Société d’ Histoire de Revel Saint-Ferréol LES CAHIERS DE L’ HISTOIRE - 2000 - N°6 |
Extraits des Chroniques Par Jacques Rey |
PARU DANS DIFFERENTS CAHIERS DE L’ HISTOIRE
Qu'est-ce que le fonds Rodier? Le fonds Rodier se compose, entre autres, d'une douzaine de cahiers d'écolier retrouvés chez un libraire de livres anciens par Bernard Velay. Conscient de l'intérêt qu'ils présentaient pour l'histoire de Revel, Francis Pujol les fit acheter par la municipalité pour la somme de 10 000F et placer aux archives de notre cité.
Etaient-ils à ce point si intéressants au plan de l'histoire locale? Sans conteste on ne peut que répondre par l'affirmative. En effet, Antoine Rodier (1834-1905) coiffeur à Revel, rue de Castres (Aujourd'hui rue Victor Hugo) , fils de Noël Antoine Rodier (1808-1874), lui-même barbier à Revel, se découvrit une vocation de chroniqueur lorsque le 2 septembre 1888 un événement extraordinaire pour l'époque se produisit à Revel, événement que nous relaterons plus loin. Pratiquement tous les jours, à dater de ce fameux 2 septembre 1888, il va noter dans ces cahiers, pendant douze ans, tous les événements de la vie sociale, politique, religieuse et culturelle de Revel, nous fournissant une mine de renseignements de toutes sortes, des portraits féroces ou flatteurs de certaines personnalités revéloises et des récits de formidables tempêtes de vent d'autan ne figurant dans aucun livre d'histoire. C'est là tout l'intérêt de ce que l'on a baptisé un peu trop péjorativement « la petite histoire» et du fonds Rodier en particulier. .
Mais revenons à ce fameux 2 septembre 1888 et laissons la parole à Noël Rodier.
ANNEE 1888.
Le 2 septembre 1888 la ville de Revel a vu arriver dans ses murs, vers l'heure de midi, environ 2500 soldats se rendant aux grandes manoeuvres du 16ème corps d'armée et qui ont cantonné. Aussi nos rues, nos promenades, présentaient un aspect inaccoutumé et une animation extraordinaire. L'excellente musique du 143ème de ligne s'est fait entendre sur le boulevard de la République, en face le café Rivals tenu par Jacques Bastier, de cinq à six heures du soir et a réellement charmé notre population. La municipalité de notre ville, afin de favoriser les soldats à trouver le local qui était dévolu à chaque compagnie, a fait placer aux angles et coins de rues le nom de chacune d'elles. C'est la première fois qu'une plaque a été fixée. Pour la même circonstance et par le soin de Monsieur François Raissac, deuxième adjoint de notre ville, des lieux d'aisance ont été établis aux angles de nos boulevards et des artères principales de notre ville sur les ruisseaux couverts. Ces réduits, dits de nécessité, marqués avec écriteau indicateur ont été très utiles et ce sans grande dépense. Il a suffi en effet d'enlever dalles ou regards pour les établir sur les ruisseaux couverts de nos boulevards et rues. Quant aux hommes, ils ont été logés chez l'habitant, les officiers supérieurs dans des chambres et les soldats sur les galetas et granges où l'on avait placé du foin pour les coucher. J'ai mentionné que l'on avait placé des plaques indicatrices pour la désignation des rues et boulevards, à cette occasion je signalerai que les couverts qui étaient appelés par le public sous les noms de couvert haut, bas, de la volaille, des moines, ont été dénommés sous les noms de couvert du nord, du midi, du couchant et du levant. Le boulevard du faubourg Notre Daine par celui de boulevard Roquefort à cause du nouvel hospice. La rue de mon jardin par faubourg des Bourdettes : elle était connue sous la désignation de faubourg ou chemin du Carcassez ;la rue de l'Affacherie par rue du Temple. Ce qui donnait un effet tout particulier à notre localité, c'était les groupes de soldats préparant leur dîner au pied des murailles, où chauffait sur un feu bien pétillant une grande marmite. On distinguera pendant très longtemps, la marque noire aux murs des maisons, trace de leur passage et de cette installation...
... Le premier novembre, jour de la Toussaint cette année 1888, la matinée a été fraîche avec un épais brouillard. Le soleil s'est montré vers les 10 heures. La soirée a été superbe. Beaucoup de visiteurs au cimetière et contre toute habitude, cette année, il y avait le garde champêtre en costume sur la porte et à l'intérieur de ce lieu pour éviter tout désordre. C'est une bonne mesure que l'on aurait du pratiquer depuis longtemps. Les gendarmes en petite tenue (sic) faisaient aller et venir le long du chemin conduisant au cimetière. La sépulture des tombes des soeurs Clothilde et Marie, filles des Soeurs de St Vincent-de-Paul étaient littéralement couvertes de fleurs...
... Le 4 novembre est décédé dans la maison de son père, chemin de la gare, le nommé Jean Michel Pallu, âgé de 18 ans, des suites de sa maladie appelée péritonite inflammatoire. Ce jeune homme était très intelligent et avait un goût prononcé pour la sculpture. Il était l'élève de son père Léon Pallu qui avait été à La Havane où il avait ramassé un tout petit pécule. A l'âge de 14 ans, il avait sculpté sur bois le portrait de Jefferson Davis (Jefferson Davis était en réalité le président des Confédérés) , président de la République des Etats-Unis d'Amérique du Nord, lors de la guerre de Sécession. Ce portrait m'a été porté par l'avis de son père par ce jeune homme qui me l'a donné comme spécimen de son premier travail . Afin de l'encourager je lui ai fait un tout petit cadeau...
... Le dimanche 11 au soir a eu lieu la célébration de la fête de la St Martin célébrée tous les ans à cette époque par les anciens militaires réunis en société de secours. Ce sera probablement la dernière réjouissance qu'elle aura faite cette année par manque d'argent dans la caisse. Dans une réunion préparatoire tenue le dimanche auparavant par les sociétaires à la salle du collège, il fut décidé par les jeunes de cette société de célébrer la fête avec pompe et qu'il fallait achever les fonds renfermés dans la caisse. Aussi le dimanche soir à 9 heures, malgré un vent d'autan violent et un clair de lune superbe, la musique escortée des tambours et des jeunes gens portant des torches allumées ont parcouru les galeries en jouant et chantant La Marseillaiseet ont donné une sérénade à la mairie. Pendant que la musique jouait, des jeunes gens un peu en gaieté ont voulu faire partir le canon à la porte de Soréze. Un jeune homme de 18 ans, le nommé François Maurel, menuisier, habitant le faubourg des Bourdettes, porteur de l'havresac contenant la poudre pour les salves d'artillerie, s'étant un peu trop approché au moment de la détonation reçut une étincelle qui alluma cette poudre et enflamma ses vêtements avec une rapidité extraordinaire. Sans la présence d'esprit du sieur Vigouroux, débitant de vin et homme d'une certaine corpulence qui prit ce jeune homme avec grande précipitation par le corps et le jeta dans l'auge de la fontaine de la porte de Soréze, il eut été complètement carbonisé...
... Bien que le marché du samedi ler décembre ne fut pas été très fort(sic),cela n'a pas empêché la police et la gendarmerie de s'emparer de deux voleurs qui cherchaient à enlever l'argent d'un paysan qui avait vendu un veau au marché. Ces deux voleurs étaient convenablement bien mis et fort bien habillés, porteurs d'une sacoche qui devait leur servir pour le métier adopté par eux. Le vol actuellement qui se pratique à l'encontre des paysans est le vol à la sacoche. Ces deux filous ont été arrêtés au pech d'en Maffie, sur la route de Vaudreuille et ramenés à Revel. Ils avaient passés deux journées à l'hôtel Notre-Dame et étaient partis sans payer la dépense...
... Aujourd'hui 10 décembre, la matinée est relativement belle avec un peu de brouillard. Cependant le vent marin qui souffle sur la Montagne Noire le maintient dans la plaine. Dans l'après-midi, j'ai été à Soréze avec mon fils et ma belle-fille accompagner Mr Bailly, un de mes amis, antiquaire distingué de Paris, pour voir les belles tapisseries que possède dans le salon d'honneur la célèbre école de cette ville. Ces tapisseries au petit point d'Aubusson.
représentent les fables de La Fontaine. Elles sont anciennes et sont superbes surtout par leurencadrement. Mr Bailly a voulu les acheter et nous a chargés d'en offrir au père économe la somme de soixante mille francs les huit panneaux et les douze fauteuils. Le père économe arépondu que l'on avait proposé il y a quelque temps le prix de soixante dix mille francs et que l'on nous donnerait la préférence au prix de cent mille francs sur tout autre acheteur. Cette question doit être étudiée de très près... En arrivant le soir à Revel, j'ai appris que l'aumônier de l'hospice de Roquefort avait pris au collet le sieur Vassal, cantonnier urbain, pour des propos malsonnants tenus sur son compte dans un établissement public de notre ville et lui a demandé raison de ces paroles en le secouant publiquement très violemment. Vassal a nié avoir tenu ces propos et dit que la chose n'était nullement vraie. L'abbé Olive d'une force herculéenne a maintenu que ces propos avaient été tenus. Ce différent doit être soumis au juge de paix et le public revélois aura le spectacle des choses malhonnêtes discutées publiquement et l'on rira tout en ayant le droit d'en juger...
...Aujourd'hui 11 décembre 1888, la nouvelle s'est répandue en ville du départ dans la nuit de la troupe du Casino situé sur la promenade. Le directeur de cet établissement a fait de nombreuses victimes : plusieurs fournisseurs ont été trompés par lui, après avoir fait exploiter par des femmes la jeunesse soi-disant dorée de notre ville, il a exploité les marchands et tous ceux qui ont donné des provisions pour l'entretien de cette maison malfamée qui a été la ruine et la perte de beaucoup de familles. On a eu le soin de faire partir le piano quelques jours à l'avance afin de ne pas être surpris. Mais ce qu'il y a de plus curieux c'est que le nommé... (je fais grâce au lecteur des détails scabreux ou malhonnêtes qui suivent.) ...
