Société d’ Histoire de Revel Saint-Ferréol PARU DANS LES CAHIERS DE L’ HISTOIRE NUMERO 12 - 2007 - |
Monographie de la Section de Couffinal |
Par décision ministérielle, vers la fin du XIXème siècle chaque instituteur était chargé de rédiger une monographie de la commune du lieu d’exercice. Ils firent ce travail avec conscience, utilisant les documents mis à leur disposition par les ressources communales et leurs inclinations personnelles (histoire, géographie, pédagogie …). La monographie présentée ici est consciencieuse et donne des détails utiles sur ce village, à la périphérie de la commune de Revel et du département de la Haute Garonne, enclavée dans le Tarn, et sur lequel les études historiques ne sont pas légion. D’où l’intérêt de ce document qui date de l’année 1886. |
Le village de Couffinal, section de la commune de Revel, se trouve sur les confins du département de la Haute Garonne et est pour ainsi dire enclavé dans celui du Tarn. Sa forme est très irrégulière et son terrain peu accidenté.Il est limité au Nord par la commune de Blan, à l’Est par celles de Belleserre et de Soréze, à l’Ouest par celles de Gandels et de Palleville - Lastouzeilles et au Sud par celle de Revel. Toutes ces localités, à l’exception de Revel appartiennent au département du Tarn. Quoique cette section ne figure pas au nombre des communes son étendue est vaste cependant ; elle comprend 830 hectares. Cette superficie renferme environ (environ) 150 hectares de prairies artificielles ou naturelles, 250 hectares de vignes, 350 hectares de terres labourables et 20 hectares de bois. On ne remarque pas des terrains incultes. Couffinal se trouve à quatre kilomètres du chef-lieu de canton (Revel), à trente quatre kilomètres du chef-lieu d’arrondissement (Villefranche) et à cinquante six kilomètres du chef-lieu du département (Toulouse). On voit d’abord du côté du Sud une vaste plaine ; au centre s’étend un petit vallon qui va de l’Est à l’Ouest, au Nord, le terrain représente encore une plaine mais moins étendue que celle de la partie Sud. Au nord du village, on remarque trois petits ruisseaux dont les eaux fécondent les prairies naturelles.
Carte des ruisseaux incluse dans la monographie
Le premier porte le nom de Riou Pountet, c’est un affluent d’un cours d’eau qui passe à Soréze et qu’on appelle Rigole de la Montagne : il coule dans la direction du Sud-Est au Nord-Ouest. Le livre de Marie Agnes winter sur les Eglises du canton de Revel Le second qui se trouve un peu plus au Nord est aussi un affluent de la Rigole de la Montagne et porte le nom de Riou d’en Sicel, il suit la même direction que le premier, mais arrivé à un endroit qu’on nomme al Riou, il se dirige vers le Nord pour aller se jeter trois kilomètres plus loin dans la rivière appelée le Sor. Enfin le troisième qui est à l’extrémité Nord-Est de la section et qu’on appelle « aygo pessedo » prend sa source du côté de Soréze. Il coule dans la direction de l’Est au Nord et après avoir traversé une plaine appelée Les Canards, il va se jeter dans le Sor affluent de l’Agout.
Sur le parcours de ces trois cours d’eau, il n’y a aucun gué digne d’être signalé. Les habitants de la localité ne font usage que des eaux provenant des sources ou de la pluie. Les puits sont nombreux et dans certains endroits les sources sont si abondantes, que malgré une grande sécheresse, l’eau reste toujours à un niveau assez élevé.
La section de Couffinal compte une altitude de cent quatre vingt dix huit mètres.
Son climat est tempéré et quelquefois pluvieux. Les chaleurs de l’été sont parfois préjudiciables aux récoltes, surtout si quelques averses ne viennent pas rafraîchir le terre. Lorsque le froid se fait sentir vivement cela ne dure que quelques jours ; la température revient bientôt à son état normal.
