ces six piliers étaient alignés, ce que ne démontre pas le plan (voir Collado pages 299 alinéa « e » et dessin « e » de la page 10).
Trois portes sont dotées d’un corps de garde situé en rez-de-chaussée, en effet ce bâtiment est pourvu d’un étage (avec peut-être une autre pièce ) permettant de monter au « chemin de ronde » . La présence de marches bien visibles sur le plan autorise cette hypothèse.
La "porte Notre-Dame"
Celle de Soréze ne possède pas de corps de garde semble-t-il, mais un petit rectangle figuré en départ du pont sur le côté nord pourrait-être un bâtiment de contrôle (voir détail page 30). Dans le plan cadastral napoléonien, on voit près de cet emplacement une grande maison, « la Maison du Portier », appelée « Maison » (cf. Collado page 299 alinéa « f »).
Collado nous dit que la date de la construction de cette maison serait de 1777, année postérieure à la réalisation de ce plan .
Cet élément est aussi un élément de datation du plan qui est donc antérieur à cette date.
Concernant le bastion, un plan datant du début du XIXème siècle (1829), concernant la démolition d’une maison appartenant à la famille de Terson, porte à cet endroit la mention « jardin de M. de Terson ».
La fonction militaire est par contre certaine (une étude en cours des remparts dans cette partie montre la présence de meurtrières en nombre conséquent – une publication est en cours de rédaction).
Nous noterons certaines irrégularités dans le tracé du rempart dont l’explication nous échappe.
Ruptures dans l’alignement du tracé, excroissances externes, plans coupés pourraient être le signe que les remparts ont été construits après le développement de la ville. Ils se sont conformés dans un deuxième temps à l’urbanisme d’origine de la ville, ce qui corroborerait les informations portées dans diverses monographies: les remparts de Revel auraient été construits en 1355, quelques années après la fondation de la bastide (1342).
Le détail des remparts permet de visualiser la présence d’un parapet en partie supéro-externe et d’un chemin de ronde tout autour de la ville.
Certaines tours sont en demi-lunes (appelées « les ravelins » à Soréze – pour Revel nous n’avons jamais trouvé ce toponyme…), d’autres sont circulaires (celles figurées en pointillés semblent indiquer leur état de vétusté).
Sur le plan, la structure des remparts est apparente.
Un triple trait signale le chemin de ronde et le parapet supérieur. Les tours ou anciennes tours sont signalées, les ruptures de profil des alignements de remparts sont respectées.
les fossEs et les boulevards
On peut lire des mentions désignant la fonction de certains espaces (jardins, abreuvoirs, promenades) .
Le plan permet de repérer le système d’adduction de l’eau provenant de l’actuelle rue Alexandre Monoury.
Des ruisseaux, s’écoulant certainement en « bas de fossés » partiellement comblés, circulent tout autour de l’enceinte. Ils s’évacuent vers l’actuelle place du 11 novembre 1918 (place de la Poste) – deux traits parallèles semblent figurer les deux parapets d’un pont enjambant l’exutoire des eaux…
De nombreux signes alignés trahissent la présence importante de plantations d’arbres. Les archives municipales dévoilent qu’en 1779, on planta des allées d’ormeaux. Les fonds pour cette réalisation furent réunis grâce à la vente des arbres situés dans les fossés de la ville ou d’autres « hyais » (chemins communaux).
Cette modernisation de l’urbanisme de la ville permit :
- d’assainir les fossés remplis d’eau qui apportaient chaque été des maladies aux habitants (fièvres, etc…)
- de permettre la création de nouvelles habitations « extra muros » et ainsi d’accroître la population.
Des chemins préfigurent les futurs boulevards. On note déjà la volonté de valorisation d’espaces d’agréments, notamment en sortant de la porte Saint-Antoine, sur la droite (jusqu’à la porte de Castres), se développe une « promenade » avec trois accès clairement situés – sont-ils des pontets sur des petits ruisseaux ou tout simplement des ouvertures entre des murets (?) .
Les fossés sont déjà en grande partie comblés ; seuls vestiges, les abreuvoirs indispensables aux animaux (indispensables toute l’année bien sûr, mais aussi et surtout lors des jours de « marché » ou lorsque les « troupes militaires » prennent « pension » à Revel).