...Le temps a été très chaud du 18 au jeudi 20 décembre. Ce jeudi, le vent d'autan a soufflé très violemment. C'est aussi ce jour qu'a eu lieu, à midi, au bassin de St-Ferréol en présence de nombreux invités et de Mr Morange, ingénieur en chef du Canal du Midi, l'écoulement total de l'eau par le soulèvement de la vanne. Les autorités locales de Revel avaient étéinvitées à cette fête. Il s'est fait une pêche très abondante de poissons surtout une très grande quantité de carpes toutes à peu près de la même dimension. On a évalué à 150 quintaux le poisson pris dans ce bassin après l'écoulement de l'eau par la voûte de vidange. Les batardeaux ont été détruits par la masse de ce poisson. Tout le monde en a apporté à Revel car il a été impossible à la gendarmerie de mettre de l'ordre parmi cette foule qui se disputait avec vivacité la prise de cette pêche. La femme Testut a failli être victime de son imprudence en avançant trop près de la pyramide : elle est restée engluée dans la vase et il a été fort difficile de la sortir de cet endroit dangereux où elle se trouvait prise et elle a servi de risée pendant longtemps aux curieux qui la voyaient se débattre...
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ANNEE 1889.
...Le premier janvier, jour de l'an, a eu lieu cette année 1889 un mardi. Le temps a été pluvieux tout le jour. Il n'y a pas eu de monde dans les rues, pas d'amusements pour la jeunesse. Il ne s'est fait aucune dépense. Tout le monde paraît triste en ville. Il y a même des ouvriers qui travaillent...
... Dimanche 20 janvier la neige n'a cessé de tomber toute la journée et le ciel a été toujours très couvert.
...Aujourd'hui lundi 21 janvier, anniversaire de la mort de Louis XVI, le temps est froid et très sombre. A six heures du soir, Lapeyre du sobriquet de Filou de Mamouth crie dans les rues de Revel la lettre du journal La Marseillaiserelatant la nomination regrettable du nouveau concierge de la Mairie de Revel par Monsieur Sarrat... ...
...Dans la nuit du 24 janvier, à deux heures du matin, un imbécile, sans nul doute, a parcouru les rues de Revel affublé d'un costume de peau de bête et agitant une clochette suspendue au cou et remuant ses bras pendants pour simuler un loup-garou. Je l'ai vu de ma fenêtre réveillé par le tintement de la clochette et par les aboiements des deux chiens qui sont enfermés dans
le corridor de notre maison. Il avait du temps de reste sans doute par le froid intense qu'il faisait cette nuit. Il gambadait fortement devant la porte, puis au bout d'un quart d'heure, après avoir fait plusieurs sauts et contorsions, il s'est retiré. Je n'aurais jamais cru qu'en plein dix-neuvième siècle et à l'époque où nous nous trouvons, il y eut des hommes assez bêtes etassez hallucinés pour jouer ce rôle et chercher à faire croire à des niaiseries pareilles.
...Aujourd'hui 25 janvier, à dix heures du matin, ont lieu les funérailles de Monsieur Noël ancien juge de paix. La cérémonie funèbre a été de première classe avec beaucoup de monde. Le clergé était en chapeau et dalmatique, le premier vicaire a fait la levée de corps, Monsieur Berdoulat, curé doyen, étant trop vieux. Il a été inhumé dans le caveau de son petit-fils qui est un des plus beau de notre cimetière. En ouvrant le caveau, on a trouvé la croix de sépulture qui était en bois de chêne et peinte en noir dont l'extrémité avait poussé des racines dans le ciment et des branches aux extrémités des bras et du sommet de la croix.Le samedi 26 janvier, jour de marché à Revel, il y a eu le tirage au sort. Il n'y avait que 104 jeunes gens au contingent...
... Aujourd'hui lundi 4 février, le temps est affreux, pluie continuelle, neige, vent, grêle, en un mot un temps épouvantable règne dans la région. Il y a peu de monde à la foire. Les >marchands sont consternés et les cabaretiers déplorent les avances qu'ils ont faites. Beaucoup de saltimbanques en face de la grande fontaine. Les rues sont transformées en vrai lac de boue. On ne peut pas sortir car on est éclaboussé par la fange ; la foire est complètement perdue...
...Ce dimanche 10 février, il y a eu à l'école laïque des garçons une séance de greffage de la vigne pour les nouveaux plants. J'apprends également par Monsieur Gasc, fabricien à l'église paroissiale, que l'on a décidé la construction des clochetons de l'église paroissiale et que la dépense à faire s'élèvera à quinze mille francs et c'est Monsieur le curé Berdoulat qui en supportera les frais. Cela se donnera en adjudication...
...Mercredi 20 février par le train de chemin de fer de onze heures du matin sont parties de la gare de Revel les magnifiques tentures d'Aubusson que possédait l'école de Soréze. Ces tapisseries des pastorales et les fables de La Fontaine d'après les cartons modèles de Boucher faisaient courir nombre d'étrangers pour les voir et visiter l'école. C'est une perte pour notre pays qui recevait beaucoup de voyageurs qui allaient à Soréze voir ces belles tentures qui décoraient le salon que l'on désignait sous le nom des Gobelins. L'administration de l'école qui les a vendues s'est bien trompée. Elle a porté un rude coup à l'établissement en vendant ces tentures qui étaient renommées dans toute l'Europe. C'est Monsieur Vail( de Paris qui les a achetées au prix de cent et quelques mille francs. Ces tapisseries étaient accompagnées de douze fauteuils et de deux canapés. Le tout a été emballé soigneusement par des ouvriers tapissiers de la maison Martin de Toulouse venus exprès sur les lieux et amenés par l'acquéreur. Monsieur Bailly notre ami voulait les acheter, mais n'était jamais arrivé au chiffre vendu, vu que comme marchand, il ne croyait ne pouvoir faire de bénéfice à ce prix élevé. Quelques tentures étaient très détériorées, surtout celles qui étaient appliquées au mur du côté du parc de l'école. Les fauteuils étant en partie usés et le bois en partie vermoulu. Ce sera des reliques, mais non des objets faciles à servir. Leur restauration coûtera fort cher. Monsieur Bailly a été avisé de la vente de ces meubles par une dépêche adressée à Paris. J'apprends à l'instant que ces tapisseries doivent être cédées à Monsieur de Rothschild, célèbre banquier à Paris et qu'elles doivent figurer, après réparations, à l'exposition universelle de 1889...
...C'est dans la journée de samedi 9 mars que l'on a appris en ville que deux hommes avaient arrêté à 9 heures et quart du soir sur le pont de la Mayre le nommé Tissenier, tailleur à Durfort, autrefois habitant Revel. Ces deux hommes lui ont volé 323 francs, argent qu'il venait de chercher d'un héritage à Lagardiole. Les deux voleurs qui s'étaient cachés sous le pont cherchèrent à l'étrangler, le volèrent et s'enfuirent sans avoir pu être reconnu parTissenier. Le sieur Fontès, dit Coucut, les vit passer en galopant. Tissenier a été mis àl'hospice malade et ayant encore l'empreinte des doigts des malfaiteurs sur le cou...
...Le mardi 19 mars, jour de St Joseph, temps très froid. C'est ce jour que Monsieur Berdoulat, curé doyen de notre ville a béni la maquette qui donnait le plan des tours qui domineront par une coupole la façade de notre église paroissiale qu'il a faite construire avec tant d'effort et de peine. Philippe Daydé, maçon et entrepreneur, assistait avec ses ouvriers à la bénédiction de ce plan et on a imploré pour les ouvriers qui doivent y travailler la protection et le secours de St Joseph pour éviter tout accident dans cette construction. Il y avait beaucoup de monde...
...Dans la nuit du vendredi 5 avril il y a eu un incendie, le plus extraordinaire qu'il y ait jamais eu à Revel. Les habitants de Revel ont été réveillés en sursaut par le son du tocsin et le bruit du tambour battant la générale. Le feu s'était déclaré dans la maison servant d'atelier aux frères Germain et Léon Solomiac menuisiers dans notre ville et dont l'atelier est situé à l'extrémité de la rue du Four. En un instant tout l'immeuble a été envahi par les flammes et toute la ville a été éclairée comme en plein jour. On distinguait d'un bout de la ville à l'autre les personnes qui circulaient en galopant pour porter secours, à tel point que l'on a pu lire unelettre manuscrite du portail de l'église tant cela éclairait notre ville. Tout a été détruit. Il n'estrien resté dans cet atelier. Il y a eu table rase. Les maisons adjacentes donnant sur le ruisseau mayral côté rue St Antoine (rue Marius Audouy) ont été bien endommagées, surtout celle habitée par l'abbé Olive aumonier de l'hospice Roquefort. On a attribué ce sinistre à la malveillance. Le bruit s'est répandu que l'incendie avait été allumé par un misérable du côtédu ruisseau. Il y avait vingt ouvriers qui se trouvent sans travail par l'effet de ce sinistre...
...Vendredi 3 mai, les tambours ont parcouru les rues de la ville, drapeau déployé, annonçant la fête du centenaire du 5 mai et son programme. Samedi 4, jour de marché, le temps a été splendide, un léger vent marin a soufflé pendant toute la journée et a cessé à la tombée de la nuit. Il a permis la manifestation qui a eu lieu en l'honneur du centenaire et qui a parcouru les rues de la ville, torches allumées et musique et tambour en tête. Il y a eu bal public sous la halle et l'on a chanté La Marseillaise. Les cloches de l'église ainsi que celles du beffroi ont sonné à toute volée pendant vingt-cinq minutes dès huit heures et demie de la nuit. Ensuite il y a eu des salves d'artillerie.