Les vents qui soufflent dans la localité viennent du sud-est, du sud et de l’ouest. Le vent du nord souffle rarement. Il n’en est pas de même de celui qui vient du Sud-Est et qu’on nomme vent d’autan. Celui-là souffle fréquemment dans la contrée et cause quelquefois des dégâts assez considérables. Il souffle pendant quatre à cinq jours sans interruption et avec une fureur telle, qu’il déracine les arbres, dégrade les toitures et fait suspendre tout travail. Il paraît même que le pays fut abandonné avant la Révolution à cause de sa violence.
Les habitants voyant leurs récoltes perdues et leurs demeures en partie démolies, prirent cette résolution énergique et ne revinrent que quelques années plus tard.
Les vents du Sud et de l’Ouest soufflent quelquefois mais ils ne sont pas à redouter.
Le climat est tempéré. Il est rare de voir tomber de fortes pluies, ce qui fait que les eaux des viviers communaux diminuent sensiblement et que durant les grandes chaleurs de l’été, il faut avoir recours à la Rigole de la Montagne. En général, les pluies ne tombent ni en assez grande quantité, ni assez souvent dans la belle saison. Cependant la nature du terrain se prêterait plutôt à l’humidité qu’à la sécheresse. La température dans la section de Couffinal est généralement douce à l’exception toutefois de quelques journées de fortes chaleurs et de quelques jours de froid un peu vif.
En ce qui concerne la salubrité, les habitants ne font pas tout ce qui dépend d’eux pour la maintenir. De ce côté, ils sont un peu négligents et si le pays n’était sain par lui-même ; les personnes contracteraient certainement de nombreuses maladies. Il faut en convenir cependant, cet état de choses s’améliore pour ainsi dire chaque jour et un moment arrivera où la salubrité publique sera bonne. IILe recensement de 1881 a donné à la section de Couffinal une population de 529 habitants ; aujourd’hui, bien loin d’avoir diminué, ce nombre peut être porté à 600, soit une augmentation de 71 habitants environ. Il y a lieu d’espérer que ce mouvement ne s’arrêtera pas et que la Le hameau du village se divise en trois quartiers appelés : Labaylarié, En Boyer et Bois-Batut. Les habitants de Couffinal ont confié la défense de leurs intérêts à deux conseillers municipaux M. M. Félix Pontier de Laprade et Joseph de Lagausie. Les conseillers municipaux de la ville et des sections se réunissent dans une des salles de la Mairie de Revel pour délibérer sur les affaires communales. L’honorable maire de Revel, Monsieur Sarrat, préside ces assemblées. Les autres fonctionnaires de la localité sont le curé et l’Instituteur. Des sœurs de la sainte famille de Nazareth, donnent l’instruction aux filles. Leur établissement est libre. Il y a encore un garde-champêtre qui dessert en même temps la section de Vauré et celle de Dreuilhe.
Les finances sont administrées par un receveur et par un percepteur résidant à Revel. section comptera au moins 650 habitants au prochain recensement. Le chiffre de la population qui s’élevait à 680 h en 1874 était descendu à 529 h en 1881 parce que plusieurs familles étaient allées dans le Bas-Languedoc. Maintenant que le phylloxéra a ravagé cette contrée quelques-unes ont regagné leur ancienne résidence et le nombre des habitants a augmenté. Les postes et télégraphes sont administrés par une directrice des postes en résidence à Revel. La distribution des lettres, journaux et autres colis postaux a lieu tous les jours de 10 heures du matin à une heure du soir. Pour l’expédition des dépêches télégraphiques, il faut se rendre à la mairie. La commune de Revel étant très importante la valeur totale du centime s’élève à 483,88 centimes. Les revenus ordinaires s’élèvent à la somme de 65 642Fr32 centimes.