La distinction est faite entre les jardins, les champs, les prés, les vignes (au sud) et les potagers. Nous noterons le plan parcellaire de certains jardins et potagers (quelques centaines de parcelles), démontrant une partie de la dynamique de l’économie de subsistance des familles revéloises – chaque famille devait avoir un lopin de terre ( ?).
A l’est du « Faubourg de Castres », le tracé des jardins est remarquable avec une zone centrale circulaire (une fontaine ?) et deux entrées à l’est et à l’ouest parfaitement délimitées – il s’agit du « Jardin Potagé »…
Les « padouvencs » sont situés et dénommés :
Que dire du « chemin. Et jeu du Mail » Ce chemin emmenait-il à un espace de loisirs (voir l’encadré et les illustrations) ?
Le "jeu de mail" |
On jouait encore au « jeu de mail » (ou jeu de Croquet) près de la gerbe de Saint-Ferréol (plaque de verre collection Michel Gô
– photo réalisée certainement par M. Cammas de Soréze à la fin du XIXème – début XXème siècles )
Le jeu de mail est un ancien jeu sportif français. La plus ancienne trace écrite liée au jeu de mail est un texte en latin datant de 1416. Très pratiqué en France et en Italie Moyen Âge, le jeu atteint l'Angleterre au XVIIème siècle, époque à laquelle il est à son apogée en France (sous le nom de Pall Mall dérivé probablement du terme français palemail ou paille-maille - la maille étant un petit maillet envoyant une balle sous un arceau de paille, autre nom donné au jeu en France aux XVI - XVIIème siècles).
A l'origine du golf, du croquet et même du billard, ce sport pouvait se pratiquer en individuel ou par équipes.
Le jeu Il existe quatre façons de jouer : rouët, partie, chicane ou grand coup - La chicane est semblable au golf actuel. Le vainqueur était, comme au golf, celui qui atteignait un objectif fixé à l'avance en moins de coups. - La balle est en bois, généralement en buis, mais les meilleures balles étaient celles en bois de néflier.
(source Wikipedia) |
On attirera l’attention sur la présence de croix avec socle figurées à chacune des quatre entrées de la ville.
Les « chemins principaux » indiquent les grandes directions. Ils sont au nombre de quatre, tout comme les portes :
- « chemin de Castelnaudary » (qui a une direction différente de l’actuel – celui du plan passe par Dreuilhe)
– à remarquer près du bâtiment marqué de la lettre « A » un symbole qui peut indiquer la présence d’un pont … Qu’indique la lettre « A » , une bâtisse remarquable ?
- « chemin de Toulouse » (qui est placé face à la porte Saint Antoine – la route de Toulouse actuelle n’est pas encore tracée– la rue de Vauré est « aveugle » c’est à dire est fermée vers l’ouest par les remparts)
- « chemin de Soréze »
- « chemin de Puilaurans » actuelle route de Castres
Un autre chemin important
- « chemin de Saint Félix de Caraman » qui longeait la rigole à la sortie du Padouvenc de Notre-Dame.
La « Rigole de Canal Royal » et sa « Chausfée » est tracée avec le sens du courant de l’eau (présence du pont sur le « chemin de Castelnaudary »).Sur le plan, en « additif », un tracé au crayon, placé certainement après l’édition du plan montre le projet de création d’un chemin joignant la chaussée de la rigole (M. Albin Bousquet y voit peut-être le projet d’emmener de l’eau en affluence à la rigole - en effet il y a bien un double tracé joignant à la fois la rigole et la chaussée..…) .
Au sud du plan, dessinant une bifurcation, l’« Ancien Chemin » est noté, correspondant à l’actuel « Chemin des Vignes ».
2/ LE PETIT PLAN (numéro 2).
Dimensions : 52 cm x 87 cm
Il est la copie partielle et moins détaillée du plan n°1. Certaines annotations ne sont pas terminées comme pour la galerie couverte située au midi.
3/ LE PLAN COLORISÉ (numéro 3)
Ce plan est une copie effectuée à partir d’un plan existant aux Archives des Voies Navigables de France (V.N.F), daté de 1780 .
L’original des archives de V.N.F est beaucoup plus détaillé et plus important (il y a le Port Louis …). Les couleurs sont respectées.
Nous le retrouvons dans la grande carte appelée « Carte des Rigolles qui fournissent l’eau au canal », dans ce plan , il ne figure qu’en toute petite partie, et est aussi colorisé en « rose ».