...Dimanche 5 mai, jour du centenaire, dès quatre heures du matin, les cloches de l'église et du beffroi ont de nouveau pendant vingt-cinq minutes annoncé le centenaire de 1789, c'est à dire l'Assemblée des Etats Généraux. Le canon a tonné longtemps, plusieurs maisons ont été pavoisées. La musique a parcouru les galeries à onze heures et demie. Le soir, à deux heures, mât de cocagne au faubourg de Castres en face le café du Ter( ?), propriétaire Monsieur Pierre Vaisse, ensuite course au sac place de la Patte d'Oie à quatre heures. C'est à ce moment là que la pluie a commencé de tomber, il a fait des éclairs et le tonnerre a grondé fort longtemps. Le bal a donc eu lieu sous la halle et après souper le ballon n'a pu partir. Il y a eu banquet à l'hôtel Notre-Dame au prix de 3 francs. Autres banquets chez Gay autrement dit chez la grande Counayre( ? ) au prix de 2 francs avec café et un repas chez Louis Delestaing au prix de 1F50 café compris à la porte de Vaure. Beaucoup d'ouvriers étaient réunis dans ces deux dernières auberges au lieu que le banquet de NotreDame ne comprenait que les employés de l'administration.
...Aujourd'hui, lundi 6 mai, ouverture de l'exposition à Paris. A la distribution du journal La Dépêche on a appris la nouvelle de l'attentat commis sur Monsieur Sadi Carnot, président de la République. Cette nouvelle n'a pas été fort commentée. Le public ne s'en est guère préoccupé...
...Samedi 11 mai, on a appris par des personnes de Couffinal la mort, en son château de Beauregard, de Monsieur Charles de David Beauregard le seul enfant mâle de cette famille dont le nom s'éteint par ce décès. Il avait 47 ans. Le même jour, on a enterré son oncle Monsieur de Perrin, propriétaire du château de Lasserre, situé juste en face l'allée qui conduit au château de Beauregard...
Jeudi 23, le vent d'autan a soufflé avec une violence extraordinaire, les arbres ont beaucoup souffert ainsi que les plantes des jardins potagers.
...Vendredi 24, le vent a continué de souffler avec violence jusqu'à minuit ; à cette heure, le vent persistait par rafales et l'on aurait dit par intervalles que c'était le roulis d'une voiture qui marchait à toute vitesse dans les rues de notre ville. Samedi, jour de marché à Revel,
date 25 mai, la pluie a commencé à tomber dès six heures du matin. Il n'y a pas de monde en ville à cause de la coïncidence de la foire à Puylaurens. Les veaux ont diminué, il ne se vendent que 18 sous le kilo.
...Dimanche 26 mai le temps a été beau le matin, vers midi un peu de pluie. Il y a eu conseil municipal pour la session de mai. La cloche du beffroi a appelé nos édiles à cette séance. C'est à ce moment que Monsieur Louis Gabolde a dit à Monsieur Paul Sarrat, maire, qui déclarait la session ouverte que l'on ne pouvait se réunir et délibérer parce que cette assemblée n'était pas légale et qu'il avait une lettre de son avoué qui lui transmettait que par délibération du Conseil d'Etat l'élection de Monsieur Auriol, propriétaire, était maintenue et que la nomination du maire et ses adjoints n'était pas légale, parce que ce membre n'avait pas été présent lors de la démission qu'on lui avait fait donner. Le maire a été stupéfait. Monsieur Arthur Taussac a prié Monsieur Louis Gabolde de donner connaissance de cette lettre purement officieuse. Malgré cela le conseil de la majorité républicaine n'a pas moins persisté à continuer de voter l'ensemble du budget. La nouvelle de cette missive s'est répandue en ville comme un éclair. Tout le monde en été stupéfait...
...Mardi 28 mai au matin, La Dépêche et Les Nouvelles annoncent le résultat de l'annulation des élections complémentaires du 17 juin 1888 et les élections du maire et des adjoints dans la séance du 24 juin. Cet événement tout à fait inattendu a fortement impressionné la population revéloise et les commentaires ont marché grand train ; les vieilles rancunes ont commencé à reparaître. Le père Gauzi dit Taïssou a apostrophé Monsieur Paul Sarrat sous les galeries en le rencontrant et lui a dit ces paroles:« Tu tabés Sarrat foutras lé camp de la coummuno !» Monsieur Sarrat l'a envoyé quérir par ordre du commissaire de police pour le réprimander... ...
...Aujourd'hui 10 juin, il fait frais. C'était autrefois la fête de la Pentecôte qui était celle de Revel, mais depuis près de cinquante ans les discordes politiques et religieuses ont complètement détruit ce souvenir et les jeunes gens ne parlent plus d'amusements, ni même à aller au pré de Vaure ou prat d'al bal comme on le désignait, ni même on n'observe pas la vieille habitude de ne pas travailler le lundi comme on le faisait encore il y a quelques années. Les ateliers sont ouverts et les travaux à Revel se font comme les autres jours Tout souvenir de l'ancienne fête est complètement effacé et le peu d'entente entre concitoyens n'a pas peu contribué à cela. Quelques personnes âgées seulement se rappellent les amusements de ce jour et regrettent cette fête qui pour eux était la vraie fête de Revel. Pourtant à deux heures du soir, le sieur Pierre Gauzi dit Guizot est allé au prat d'al bal avec un chariot attelé à un âne et a traversé la rue de Castres avec un drapeau tricolore afin de conserver à la jeunesse de Revel l'usage de cette promenade. Des jeunes gens s'y sont rendus à son exemple ainsi que les employés de la poterie de Monsieur Ducros route de Soréze...
Aujourd'hui 14 juin a été déposé par le sieur Perramond, serrurier, la signification à faire au nom du Conseil d'Etat siégeant à Paris à Monsieur Paul Sarrat, maire, à Monsieur Arthur Taussac, premier adjoint, à Monsieur François Raissac, deuxième adjoint, à ne plus faire aucun acte administratif...
...Mercredi 19 juin, temps très chaud. Cette journée du 19 juin restera mémorable à Revel. Elle aura été marquée par un crime. Vers les neuf heures du soir...
Eyraud ou la malle sanglante de Millery.
Août 1889. Une malle est découverte par un cantonnier entre Vernaison et Millery. Elle dégage une odeur atroce et renferme un corps humain décomposé. Quelques jours plus
tard, une autre malle tout aussi nauséabonde est découverte vers St Génis Laval. Ainsi commence l’affaire Gouffé qui passionna l’opinion publique.
Gouffé, huissier parisien, coureur de jupons, va être la victime de Michel Eyraud et de sa maîtresse Gabrielle Bompart qui ont décidé de le dévaliser. Attiré par Gabrielle, notre huissier va être étranglé par Eyraud. Mais le couple ne va pas réussir à ouvrir le coffre de la victime. Pour se débarrasser du corps, celui-ci est placé dans une malle et acheminé en train jusqu’à Lyon, puis jeté près de Millery. Le couple s’enfuit en Amérique. C’est le célèbre professeur Lacassagne qui réussit grâce à une brillante expertise à identifier le corps. Gabrielle rentre en France, niant toute participation au meurtre. Elle est cependant arrêtée. Elle accable Eyraud qui lui se cache à Cuba. La France entière se passionne pour l’enquête et le procès qui en découle. La perverse Gabrielle affirme même avoir été hypnotisée avant le crime. Eyraud est condamné à mort, sa maîtresse à vingt ans de travaux forcés. Elle sera libre huit ans plus tard.
L’hiver 1890-1891 a été l’un des plus froids du XIXème siècle avec vingt-sept jours sans dégel et une température moyenne de -1°4, égale à celle de 1845. Même notre fameux hiver de 1956 avec dix-sept jours sans dégel n’a pas été aussi rigoureux.
Comment les Revélois vont-ils faire face à une époque où le seul combustible est le bois et où les conditions de vie sont très difficiles ?
La reproduction ci-dessous, d’après une photographie de l’époque, illustre à merveille les propos d’Antoine Rodier.
La Marne au pont de Champigny (1891).
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ANNEE 1891
...Jeudi 1er janvier 1891 et jour de premier de l’an, cinq heures du matin, les tambours donnent une aubade aux conseillers municipaux. Le vent marin souffle avec une violence extraordinaire. J’ai placé le nouveau calendrier dans le magasin. Je n’ai pas eu de nombreux clients. Maurice Solomiac et Mademoiselle Cassan dont mon fils est le tuteur sont venus dîner. Nous avons mangé une dinde aux marrons. Il y a eu bal au casino sur la promenade. Paul Fonta a apporté un perdreau et cinq merles qu’il a gagnés au loto.
...Vendredi 2 janvier 1891. Je dois dire ceci que le 2 janvier à huit heures du matin, le sieur Jacques B…. , commis voyageur chez Monsieur Get Pippermint est venu au bureau de mon fils lui emprunter la somme de deux mille francs. Il était obligé le matin en rentrant à la fabrique de liqueurs de rendre compte du voyage et il avait malheureusement joué et perdu son argent au jeu à Albi. Mon fils a engagé la signature de son beau-père, le sieur Cucurou et celui-ci lui a remis une lettre de change de Madame veuve Guiraud du Falga. Mon fils a remis cet argent avec peine pour ne pas lui faire perdre sa fonction. Ce jeune freluquet est un misérable d’avoir joué l’avenir de ses enfants. Il ne méritait pas qu’on lui rende ce service.
...Samedi 3 janvier, la température est douce et le soleil radieux. Peu de monde au marché. Cependant à cause du temps, j’ai eu un peu plus de monde que d’habitude. Des oies grasses qui sentaient mauvais ont été saisies et procès-verbal dressé par le garde Valette. Tout le monde veut lire le journal La Dépêche à cause de la nouvelle de l’écroulement de deux maisons à Toulouse, place des Carmes. Deux victimes sont à signaler.
...Dimanche 4 janvier. Il y a eu théâtre au cercle catholique. Prix 50 centimes l’entrée pour ceux qui avaient des cartes. Pas d’incidents à noter pour la nuit.