III
Chaque briqueterie fournit en moyenne 120 000 pièces chaque année. Tous ces produits sont expédiés dans les localités environnantes : cette industrie ne chôme jamais. Les voies de communication qui desservent Couffinal sont au nombre de trois : 1. La route départementale qui va de Revel à Castres ; 2. La route départementale qui va de Revel à Puylaurens ; 3. Le chemin d’intérêt commun qui passe au milieu du village. Les chemins ruraux sont nombreux et assez bien entretenus. Les moyens de transport dont peuvent se servir les habitants sont au nombre de deux : le chemin de fer et les voitures publiques.
Pour voyager par la voie ferrée, il faut se rendre soit à la gare de Revel, soit à la station de Blan. Les voitures publiques partent ordinairement de Revel ; de là, elles se dirigent sur divers points. Pour se rendre au chef-lieu du canton, on se sert généralement de voitures ordinaires, mais pour se rendre soit à Villefranche, soit à Toulouse on prend le chemin de fer. Le commerce de la section est peu important parce que Revel n’est pas éloigné. On trouve cependant des personnes qui s’occupent de l’achat ou de la vente des grains, d’autres qui achètent des étoffes, d’autres des bestiaux. Quelques unes tiennent des magasins d’épicerie et de mercerie. On y voit encore des cordonniers, des charpentiers, des forgerons, un boulanger, etc. Il n’y a dans Couffinal ni foires, ni marchés, Revel est le centre du commerce.
Fac similé de la fin manuscrite de la monographie Depuis que le système métrique a été rendu obligatoire, les mesures locales ne sont plus utilisées. On a reconnu avec raison, les avantages d’un système uniforme de poids et de mesures.
IV
Le mot de Couffinal vient sans doute du nom du château (Couffinal) habité par la famille de Laprade. Tout fait supposer qu’il en est ainsi. Avant la Révolution, le hameau principal était au Pugets ; or à cette époque l’église fut démolie ou tomba en ruines ; quelques habitants suivant sans doute les conseils de M. de Laprade, résolurent de construire la nouvelle en un lieu appelé en Boyer. Ce qui avait été décidé fut mis à exécution et l’emplacement actuel du village qui ne comptait que quatre ou cinq mauvaises chaumières vit s’élever bientôt plusieurs maisons auxquelles dans la suite vinrent s’en ajouter d’autres. Le quartier prit alors le nom de Labaylarié. Quelques années plus tard sans qu’il soit possible de dire pourquoi, ni comment le territoire de la section prenait le nom du château et s’appelait Couffinal, nom qu’il a conservé depuis.
Couffinal ayant toujours été section de la commune de Revel, n’a pas d’histoire municipale proprement dite. Il n’y a ni traditions, ni légendes. En ce qui concerne les personnages célèbres nés dans l’endroit, on peut citer Las Cases, l’auteur du Mémorial de Sainte Hélène. D’après quelques versions plus ou moins vraisemblables, Las Cases aurait reçu le jour dans le château de la Serre (Couffinal) propriété dépendant alors d’une autre qui se trouve un peu plus au Nord et qu’on nomme encore aujourd’hui Las Cases. Le principal idiome de la localité est le patois que tous les habitants parlent avec une certaine facilité. On ne chante que des chansons ou des chœurs patriotiques dans la section. Les mœurs de la population sont bonnes. Tous les habitants appartiennent au culte. Les costumes, à l’exception de ceux de certaines personnes de distinction, sont peu élégants, mais propres. Depuis quelques temps il y a beaucoup de changement sous ce rapport. L’alimentation est bonne, copieuse, et conforme à l’hygiène. Il n’y a aucun monument remarquable dans la section. Les châteaux qui existent ont été restaurés et n’ont plus aujourd’hui le caractère des temps anciens. Lors de la création de l’école publique, la commune n’ayant pas de local, loua une maison à Monsieur Durand Henri moyennant une somme de 80 F par an.
Quelques années après un projet de construction fut arrêté et depuis 1882 la maison d’école appartient à la commune. L’école communale de garçons est construite à cent mètres environ du village, le long du chemin d’intérêt commun ; cet établissement est sain, bien aéré et répond parfaitement aux besoins du maître et des élèves.