Le « plan Maguès n°3 » est bicolore, le tracé des voies et des rues est dessiné au trait noir, l’urbanisme des bâtiments étant de couleur « rose ». Les dimensions sont de 60 cm en direction nord-sud et de 79 cm en est-ouest.
Le tracé » de la rivière Sor est figuré au nord de la feuille. Sur le plan urbanistique, le tracé des remparts est bien figuré et montre la présence uniquement des quatre portes (Notre-Dame, Saint-Antoine, de Castres, de Soréze). De nombreuses annotations chiffrées sont présentes « autour de la ville » manifestement ce plan a servi de base de travail pour le géomètre (nombreuses annotations au crayon)… On remarque tout particulièrement, deux zones importantes qui semblent servir de point de repère géométral, à savoir la porte Notre-Dame et ce qui semble être le projet de création de la « Patte d’Oie » (voir détail page 21).
Accolée à la halle centrale on note la présence de la petite fontaine (« projet de la fontaine qui sera adossée contre le mur de la boucherie »…) – cf. Collado, pages 188-191) et de la grande fontaine figurée par un petit rond dans le quart sud-ouest de la place centrale.
Deux tracés au crayon légèrement estompés montrent le futur emplacement de la route de Saint-Ferréol et celui de la route de Castelnaudary (la mention « Route de Castelnaudary » et « Route de Carcassonne » sont d’ailleurs visibles).
D’autres mentions sont difficilement lisibles car portées au crayon et pratiquement effacées :
- vers Dreuilhe (… de Castelnaudary ?) – la partie illisible pourrait être - Route de -
- vers Caraman (Route de … ?) – la partie illisible pourrait être – de Caraman ou de Toulouse -
Les annotations sont essentiellement des données chiffrées de distances d’un point remarquable à un autre. Ces dimensions sont portées en mètres (donc après 1795 ).
La plupart concernent les espaces situés sur les allées du « tour de ville » et pourraient suggérer que nous sommes en présence du projet d’aménagement du « tour de ville et de la patte d’oie »...
Le plan de l’église de Revel permet d’affirmer que le plan est antérieur à 1830 et postérieur à 1741. La présence de quatre portes uniquement montre une antériorité à 1776 - 1778 .
Aucun titre général n’est donné à ce plan.
Les détails de l’emplacement des maisons « extra-muros » sont pratiquement identiques aux deux autres plans ainsi que le tracé de la voierie.
S’il s’agit bien d’un projet pour la « Patte d’Oie » et de la mise en place des boulevards, on peut le dater des années 1770 – 1775.
Les annotations sont plus tardives et données en mètres, elles posent problème, la « patte d’oie », les routes de Castelnaudary et de Saint-Ferréol ayant été construites avant 1789.
REMERCIEMENTS
Pour mieux comprendre et décrypter les différents « plans Maguès », il est indispensable de lire ou relire les différentes monographies concernant Revel.
Incontournable est l’étude de Victor Collado (alias « Bénarès») qui est une mine de renseignements.
Collado a notamment étudié les archives communales de Revel correspondant au XVIIIème siècle (archives contemporaines à l’illustration des plans).
Grace à son étude nous avons pu faire une fine analyse des détails portés sur ces plans.
Deux éminents membres de la Société d’Histoire de Revel Saint-Ferréol m’ont fourni des renseignements primordiaux (Jean Hébrard et Albin Bousquet). Je les en remercie chaleureusement.
Mes remerciements iront aussi à Monsieur Maguès Charles qui dans un souci de protection du patrimoine a su préserver ces documents en les déposant à la mairie de Revel.
QUELQUES REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
BARRAU Pierre – Antoine (1798-1865) – 1837- Essai historique sur la ville de Revel et de ses alentours.
BEGUE J. -1885 – Monographie de la commune de Revel
COLLADO Victor alias BENARES – 2002 – Une bastide royale – au siècle des Lumières :Revel. Imprimerie Messages – Toulouse
DOUMERC Gustave -1976 - Histoire de Revel en Lauragais
GERY Léodère – 1903 – Monographie de Revel
MORERE Abbé – 1899 – La ville de Revel en Lauragais. Imprimerie des Apprentis-Orphelins – Albi
« plan Maguès » numéro 3 Détail de la ville de Revel. L’urbanisme « extramuros » a peu évolué par rapport au plan numéro 1. |
Deux zones importantes sur le plan : celle de la porte Notre-Dame (qui sert de point de repère) et le futur emplacement de la « Patte-d’Oie » (ensemble circulaire à droite).