...Mardi 6 janvier, jour des Rois, je souffre de douleurs atroces dans les jambes qui m’empêchent de rester étendu dans le lit et je n’ai pas de position stable. J’ai des tiraillements continus aux mollets. C’est affreux et très douloureux. Monsieur Roquelaure, huissier à Revel et locataire chez mon fils qui a fait une saisie de meubles à Fourrès ( ?), cafetier à St Félix, m’a donné une statue tombale qu’il avait mise en vente dimanche dernier. Il me l’a offerte. C’est une châtelaine du XVIème siècle. Elle est fort curieuse et c’est fâcheux qu’il lui manque la tête. Cette statue a été trouvée il y a environ quinze ans, à une grande profondeur dans la terre, en faisant des fouilles.
...Mercredi 7 janvier, température excessivement froide avec un vent du nord glacial et un temps très sec. Il a commencé de neiger dans la journée et vers midi les ouvriers ont été obligés de cesser les travaux à cause du froid excessif qu’il fait. Pas d’incidents à noter pour la nuit.
...Jeudi 8 janvier. Le froid est d’une violence inouïe (sic). Il fait un vent du nord si glacial qu’il vous empêche de respirer. Tous les ruisseaux sont gelés. La neige tombe fort et fine. Il est arrivé plusieurs accidents en ville à des personnes qui ont glissé. On parle de jambes cassées et de bras démis.
...Vendredi 9, temps froid et sec. Je suis allé à la Jalabertie où j’ai dîné chez le curé et je suis rentré vers trois heures.
Mardi 13 janvier, la température est toujours aussi froide. Il y a dans les rues quarante centimètres de neige devant les portes. On a publié de balayer les rues, de faire un tas de neige devant sa porte. Les charrettes ne circulent plus.
...Mercredi 14 au matin, verglas dans toutes les rues. On glisse beaucoup et on ne compte pas les chutes de personnes. La température est toujours aussi rigoureuse. Il neige encore avec un vent glacial.
...Jeudi 15 janvier. Température excessi-vement froide malgré le soleil. Tout le monde dit ne pas se rappeler un tel froid. En effet, un vent glacial souffle en tempête. J’ai fait placer une tête à la statue de St Félix. Elle lui va assez bien. Rien à noter pour la nuit.
...Samedi 17 janvier. Jour de marché et fête à Soual de St Antoine. Il a gelé à pierre fendre. Marché nul. Tous ceux qui viennent au magasin se plaignent de la température. On brûle dans les cheminées du bois en quantité. On a volé à Frède, jardinier aux Bourdettes, tous les choux et toutes les salades de son jardin.
...Dimanche 18 janvier au matin, j’ai trouvé la cuvette du magasin qui se trouve près de la cheminée du salon complètement gelée. On entend personne dans les rues pour aller à la messe. La cloche du Beffroi s’entend à peine, la répercussion du son étant arrêtée par la neige. Il y a toujours quarante centimètres de neige dans les rues. On craint l’effondrement de certaines toitures. Je souffre affreusement de ma sciatique.
Le bois de Boulogne en 1891.
...Lundi 19 janvier au matin. On ne peut plus ouvrir les portes des maisons à cause de l’amoncellement de la neige. Il fait un froid excessif. On constate – 18°au-dessous de zéro. Une équipe de 151 hommes de toutes conditions de métier, munis de pelles et de pioches s’essaye à déblayer les rues. Le maire a fait publier que l’on occupe tout le monde de huit heures à quatre heures du soir moyennant 1F25 de l’heure. Dans les maisons, on se gèle. Le vin gèle aussi dans les barriques. Plusieurs spiritueux sont pris dans les récipients qui les renferment et le verre éclate.
Les oiseaux sont trouvés morts devant les portes et les fenêtres des maisons. Les petits pigeons meurent de froid dans leurs colombiers ; c’est désolant. Une
misère affreuse règne en ville. Beaucoup de ménages ont épuisé le bois de chauffage. Le vent du nord souffle si vif et si froid que l’on dirait qu’il vous brûle le visage.
...Mardi 20 janvier. Il a neigé le matin. Vers midi le soleil s’est montré pour la forme.
Le bureau de bienfaisance assemblé aujourd’hui a décidé de distribuer des dons en nature, c'est-à-dire pas d’argent mais du pain, du bois, de la viande. On prétend que cet hiver est encore plus fort que celui de 1829.
...Mercredi 21 janvier au matin, sept heures, on dirait que la température veut s’adoucir. A huit heures, la pluie a commencé de tomber et le vent de souffler. Le dégel arrive et l’on se trouve tout surpris d’une pareille transition si subite. La neige fond dans les rues et il fait presque une température tiède. C’est surprenant.
...Vendredi 23 janvier. Temps pluvieux. Dès le jour on annonce en ville la mort foudroyante, cette nuit, du cantonnier urbain, Paul Vassal. Cette mort a surpris tout le monde. J’ai fait mettre par Marty une croix de bois.
...Samedi 24 janvier. Température douce. C’est jour de marché. Il y a un peu plus de monde que d’ordinaire à cause des nombreux marchés qui avaient été annulés. Le vent marin souffle. A noter beaucoup d’humidité dans toutes les maisons à cause du dégel. Pas d’incident à noter pour la nuit.
...Dimanche 25 janvier. Ce matin, brouillard et temps humide au cours de la journée. C’est la fête de Gandels. Les jeunes de la classe 1890 ont été invités par le tambour à se rendre au café National, place de la Mission.
...Lundi 26 janvier. Température douce. Je souffre de ma douleur sciatique à la jambe droite et cette douleur est insupportable. J’ai pris un bain à la vapeur avec l’appareil de l’hospice Roquefort. Il m’a été administré par Urbain Valderran ( ?) auquel je donne 50c d’étrennes par bain. La soeur supérieure sœur Louise avait oublié de m’envoyer l’appareil à l’heure convenue. La journée a été belle mais mes souffrances atroces.
...Mardi 27 janvier. La température est douce et il fait un beau soleil. J’ai pris un nouveau bain à la vapeur et il me semble qu’il me dégage un peu la jointure des nerfs des jambes. Je souffre cruellement. Mon fils a eu la visite d’un marchand d’antiquités et d’objets de faïences anciennes. Je n’ai pas eu le plaisir de voir ces objets parce que j’étais au lit à la suite du bain. J’aurais aimé voir pourtant ces objets qui semble-t-il étaient fort curieux. Je n’ai pas eu cette chance.
...Vendredi 30 janvier. Je souffre de mes douleurs aux jambes. J’ai pris un autre bain à la vapeur ce matin. Monsieur le docteur Lagarrigue prétend qu’ils ne font rien de bon et que le seul remède à appliquer est les pointes de feu. Nous verrons lundi prochain.
...Samedi 31 janvier, jour de marché à Revel, température douce avec un léger vent marin. On présume qu’il n’y aura pas de monde à ce marché à cause de la foire de mardi prochain. C’est aujourd’hui jour de tirage au sort pour le canton de Revel. Cela aura lieu à neuf heures et demie.
« La loi Freycinet du 15 juillet 1889 réduisait le service militaire à trois ans avec des dérogations pour les dispensés, les exemptés et les tirés au sort qui eux n’effectuaient qu’un an. En contrepartie, ceux-ci devaient payer une taxe militaire pour compenser leur régime de faveur. Environ un tiers de chaque classe d’âge faisait un an de service ».
Le sous-préfet de Villefranche doit arriver par le train de Toulouse. Les jeunes gens qui sont appelés à subir le tirage au sort sont tous malingres et chétifs, en mot peu de chose comme corpulence. Il y en cinq sur le nombre qui seraient passables, mais ils sont exemptés à cause d’infirmités apparentes comme manque de doigt à la main droite. Parmi ceux-ci le sieur Jean Thomas dit Verdure ( ?) et Molinier Jean, fils du Balent, qui est bel homme et docteur et ainsi de suite. On dirait que c’est fait exprès. La journée a été bruyante et tambourinante à cause du sort. Les jeunes gens sont allés en voiture à Soréze se promener. Ils étaient tous de Revel. Quant à ceux du reste du canton et de la campagne, la plupart étaient saouls et poussaient des cris à faire peur dans les rues de la ville. Ils n’ont chanté rien de suivi. Je constate que cette classe est vraiment peu digne d’intérêt. Pas d’incidents à noter pour la nuit qui du reste est fort belle…
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Février, mars 1891.
Après un mois de janvier extrêmement froid et pénible pour la population, Revel va retrouver un peu plus de chaleur mais aussi ses premières et habituelles tempêtes de vent d’autan. La vie se poursuit au rythme des fêtes religieuses, des soucis quotidiens, des faits divers et des disparitions brutales.
...Dimanche 1 er février, quatre heures du matin. Le temps est clair, le ciel superbe, il fait un léger vent marin qui est même chaud. Vers sept heures, le temps a subitement changé, il a plu un peu et le vent a tourné.
Quelques jeunes garçons masqués se sont montrés cette après-midi dans les rues de notre ville. Pour la première fois de cette année, on voit que cet usage de se masquer tombe en déconfiture et que ce ne sont plus que des gamins qui se déguisent, suivis par d’autres gamins et je crois même que c’est une espèce de réclame faite en ville par le sieur Pradès, propriétaire du bal du casino, pour attirer des clients dans son établissement.
Le casino et les Allées de Revel
On a enterré ce matin la veuve Malaterre Victoire dite la Poulette ( ?). C’était une connaissance de mon père. Elle était âgée de soixante-quinze ans. C’est ce soir que se tient une réunion au café Bonnet ( ?) sous les arcades dans le but de créer un cercle dit du sport. Monsieur Loup Eugène, président et mon fils ont été désignés pour acheter à Toulouse le mobilier pour meubler la salle de ce cercle.
Il a plu à torrents vers neuf heures du soir.
...Lundi 2 février, temps sombre toute la journée. Il commence à arriver des étrangers pour la foire de demain. La cérémonie religieuse de la fête de la Purification a lieu à la paroisse à sept heures du matin pour la messe et à six heures du soir pour les vêpres.