Le logement personnel de l’instituteur et la salle de classe ont 14 mètres de longueur sur 9 mètres de largeur. Il n’y a pas d’appartements pour le maître sur la salle de classe. La cour non clôturée à 20 mètres de longueur sur 12 mètres de largeur.
Tout autour de l’établissement, il y a un espace libre de 5 mètres 50 centimètres. Le jardin situé à l’Ouest de la maison d’école à 35 mètres de longueur sur 20 mètres de largeur. Il est entouré par une haie.
L’école est fréquentée assez régulièrement pendant l’automne et l’hiver mais durant la belle saison, les absences sont nombreuses vu que les parents gardent leurs enfants pour se faire aider dans leurs travaux journaliers.
Enseignement
L’enseignement a été donné vers 1823 dans la section de Couffinal.
Le premier maître connu est Monsieur Matabiau, relieur, qui ayant loué une maison à M. Imbert propriétaire se mit à donner des leçons aux enfants qu’on voulait bien lui confier Après lui vint Monsieur Bardy, homme possédant une certaine instruction et ayant l’amour du travail. Ce maître arrivé en 1830 resta pendant près de vingt ans dans la localité. Par sa conduite exemplaire il sut gagner l’estime de la population. Les enfants avaient en lui un bon instituteur. Vers 1850 les familles de Laprade et de Beauregard firent construire une maison dans le village au lieu dit d’En Boyer et établirent une école libre où tous les enfants, filles et garçons, furent appelés. La direction de cette école fut confiée à deux sœurs de la Sainte Famille de Nazareth. Cet établissement d’instruction existe encore, mais il ne reçoit plus que les filles. Depuis la création d’une école communale de garçons. L’école de garçons date de 1871. La création est due en grande partie à un ancien conseiller municipal de la section, Monsieur Banquet Jean Pierre (*) qui n’hésita pas à fournir le traitement à l’Instituteur pendant près d’une année : la commune n’ayant pas encore voté les fonds nécessaires. Une somme de 500 F fut d’abord portée sur le budget ; deux ans après le traitement était porté à 700 F. A partir de ce moment, les directrices de l’école libre qui recevaient un secours de 200 F en furent privées. L’état de l’instruction n’est pas très satisfaisant parce que les enfants abandonnent trop tôt le chemin de l’école. Il faut espérer qu’il n’en sera pas toujours ainsi et que les parents sauront se priver un peu afin de permettre à la jeune génération d’acquérir une bonne instruction. Tous les jeunes gens qui ont pris part aux opérations du tirage au sort cette année, savent lire, écrire et compter. Les conjoints qui n’ont pas pu signer leurs noms sont aux nombres de deux.
NDLR : à noter le
nombre d’absences plus élevé en été qu’en hiver…
Carte des chemins incluse dans la monographie
La bibliothèque scolaire est fondée depuis trois ans ; elle possède 22 volumes provenant d’une concession ministérielle en date du 29 mai 1883 ; il y a eu 12 prêts cette année. La municipalité n’a pas encore voté les fonds pour la création d’une caisse des écoles. L’école possède une caisse d’épargne. Le nombre des déposants est de 19, le nombre des livrets est de 11 et le montant des versements de 24 F70. Le traitement de l’instituteur qui n’était que de 700 f en 1876 s’est élevé à 800 F en 1878 ; aujourd’hui il est de 900 f. Il serait nécessaire d’acheter une pompe dont le puits de l’école est dépourvu. Couffinal, le 19 juin 1886 L’Instituteur .Ramond
(*) Note de la rédaction : Banquet Jean Pierre habitant de Couffinal figure sur la liste des acquéreurs paysans des biens des émigrés, avec la mention « (illettré) » (A. Thouroude, la vente des biens nationaux du district de Revel, Toulouse, Bonnet, 1912, p. 164)
Il est curieux de voir cet « illettré » prêter de l’argent pour fournir le traitement à l’instituteur pendant près d’une année.
Les églises du Canton de Revel : le livre de Marie Agnés Winter - l'Eglise de Couffinal
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