La « porte Saint-Antoine, la « place du Paty » et le « Bastion ». La rue du « Four » est encore en « cul-de-sac », la maison de Terson de Paleville n’est pas encore détruite… |
La place centrale. On remarque, figuré par un demi-cercle, la fontaine qui jouxtait la boucherie sous la halle, le cercle figure une fontaine sur la place dans l’angle sud-ouest. |
DETAILS DU PLAN MAGUES numéro 3
La « porte Notre-Dame »… Un petit bâtiment extérieur est présent – s’agit-il de celui mentionné dans la monographie de Benarès |
La « porte de Castres », le plan au sol est intéressant et montre l’importance de cette porte… |
M. Charles Maguès, donateur des plans (à gauche de la photo),
en compagnie d’un spécialiste des « Sources du Canal du Midi »
: Albin Bousquet.
Ces plans sont particulièrement importants puisqu’ils
donnent un tracé fidèle du système défensif de la bastide
(à ce jour, son tracé n’était pratiquement pas connu).
Moment important pour l’historien lorsqu’il analyse les plans
leur étude permet de recouper des informations déjà connues.
Les détails de l’intérieur de la bastide sont aussi nombreux
et riches d’enseignements.
Il s’agit de documents précieux et indispensables pour la
connaissance de l’histoire de notre ville.
Revel DE NOS JOURS … (extrait de la carte IGN).
Le tracé des rues se coupant à « angle droit » s’est prolongé au delà
des remparts, montrant la vitalité, le dynamisme de cette charmante
petite ville qui compte aujourd’hui presque 10000 habitants…
Une bastide qui a prospéré !
PLAN ANNEXE 1
(carte des environs de Revel datant de 1780) montrant la similitude avec le « Plan Maguès numéro 3 »)
Carte des environs de Revel datant de 1780.
Archives des Voies Navigables de France
Le plan Maguès numéro 3 est une copie moins détaillée de ce plan – la colorisation est respectée…
PLANS ANNEXES 2 et 3
montrant la similitude avec le « Plan Maguès numéro 3 »
Autre carte des archives des V.N.F, montrant la similitude avec le « plan Maguès numéro 3 ».
« Carte des Rigolles qui fournissent l’eau au canal » archives des V.N.F
Les archives municipales de Revel, celles du Canal du Midi (V.N.F) possèdent de nombreux plans où l’on peut suivre la lente écriture du paysage autour de Revel ainsi que les « métamorphoses » de la ville elle-même.
Revel, bastide royale, héritière d’une longue tradition possède un maillage typique lié au « phénomène bastide ».
Créée en 1342, elle fait partie de la « quatrième génération de bastides », et à ce titre, est une bastide qui a bénéficié du « savoir faire » des expériences passées. Elle est une « bastide parfaite » !
Le tracé des fortifications, réalisé quelques années seulement après la fondation, enserre la ville dans un espace restreint. Certaines rues ont la chance de se terminer par des portes, mais dans les autres, transformées en cul-de-sac, la vie est statique.
A partir de la seconde moitié du XVIIIème siècle, Revel s’impose comme un carrefour régional avec ses routes vers Castres, Toulouse, Carcassonne et Castelnaudary.
La présence des fortifications (qui « asphyxient » la ville) se trouve en contradiction avec le large éventail des chemins qui s’ouvre au sud de la ville, au lieu-dit « la Patte d’Oie », dont le nom rappelle un célèbre grand carrefour toulousain.
En quelques décennies, les murs vont disparaître, et le début du XIXème siècle présente une ville en pleine métamorphose, où fossés et remparts se changent en boulevards. La ville est préparée pour les grands enjeux et défis des XXème et XXIème siècles.
Lorsqu’on regarde une carte postale, il faut prendre son temps, l’ analyser, faire les agrandissements nécessaires pour mieux voir les détails.
Cela est maintenant possible grâce aux moyens modernes de visualisation, notamment les images numérisées. Mais parfois des « mirages » peuvent apparaître !