... Mardi 3 février au matin. C’est aujourd’hui St Blaise, jour de foire à Revel. Le proverbe qui dit : « Per San Blaiso y a de neou dusco à la cougo dé l’azo » (l’écriture standard de l’occitan n’existait pas à l’époque). s’est révélé faux. Beaucoup de monde à cette foire : des jeunes gens tirés au sort avec leur numéro sur la tête, des saltimbanques, des femmes lucides (des voyantes, je suppose) et des lutteurs. Il s’est fait des affaires pour les bestiaux qui ont été d’un prix élevé. J’ai acheté à un marchand de ferraille qui se place devant la porte de mon voisin, une cassole en fer très solide et en bon état et un heurtoir. Ces deux objets sont anciens. L’employé de mon fils, Paul Fontès, a fait arrêter par la gendarmerie un voleur qui fouillait les poches d’un vieillard de soixante-quinze ans. Il lui avait déjà enlevé le porte-monnaie. Il a parfaitement bien fait de le dénoncer.
... Mercredi 4 au matin. Le vendeur de La Dépêche crie de très bonne heure la nouvelle de l’exécution de Eyraud à Paris. Beaucoup de gens ont acheté ce journal par curiosité pour connaître les détails de cette exécution.
...Jeudi 5 février. Temps froid, ma tante Marthe est venue chez mon fils pour y passer la journée et y dîner avec sa belle-mère qui est venue de La Jalabertie pour fêter le Jeudi Gras. André Serres, le métayer de Lescout, est arrivé à l’heure de midi pour dîner. Il m’a apporté en cadeau de la saucisse et du petit salé de la truie qu’il a tuée. On a fait des oreillettes pour la première fois en cette période de carnaval ; elles ont été délicieuses.
...Vendredi 6 au matin. Je souffre atrocement de la douleur sciatique. Monsieur le docteur Lagarrigue m’a administré des pointes de feu à la jambe, nous verrons si cela me fera du bien.
... Samedi 7, jour de marché, température très froide car il a fortement gelé. Il y a un peu de monde au marché. Il ne s’est pas traité d’affaires mis à part les cochons gras, fort chers au demeurant. Il y en avait très peu au foirail de la place de la Mission.
...Dimanche 8 février, température très froide et temps sombre toute la journée. C’est aujourd’hui le dimanche Gras, quelques jeunes gens masqués se promènent dans les rues avec un tambour et jouent de la trompette, c’est de la saleté comme costumes (sic). On a enterré ce matin à dix heures Madame veuve Hélène Izar dite la Lénotte ( ?), mère de Paul Izar , suppléant du juge de paix de Revel. Elle avait quatre-vingt neuf ans et un mois, elle est morte avec toutes ses facultés et était fort intelligente malgré son âge. Beaucoup de monde à son enterrement.
...Lundi 9 février, temps froid et sec. Il a neigé à l’aube mais le soleil se montre dans la matinée, illustrant le proverbe ancien : la neou de fébrié tent coumo l’aïgo dins un panié. Quelques jeunes gens masqués mais moins sales que dimanche se sont montrés dans les rues. Ce soir il y aura bal au casino.
... Mardi 10 février et jour de carnaval, temps très beau et sec, soleil très brillant, beaucoup de promeneurs sur le boulevard et la promenade. A une heure du soir, le break de l’hôtel de la Lune, attelé à quatre chevaux, est allé à Soréze en emportant des jeunes gens masqués escortés de six cavaliers en costume de mousquetaire. A trois heures du soir, ils sont rentrés à Revel où le fils Molinier François a débité sur la place publique un long discours de circonstance ; il a fait le charlatan. La musique joue de temps en temps et fort bien. Beaucoup de curieux sont là pour l’entendre déclamer. D’autres masqués dansent au son de la musique. Cela a régalé les curieux. A huit heures du soir, retraite aux flambeaux avec musique et tambours a parcouru les rues de la ville pour appeler les jeunes gens et les jeunes filles au bal. Beaucoup de monde suivait cette retraite. Les dames de la poste, Madame Gui et Mademoiselle Julia, étant venues souper à sept heures du soir, Mademoiselle Julia a été subitement indisposée ; elles se sont retirées immédiatement après le potage sans pouvoir rester davantage. Le souper a été dérangé et raté comme l’on dit. A minuit, des jeunes gens ont parcouru la ville en chantant l’air de circonstance : adiou paouré Carnaval, tu ten vas y yeou démoro per mantjar la soupo al oli amb d’aïgo y de pa.
...Mercredi 11 février, jour des Cendres, temps frais mais soleil brillant. La messe des Cendres a eu lieu à sept heures du matin. Mon fils s’en va à Toulouse avec Monsieur Loup pour acheter le mobilier du cercle des sports. Beaucoup de gens de Revel se rendent à la foire de Puylaurens. Quelques jeunes gens masqués ont parcouru les rues, abrités sous une tente, barbouillés de noir, simulant la vente d’esclaves. Le cortège était annoncé par un tambour.
...Jeudi 12 février au matin. La température est douce. L’après-midi, des jeunes gens encore masqués ont parcouru les rues tirant une charrette à bras sur laquelle il y avait quelques masques. Pas d’incidents à noter pour la nuit.
...Vendredi 13 février au matin. La température est douce mais il a plu toute la journée. Le fils Jardin m’a décoré un vase ancien pour le salon de mon fils. Jonas Ulmo m’a apporté plusieurs objets curieux entre autres une canne en verre creuse.
...Samedi 14 février au matin, jour de marché. La température est froide mais avec un soleil brillant. Beaucoup de monde, surtout au champ de foire. Le blé a augmenté, il vaut 21 francs l’hectolitre. Beaucoup de monde également dans les rues de la ville.
...Dimanche 15 février, premier dimanche du Carême. Les sermons sont prêchés par un jésuite. Il y a conseil à la mairie à deux heures du soir. Réunion aussi du cercle du sport pour désigner le responsable de ce cercle. Par vote a été désigné le sieur Cabanac, maçon. Il entrera en fonction de suite. Le loyer de la maison Sarrat commence dès aujourd’hui. Le mobilier de ce cercle est déjà installé dans ce local. Pas d’incident à noter pour la nuit.
...Lundi 16 février. A huit heures du matin, mon fils a reçu une dépêche annonçant à ma belle fille la mort de son parent de Viviers, Urbain Carles, décédé la veille. Cette mort nous a fait beaucoup de peine. J’ai eu la visite de l’abbé Bascau qui est resté quelque temps avec moi à causer avant le souper. Monsieur Roquelaure notre locataire s’est joint à nous et est resté jusque vers sept heures. Je suis rentré chez mon fils à cette heure là pour le souper. J’étais déjà dans le salon à manger lorsque mon fils vint m’annoncer que j’avais le feu chez moi. Il s’agissait seulement d’un feu de cheminée mis par Monsieur Roquelaure à sa cheminée dite cuisinière. Le feu a été éteint par le sieur Fontès Jean, père, avec le concours de ses fils.
... Mardi 17 février au matin, température très froide. Mon fils, ma belle fille, mon épouse et la mère de ma belle fille sont partis, à sept heures du matin, par une voiture attelée de deux chevaux pour Viviers. La fille de service ayant apporté un chauffe pied, j’ai bien recommandé de faire attention de ne pas mettre le feu à la paille qui se trouve à l’intérieur de cette voiture. Je me suis installé au bureau afin de surveiller et contrôler les affaires et les entrées et sorties des gens qui se présentent. Mon fils a promis d’être rentré vers les cinq heures du soir.
...Jeudi 19 février. J’ai profité du beau temps pour aller à la Jalabertie, chez le curé. J’ai eu la chance de rencontrer en route le sieur Mortagne( ?), boulanger, qui m’a pris sur sa voiture. Monsieur Bouisset, ami de mon fils et ancien professeur au collège de Revel a soupé le soir à la maison et il est reparti pour Castres par le train de neuf heures du soir.
...Vendredi 20 février. La température est douce et le soleil brillant. Il fait une journée superbe. Il y a du poisson et des coquilles à la place mais le tout chèrement vendu. Le sieur Jardin( ?), plâtrier m’a apporté quelques papiers fort intéressants sur la convention nationale ; ces papiers se trouvaient sur un galetas d’une ancienne maison. Ils sont fort intéressants pour notre localité. Je les classerai. Parmi eux se trouve une description sur les évènements de 1799 à Revel à la suite de l’entrée au ministère de Monsieur Necker.
...Dimanche 23 février. Le vent marin souffle très fort. Il y a un peu plus de monde que d’habitude à l’église à cause du sermon donné par le prédicateur jésuite. Je suis allé me promener sur le soir. Depuis longtemps, je n’étais pas sorti à cause de ma jambe malade. Paul Fontès m’a accompagné.
...Lundi 23 février au matin. Le journal le Lauragais annonce que le sieur Roques dit Broucant a été condamné par le tribunal de Villefranche à trois amendes de seize francs chacune pour fraude sur les allumettes, cartes à jouer et tabac. A midi précise, un feu de cheminée s’est déclaré à ma maison sise rue de Soréze et occupée par le sieur Jacques Viguier, serrurier. Il a été immédiatement éteint par Jean Fontès. Les canons de trois cheminées contiguës ont été démolis.
...Jeudi 26 février au matin. Le vent marin souffle avec une violence inouїe et il est très froid. Fontès m’a donné une grande affiche sur la répartition foncière et mobilière de 1791 fort longue et curieuse par sa grandeur. Aujourd’hui, il y a à l’église paroissiale la clôture d’une retraite donnée par le prédicateur du carême aux enfants des deux sexes réunis. A deux heures du soir ces mêmes enfants se sont réunis sous les galeries avec leurs maîtres, les frères, les sœurs et les dames de la croix. Les instituteurs portaient chacun sur les bras ou à la main une couronne de fleurs ou une branche de fleurs de roses artificielles, se sont placés en file l’un à la suite de l’autre et ont formé un cortège un cortège curieux et pittoresque pour se rendre à l’église en chantant les commandements de Dieu et de l’église. Les cloches sonnent à toute volée, même le bourdon. Ils ont fait le tour des galeries, les prêtres organisant le cortège. Ils se sont dirigés vers l’église en passant par la rue de Dreuilhe et de l’Etoile en chantant, bannières, croix et oriflammes déployés malgré le vent qui soufflait en tempête… Le prédicateur est monté en chaire et s’est adressé à ces enfants en leur faisant un tout petit sermon sur leurs devoirs envers leurs pères et mères. Ce petit discours a paru fort les intéresser car rempli d’exemples à leur portée, après quoi on a organisé une nouvelle procession à travers toute la ville.
... Vendredi 27 février. Le vent souffle toujours d’une manière extrême. On a apporté à mon fils une lettre de convocation pour dimanche, jour de l’inauguration à huit heures du soir du nouveau cercle du sport, établi à Revel, couvert haut. Nuit sans incident.
Cent douze ans après, ce graphique confirme parfaitement les observations d’Antoine Rodier en ce qui concerne le vent d’autan.
...Samedi 28 février. Le métayer de Lescout a vendu un veau à un boucher de Castelnaudary au prix de 110 francs. J’en ai pris la moitié. Le marché a été plus suivi que le précédent. Le vent marin s’est calmé au cours de la journée.
...Dimanche 1er mars. Paul Fontès, employé à la banque, a cessé de prendre sa nourriture à la maison à dater d’aujourd’hui. J’ai remis à son père Jean Fontès notre maçon la somme de 17 francs pour paiement d’une note par lui remise à la suite des réparations faites à la maison de la rue de Soréze, à cause de l’incendie de lundi dernier. Je l’ai payé malgré l’observation faite par mon fils de ne pas le faire. Je l’ai fait pour lui être agréable car je sais qu’il est gêné dans sa caisse à cause de deux procès qu’il doit affronter. Baillon, épicier, m’a insulté en passant au coin de la rue sans rime ni raison. Je saurais tôt ou tard le lui faire payer. Lors de l’inauguration du cercle du sport, mon fils a pris pour trois sous d’abonnement à des journaux dont l’Echo de Paris.
...Mardi 3 mars. Le crieur public annonce l’arrivée en ville de très beaux choux fleurs, de beaux choux et de salades. Hélas après le temps froid et les gelées rigoureuses qu’il a fait, ils sont très chers.
...Mercredi 4 mars au matin. Température extrêmement froide, il fait un vent glacial. Monsieur Izar, suppléant du juge de paix, a invité mon fils à dîner en compagnie de Monsieur Catala, ancien instituteur, et d’un moine étranger. A quatre heures du soir a eu lieu l’enterrement d’une petite fille de 17 mois, fille de Monsieur Laplagne, receveur de l’enregistrement. Beaucoup de monde à cette sépulture.
...Mardi 10 mars. A dix heures du matin ont eu lieu les funérailles de Mademoiselle Julia Roques, institutrice à l’école communale des filles de Revel. Elle est décédée dimanche soir à quatre heures des suite d’une maladie de poitrine à l’âge de vingt ans. De superbes couronnes ont été offertes par le corps enseignant communal. Tous les instituteurs et institutrices du canton se sont rendus à cette sépulture. La gendarmerie, les gardes et tous les employés de l’administration civile y ont assisté. La cérémonie s’est terminée à midi. Monsieur Bigné ( ?), instituteur qui a prononcé le discours sur la tombe m’a dit aujourd’hui que le fossoyeur Roger avait voulu s’emparer du discours écrit qui avait été jeté dans la fosse et que le fontainier Redon avait eu toutes les peines du monde à l’empêcher de le prendre. L’adjoint au maire Monsieur Taussac l’a réprimandé pour cette incartade qui on croit avait été commandé par quelqu’un qui voulait s’en emparer.
...Vendredi 13 mars. Le vent marin souffle avec impétuosité. C’est aujourd’hui qu’a lieu la messe anniversaire de Monsieur Roquefort, célébrée à l’hospice, à huit heures du matin. On a procédé ensuite à une distribution de pain aux indigents.
...Dimanche 15 mars. Sept heures du matin. On vient d’annoncer la mort subite de Monsieur Amédée D… dans sa maison sur la grande allée. Il avait 77 ans et vivait maritalement avec une jeune fille de 27 ans. Cet homme était très irascible et tout le monde s’accorde à dire que c’était une grosse canaille. L’on ne se trompe pas. J’ai pu le juger moi-même ; c’était aussi un voleur. Sous les airs de quelqu’un du grand monde il a fait beaucoup de dupes. C’était le fils de Jean-Marie D… ancien notaire, rue de Castres avec lequel il était brouillé depuis sa jeunesse des suites de rivalités de maîtresses. Il avait pour fille de service une nommée Mariette P…, née à Roumens. Cette fille préféra pour amant le fils au père, c’était naturel et voilà le commencement de la haine de l’un pour l’autre. Malgré cela, cette Mariette est restée en service chez le père et au décès de celui-ci, elle est allée habiter chez le fils où elle est morte des suites d’une attaque, léguant à son amant de cœur, l’ignoble Amédée D…toutes ses économies et son mobilier au détriment de son neveu et de sa soeur de St Julia…
...Lundi 16 mars au matin, temps frais. Cette après-midi, je suis allé du côté du padouvencNotre-Dame. J’ai vu que l’on a creusé lesfondements pour la clôture du champ à ajouter au cimetière. Ce qui m’a surpris le plus, c’est que l’on veuille aussi agrandir le cimetière protestant dont le nombre de cette secte tend à diminuer, c’est une anomalie sans exemple.
On voit que nous avons un maire protestant qui n’hésite jamais à favoriser les siens. Le public commente beaucoup cette mesure de sa part qu’il reconnait de toute inutilité. La soirée s’est terminée belle et sans incident pour la nuit.
...Mardi 17 mars au matin, la température est douce et le temps beau. La fille de service, Anna Vignes, a fait une faute ce matin : elle a remis à Rose Baillon le fumier de nettoyage du local des poules, elle aurait pu le garder pour notre jardin et ne pas se permettre de disposer de quelque chose qui nous aurait été utile et surtout de l’offrir à une personne qui dans toutes les circonstances cherche à nous nuire. Je la préviendrai avec raison pour qu’elle n’y revienne pas une autre fois. Monsieur l’abbé Olive, aumônier de l’hospice Roquefort, m’a fait cadeau de deux autographes du père Lacordaire.
Je les ai placés sous carton pour les conserver. C’est un bien joli cadeau. Chazotte, luthier, m’a remis trois petites gravures un peu lestes mais d’une finesse extrême. C’est une attention d’un ancien camarade de jeunesse. Il désire que je les place dans la salle de la bibliothèque.
Funérailles du prince Napoléon
J'ai eu la visite d’Ulmo Jonas antiquaire. Il m’a apporté deux têtes d’anges qui étaient à l’église de Portet près de Toulouse, plus un heurtoir de porte cochère de Fourquevaux, une navette en cuivre jaune argenté de Verfeil, trois médailles en plomb d’empereur romain de Toulouse, un cadre avec le portrait de Louis XVI et de sa famille où est écrit le testament de ce roi.
Je lui ai échangé un vieux fauteuil contre un prie-Dieu Louis XV en noyer. Ulmo Jonas, une fois l’échange fait, a prétendu être trompé et y être de perte. Je lui ai acheté au prix de un franc une tête de femme en prière apportée de Caraman.
Le prince Napoleon
Napoléon Joseph Charles Paul Bonaparte puis Napoléon V, prince français en application du statut de la famille impériale adopté par Napoléon III (né à Trieste le 9septembre 1822, mort à Rome 17 mars 1891), créé comte de Moncalieri par le roi d'Italie à titre personnel. Il était connu comme « le prince Napoléon ». Il signait Napoléon (Jérôme) et était familièrement désigné « Plon-Plon ».
...Mercredi 18 mars au matin, le vent marin souffle avec force. Le journal La Dépêche annonce la mort du prince Napoléon à Rome.
Monsieur l’abbé Olive m’a offert le plaidoyer de Marc-Antoine Durand, ancien notaire à Revel et condamné à mort par le Directoire à Toulouse. Cette pièce manuscrite est très curieuse pour les archives de Revel. Elle est écrite de sa propre main et signée. Marc-Antoine Durand était le rédacteur du Journal des Campagnes imprimé à Revel et dont il n’a paru que quarante-quatre numéros. Ce journal était hebdomadaire. Vers deux heures et demie du soir, un violent orage a éclaté avec grêle et pluie torrentielle.
...Samedi 21 mars, jour de marché. Vent froid et glacial. Le marché a été faible avec peu de monde. C’est aujourd’hui le concours pour les taureaux. On a promené aussi par les rues de la ville quinze bœufs gras pour être tués et vendus pour la fête de Pâques. Cette année, ils étaient en général de couleur marron de race limousine. Ceux de Molinier, au nombre de cinq, étaient les plus gros. Henri Molinier dit Pacho qui habite rue de Dreuilhe s’est distingué plus que les autres en ouvrant la marche de ses animaux par une calèche où il y avait des musiciens qui jouaient. Chaque boucher avait son tambour qui battait la caisse.
Un troupeau de beaux moutons suivait le cortège.
Il appartenait à Molinier François, boucher rue de Soréze.
...Dimanche 22 mars, jour des Rameaux ou Pâques fleuries, température excessivement froide, on se croirait revenu au mois de janvier. Il tombe par moment de la neige et du grésil. Pendant la procession du matin la neige est un peu plus grosse. Pas d’incident à noter pour la nuit.
...Lundi 23 mars au matin. Un vent glacial souffle et il fait toujours excessivement froid. De temps en temps, des flocons de neige tombent, ainsi tout le monde ne cesse de répéter le vieux proverbe qui dit que : Qué per Carnaval sé souleilho, per Pascos cramo la leigno. La nuit s’est passée sans incident. Mon fils est arrivé de Toulouse par le train de six heures et demie. Il a apporté la statue en plâtre de David, œuvre de Mercié, sculpteur toulousain qui habite Paris. Cette statue est un chef-d’œuvre, elle n’est reproduite en bronze que par Barbedienne et ne peut être vendue que par lui.