Sur la photo de gauche, est présentée une carte postale ancienne de la rue de Dreuilhe, certains y ont « vu » tout au fond de la rue, près de la « patte d’Oie », la « porte » de Dreuilhe (*) , une porte qui semble bien « monumentale ».
Une autre carte postale contemporaine de la première (celle de droite), apporte la preuve que « la porte » n’est autre que les jeux d’ombres portés par les arbres.
Bien entendu, la « porte » de Dreuilhe n’existait plus à la fin du XIXème – début XXème siècles… (*) construite en 1776 (une ouverture avait déjà été faite intentionnellement en 1769 – 1770 et refermée sous la pression des habitants de la rue Notre-Dame, cette nouvelle ouverture leur portant préjudice)… L’ouverture de cette « porte » (en vérité une simple brèche dans les remparts) allait apporter la prospérité aux riverains. La rue de Dreuilhe est restée de nos jours une rue commerçante dynamique !
Le « plan MaguEs numEro 1 » - dEtail du centre de la ville .
Plan de Revel au XVème siècle d’ après M. Berthe (publication « New Medieval Towns of the South West – 2007)
Le tracé des remparts est en partie erroné, notamment dans la partie du haut entre la « porte de Castres » et la porte « Notre-Dame ». La limite des remparts est située beaucoup plus vers le centre-ville.
Le « PLAN MAGUES » permet de rectifier certaines inexactitudes…
Ancienne carte postale représentant le boulevard de la République… Des détails en arrière-plan sont particulièrement intéressants (voir agrandissement ci dessous). |
UNE Image figEEe montrant la lente mEtamorphose de la ville - fenEtre ouverte sur un passE rEvolu… Lorsqu’une ancienne carte postale permet de vérifier les détails d’un plan du XVIIIème siècle, la satisfaction est grande pour l’historien.
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Les années 60 …
La « trame urbaine » commence timidement à envahir les alentours de la bastide médiévale…
Encore beaucoup de champs et de jardins…
Les rues du centre ville vont se prolonger en ligne droite en dehors de l’ancienne limite des remparts…
La population augmente …
Le cimetière va s’agrandir, l’extension est visible…
Le boulevard Lazare - Carnot
Photo sur plaque de verre (début XXème siècle ?) - collection Roger Jullia.
Derrière le mur (à gauche) la cime des arbres et arbustes émerge à peine du niveau du boulevard. Une importante dénivellation est présente derrière ce mur (plusieurs mètres), les anciens fossés sont encore présents.
Façade à pan de bois |
LE PARCELLAIRE ACTUEL (d’après le cadastre -en haut- et la vue aérienne de la bastide de Revel) …
On distingue les « ayrals » individuels conformes à la charte de fondation et notamment l’article 29 : « il sera donné aux bourgeois et jurés de ladite ville des portions du sol de la dite forêt pour construire leurs maisons. Chacune d’elles aura de largeur de cinq brasses et trois razes, et de profondeur onze brasses et trois razes ….. »
Plan « Maguès n° 1
C’est le plan le plus détaillé, il constitue un document remarquable et permet d’avoir un aperçu général du système défensif de la ville. Il mesure 53 cm d’est en ouest et 153 cm du nord au sud.
L’espace concernant la ville de Revel mesure 35 cm sur 30 cm environ, une grande place est faite aux voies externes à la ville et à son urbanisme « débutant ».
Détail de la porte de Soréze avec ses « rangées de trois piliers ». |
La rue A. Monoury et son alimentation en eau de la ville prolongée par l’actuelle « rue du Temple ». Les « Thuilleries » sont à proximité de l’eau… |
Plan « Maguès n°2 »
Dimensions : 52 cm x 87 cm
Il est la copie partielle et moins détaillée du plan n°1. de la feuille
Plan « Maguès n°3
Le « plan Maguès n°3 » est bicolore, le tracé des voies et des rues est dessiné au trait noir, l’urbanisme des bâtiments étant de couleur « rose »
Les dimensions sont de 60 cm en direction nord-sud et de 79 cm en est-ouest.
C’est sur ce plan que sont annotées de nombreuses dimensions au crayon, notamment près de la porte Notre-Dame et à l’endroit où se trouve actuellement
la « Patte-d’Oie ». Ce plan a certainement servi de base de projet à la mise en place du « Rond-Point ».