"Avec la guerre de 1870 et la défaite du pays, la société française est gagnée par un sentiment d'humiliation et le désir de revanche. Un tel état d'esprit fait voir dans ce David la promesse d'une France qui un jour terrassera, malgré sa faiblesse, le Goliath prussien, à l'image du jeune berger d'Israël qui, avec la seule aide de sa fronde, abattit le géant ennemi. "
Aussi la sculpture a-t-elle immédiatement un immense succès : le plâtre exécuté à Rome, où le jeune artiste finit sa formation, lui vaut la Légion d'honneur, et est commandé en bronze par l'Etat en 1872, puis placé au musée du Luxembourg - le musée des artistes vivants - dès 1874. Il devient l'une des images les plus diffusées dans les journaux illustrés, et connaît un tel engouement qu'il est édité en petite taille, et en six dimensions différentes par le fondeur Barbedienne.
Malgré ses dimensions, il a pu avoir un modèle qu’il désirait depuis longtemps et j’avoue sincèrement qu’il faut avoir l’amour de l’art pour transporter sur les bras cette statue si fragile. Elle est arrivée à bon port et il y a de quoi être satisfait. Placée sur la colonne qui lui sert de socle, elle orne maintenant fort bien le bureau de la banque
...Mercredi 25 mars. J’ai eu la visite de l’abbé Alibert de Couffinal qui m’a chargé de lui acheter un prie-Dieu Louis XIV chez Monsieur Dufaure ( ?) au prix de quinze francs. J’ai été appelé par le conseil de cet orphelin pour inventorier les meubles laissés au décès de sa mère. Il y a quelques faïences de Varages.
Etienne Armand ouvre le premier atelier : la fabrique du Pont, en 1695, après plus de trois ans d’apprentissage à Marseille où il a appris les secrets de la décoration sur faïence. La chance a voulu que deux remarquables plats signés et datés (1697 et 1698) de sa fabrication soient parvenus jusqu’à nous. Dans le style de l’époque, ils sont réalisés en camaïeu bleu sur fond blanc.
...Jeudi 26 mars. A huit heures du matin a lieu l’enterrement de la fille Soucalle ( ?) décédée à sa maison, couvert bas, à l’âge de 80 ans. Elle a fait héritière sa nièce mariée avec un Vilotte. Mon fils a des lettres hypothécaires sur un bien pour douze mille francs consentis par la défunte. La cérémonie du jeudi saint a lieu à neuf heures. Les cloches sont parties comme on le dit vulgairement à grandes volées à neuf heures et demie du matin. Leur absence s’est fait remarquer à midi par la suppression de l’angélus. A trois heures, office du soir à la paroisse par l’annonce de la crécelle dite en patois rigue rague tournée à grands renforts de tours par une suite de gamins se remplaçant avec plaisir dans cette fonction en se promenant dans les rues de la ville. J’ai acheté aujourd’hui à la vente René Dufaure, rue Notre- Dame, environ trois cents volumes ou brochures au prix de six francs. Ce n’est vraiment pas cher. J’ai également acheté un tableau peint à l’huile représentant l’annonciation de la Vierge au prix de deux francs avec son cadre doré. Dans la paperasse, il s’est trouvé une lettre de Vidoc adressée au père Dufaure que je conserverai. Mon fils a acheté quatre assiettes anciennes de Varages vertes et un réveil, le tout pour treize francs. Il y avait par-dessus le marché un plat à barbe Louis XIV, mais fendu.
...Vendredi 27 mars au matin, température douce. Il y a des coquilles et de la petite sardine fraîche. Les provisions ne sont pas fortes malgré le maigre du vendredi saint (sic). En revanche les choux-fleurs se vendent un franc pièce. Ce soir, on pourra faire la visite des étals des bouchers et admirer les décorations de leur viande à l’intérieur de leurs boutiques.
Etienne Armand ouvre le premier atelier : la fabrique du Pont, en 1695, après plus de trois ans d’apprentissage à Marseille où il a appris les secrets de la décoration sur faïence. La chance a voulu que deux remarquables plats signés et datés (1697 et 1698) de sa fabrication soient parvenus jusqu’à nous. Dans le style de l’époque, ils sont réalisés en camaïeu bleu sur fond blanc.
...Samedi 28 mars, jour de marché, il a plu presque toute la journée. Malgré le peu de monde qu’il y a eu au marché, la viande de boucherie s’est presque toute totalement vendue à des prix très élevés. Le travail du magasin a été un peu plus fort que d’habitude.
Les clients sont venus se faire raser dans la soirée à cause de la solennité de demain. Je n’en ai pas été fâché.
Je ne dois pas omettre que les cloches, comme ne manquent pas de le dire les enfants, sont arrivées en ville à onze heures du matin et qu’elles ont sonné à toute volée, même celle du beffroi.
D’après quelques grognards (sic), c’était inutile pour celle-là. Pas d’incident à noter pour la nuit.
...Dimanche 29 mars au matin. Matinée superbe. C’est aujourd’hui le jour de Pâques, la fête la plus remarquable de la chrétienté, la solennité des solennités. Dès cinq heures et demie du matin, on voit défiler en ville beaucoup de monde en toilette se rendant à l’église pour la messe et faire leur communion pascale. À Revel, il y a encore quelques pratiquants de tradition, mais je crois peu de pieux vrais. Je suis allé aux vêpres, la grande réunion des fidèles. Le prédicateur a fait ses adieux. Les chaises de l’église se vendent 3 sous et il n’y a en pas eu pour tout l’auditoire. Le suisse, le sieur Garrigues dit le grand Cournayré avait endossé le joli costume rouge orange qu’on lui a fait fabriquer. Il était temps car le violet était déjà tout fané.
...Lundi 30 mars au matin. Température froide. Il a gelé en matinée. Des voitures transportent les élèves de l’école de Soréze au chemin de fer pour aller chez eux en vacances de quinzaine. J’ai reçu la photographie de Louis Boutier, le fils de mon jardinier qui est soldat à Chalon. Il m’a écrit en même temps une lettre.
Je trouve qu’il a fait des progrès dans sa manière de s’exprimer ; il en avait bien besoin. Il y a eu beaucoup de jeunes gens en ville qui ont fêté le lundi de Pâques et ont mangé l’omelette traditionnelle. Il y a eu du chahut toute la nuit en raison des nombreuses libations.
...Mercredi 1er avril, jour du poisson. Vent marin très fort et froid. Notre fille de service, Anna Vignes, a été interpellée par les couturières de Malaterre en lui disant qu’elle perdait son mouchoir de nez. Elle n’a pas été surprise du tout et elle leur a montré son derrière. Le vent marin a cessé sur le soir.
...Jeudi 2 avril, matin très sombre et temps pluvieux. Il bruine.
Le proverbe patois ne sera pas faux : En abrial plau à fial.
...Dimanche 5 avril. A deux heures du soir, il y a conseil à la mairie pour l’acquisition de l’angle du couvert bas de la maison Catala, ancien percepteur, qui menace de s’effondrer. On dit que le percepteur demande le prix de trois mille francs de la coupure de son appartement ; c’est un peu cher. A huit heures du soir, il y a eu exposition solennelle du Très Saint Sacrement à l’église paroissiale. Les cloches sonnaient à toute volée à cette heure là pour appeler les fidèles à cette solennité et ce à cause de l’adoration perpétuelle qui aura lieu demain lundi. D’après l’avis qui a été annoncé en chaire par le curé, les femmes ne seront admises à l’église cette nuit que jusqu’à dix heures du soir, après quoi elles devront se retirer et laisser aux hommes l’édifice complètement nu de leur sexe (sic). Une garde d’honneur, toute composée d’hommes seuls, doit veiller et prier au pied de l’autel. Ils sont chargés de veiller à ce que rien ne se passe de mal pendant cette nuit et ils doivent se relever par intervalles. L’église est fort bien décorée et ornée avec des trophées et des écussons placés sur les piliers.
Toute la nuit il est passé beaucoup de monde dans la rue.
...Lundi 6 avril. Temps frais mais beau. C’est aujourd’hui jour de l’Adoration à Revel, grand sermon à dix heures et chants par des amateurs de la ville. Le sermon a été prêché par l’ancien curé de St Félix Mr Estrabeau, aujourd’hui père Saturnin de la réforme des trappistes du père Muard, établis près de Dourgne au lieu-dit En Calcat …
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...Jeudi 21 mai 1891, au matin. Le vent marin est moins violent que hier soir, la matinée est belle. Beaucoup de monde est arrivé par le train de six heures des fêtes de Toulouse. Ils n’ont pas attendu le départ de cette ville du président de la République qui a lieu à huit heures du matin. La Dépêche distribuée ce matin de bonne heure annonce la nomination de Monsieur Paul Sarrat, maire de notre ville, comme chevalier de la légion d’honneur et celle de Monsieur Ozenne, banquier à Toulouse, un de nos amis, comme officier de la légion d’honneur. Ils ont été décorés par Monsieur Sadi Carnot, en personne. Trouvant le prénom de ce président peu courant pour l’époque, nous en avons cherché l’origine. Sadi Carnot s’appelait en réalité Marie François Sadi Carnot. Il doit ce prénom à son grand-père grand admirateur du poète persan Saadi de Shiraz, la ville des roses. Aujourd’hui encore, les Iraniens vénèrent ce poète dont le mausolée se dresse dans cette ville. Sur sa tombe sont gravés les vers suivants : << De la tombe de Saadi, fils de Shiraz, s’exhale le parfum de l’amour. Tu le respireras encore mille ans après sa mort. Quant à Sadi Carnot, il sera assassiné en 1894. Il est le seul président de la République à reposer au Panthéon. .
Tombe du poète Saadi à Shiraz. Mausolée de Saadi à Shiraz. | Le président Sadi Carnot. |
...Mercredi 27 au matin, temps pluvieux et froid. La soirée n’a pas été trop mauvaise. Monsieur Paul Sarrat est arrivé de Toulouse par le train de six heures du soir. A huit heures il y a eu réception à la mairie par le conseil municipal et les membres des commissions charitables en l’honneur de Monsieur Sarrat décoré de la légion d’honneur.
...Jeudi 28 mai. Le cercle républicain, sous la galerie du couvert des moines, est pavoisé de drapeaux tricolores à toutes les fenêtres et orné de branches de pin. A huit heures et demie, la musique dirigée par Monsieur Arsant Henri a joué en face le cercle plusieurs morceaux choisis de son répertoire. Après la Marseillaise, Monsieur Sarrat est descendu du cercle et s’est présenté au milieu du groupe de musiciens et les a chaleureusement remerciés de cette ovation. Il a ajouté que c’était le parti républicain, à la tête de la ville de Revel qui était honoré en entier par la décoration donnée par Monsieur Carnot. Plusieurs fusées volantes ont été lancées du balcon de ce cercle ainsi que du beffroi. Des feux de Bengale de plusieurs couleurs ont été allumés. C’était du plus bel effet. A noter cependant qu’un drapeau a pris feu à cause d’une étincelle de poudre. Toute la nuit, il y a eu en ville bruits de tambours et sons d’instruments de musique faits par certains jeunes gens ayant ingurgité des libations qui ont suivi la sérénade. Le vent marin s’est levé vers minuit.
...Samedi 30 au matin. Il bruine un peu. C’est aujourd’hui jour de marché mais a également lieu le conseil de révision suivi d’une revue militaire. Le préfet de la Haute-Garonne doit rencontrer ce soir celui du Tarn au bassin de St Ferréol où ils doivent coucher. La suite est de douze personnes dont trois dames. Vendredi 5 juin au matin, température fraîche et soleil voilé. Le général Léadé (?) qui était à Revel depuis quatre jours pour lever des plans en vue des grandes manœuvres qui doivent avoir lieu dit-on au mois de Septembre prochain est parti ce matin. Il y a de belles sardines fraîches et des coquilles sur la place publique, le tout vendu fort cher et quelques champignons dits bruguets ( cèpes ) .
...Lundi 8 juin au matin, temps très sombre. Le journal la Dépêche de ce matin est déplorable à lire à cause des ravages occasionnés hier par l’orage et qui a fait de très grands dégâts à Toulouse et dans les communes environnantes. Ce matin, pluie torrentielle et continuelle. Le ciel est couvert d’une manière extraordinaire. Tout le monde est consterné à cause des récoltes qui menacent d’être tout à fait submergées. La pluie n’a pas cessé un instant de tomber, c’est un vrai déluge. Mon fils est arrivé de Carcassonne par le train de neuf heures du soir. Il a acheté une cafetière russe pour faire le café.
...Mardi 9 juin au matin, température fraîche mais il fait beau. Le journal la Dépêche est navrant à lire. De nombreux détails sont donnés sur les effets de l’orage de dimanche dernier sur la région de Revel. Toutes les récoltes sont compromises ou par la grêle ou par l’eau. Aujourd’hui a lieu, à neuf heures du matin, l’enterrement de Mélanie Catala, femme divorcée d’un nommé Auriol. Son fils est dominicain. Elle est décédée à l’ancienne maison Batut , couvert de la volaille, où elle habitait depuis longtemps. Elle était camarade d’enfance de ma bien-aimée mère avec laquelle elle s’amusait souvent étant jeune. Les amies disparaissent peu à peu. Boyer Pierre, ancien camarade de collège et ami d’autrefois m’a appelé pour me prier de lui acheter une petite glace ancienne et une paire de manchettes en cuivre jaune de l’époque de Louis XIII. Je lui ai acheté les deux objets pour lui être agréable au prix de 3 francs cinquante. Il est devenu pauvre à cause du procès qu’il a soutenu avec son épouse divorcée.
...Jeudi 11 juin au matin, la température est froide, le temps est sombre. Jamais on n’avait vu à la place publique une si grande quantité de fraises à un prix si bon marché. Elles viennent de Gaillac et valent 6 sous la livre. On parle de 90 quintaux, c’est prodigieux. Tout le monde se presse devant l’étal del Facho pour en acheter. Elles sont plus grosses et de couleur plus foncée que celles que l’on vendait autrefois et qui venaient de Labécède. Elles sont bonnes et très parfumées. On a apporté des champignons dits bruguets mais ils ne sont pas beaux. Depuis longtemps, j’étais à la recherche d’un livre fait par Monsieur Auguste Galabert de Revel en 1847. Jamais je n’avais pu me le procurer. Je lui ai donné 2 francs bien que la première page manque ainsi que les feuilles de la fin du livre. Monsieur Antonin Pujol, négociant en vins, a offert avant de se marier, un somptueux dîner à ses amis de jeunesse. Les libations ont été nombreuses sans doute puisque on a chanté même après minuit dans les rues de la ville.
... Vendredi 12 juin au matin, température froide, on dirait que nous sommes en hiver. On se chauffe dans les appartements. Le sieur Imart, coiffeur à Puylaurens est venu, vers trois heures du soir, pour me demander si j’étais dans l’intention de cesser mon métier et de céder mon salon de coiffeur. J’en ai prévenu mon fils et ma famille et il a été convenu entre tous que le sieur Imart viendrait lundi ou mardi pour voir de nous entendre (sic) à ce sujet vers huit heures du soir.
...Dimanche 14 juin au matin, temps splendide, c’est la journée la plus belle depuis fort longtemps. C’est l’ouverture, par privilège du ministre, de la pêche à la ligne. Beaucoup d’amateurs à St-Ferréol et au ruisseau de la Mayre. J’ai acheté à Justin Gélis une pomme de canne en cristal de l’époque Louis XVI qui était d’un de ses aïeux. Elle est fort curieuse.
...Lundi 15 juin au matin, beau temps. Le sieur Imart qui veut me succéder s’est présenté chez moi avec son ami le clerc de notaire de Monsieur Espagnol pour voir de traiter pour me remplacer dans mon métier de coiffeur (sic). Je lui ai cédé la maison que j’occupe au prix de 200 francs la location annuelle. Il m’a payé comptant la parfumerie au prix de 450 francs. J’ai insisté pour clôturer la vente avant souper et ils sont repartis par le train de neuf heures du soir pour Puylaurens très satisfaits de leur acquisition.
...Mardi 16 juin au matin, la température est fraîche mais avec un soleil magnifique. J’ai commencé à déménager à la maison de mon fils les objets d’antiquités qui garnissent la maison que j’occupe ainsi que le magasin. Ce n’est pas une petite affaire que ce classement. J’ai acheté au prix de trente francs un christ ancien avec cadre doré que je convoitais depuis longtemps. C’est le couronnement de toutes les acquisitions que je voulais faire et c’est la dernière.
...Mercredi 17 juin. Beau temps chaud. J’ai prévenu mes clients de la cession de mon établissement au sieur Imart. Tous m’ont dit qu’ils resteraient à mon successeur à cause de moi. La chaleur est aujourd’hui accablante. C’est la période estivale qui commence.
...Samedi 20 juin. Jour de marché. Le sieur Imart qui me succède est arrivé de très bonne heure pour faire le travail du salon et faire connaissance avec les habitués de la maison. Tous les clients ont été satisfaits de l’élégance et de l’urbanité de ce nouveau coiffeur qui me succède et on a promis de continuer à venir à la maison. Le marché a été faible à cause des travaux de la campagne.
...Lundi 22 juin. Le déménagement se poursuit. J’ai offert à Madame Maunoury tous les papiers inutiles pour qu’ils soient utilisés pour le placage de ses meubles. Le sieur Gélis, plâtrier, restaure aujourd’hui le magasin. La température est fort chaude. Le métayer de Lescout m’a envoyé des graines de fèves.
...Jeudi 25 juin. Maître Edouard Lamy, notaire à Revel, rue Roquefort et successeur de Maître François Durand, notaire rue de Castres, est mort aujourd’hui, à trois heures du soir, d’un anévrisme. Cet homme était fort intelligent et surtout très intrépide pour sa profession. C’est lui qui a dénoué plusieurs affaires de famille qui étaient fort embrouillées. Il a été également le chef du parti réactionnaire dans les circonstances difficiles que ce parti a provoqué lors de l’affaire des frères et des sœurs. Il a été aussi à la tête du long procès au sujet des cent mille francs que les dames de la Providence avaient soustrait à l’établissement Roquefort. Il laisse une jeune veuve qui est la fille de feu Monsieur Jules Gabolde autre conservateur très militant. Il était originaire de St Julia.
...Vendredi matin 26 juin. Il y a beaucoup de fraises de Gaillac au prix de trente centimes la livre et également beaucoup de bruguets. Le commissaire de police a dressé plusieurs procès verbaux à des boulangers de la ville pour faux poids et pain trop cuit. Tout le monde se plaint de la diversité des prix du pain chez tous les boulangers. C’est un vrai méli mélo.
...Samedi 27 juin, quatre heures du matin, jour de marché et dernier jour où j’exercerai ma profession de coiffeur. L’enterrement de Monsieur Lamy doit avoir lieu à neuf heures du matin. On a mis les scellés à son étude à cause des papiers publics. Dans la matinée, j’ai eu beaucoup plus de monde que d’ordinaire à servir.
...Dimanche 5 juillet au matin, temps chaud. Le train de plaisir, à prix réduit, soit deux francs cinquante aller retour de Toulouse à Revel amène beaucoup de monde. Musique à onze heures à la sortie de la messe, course de vélocipèdes à deux heures du soir sur le tour de ville. Des Toulousains sont venus pour cela. Procession à travers les rues de la ville à cinq heures avec statue et bannière de la Vierge. Ascension d’un ballon sous le découvert en face le cercle des sports aux couleurs nationales qui a bien réussi. La famile Solomiac de Gandels et les dames Gui de la Poste ont été invitées à diner et à souper chez mon fils à l’occasion de la fête. Bal à neuf heures du soir après l’entrée aux flambeaux avec accompagnement de violons qui a duré jusqu’à une heure du matin.
...Lundi 6 juillet, température fraîche et beaucoup d’étrangers à Revel pour se promener. A St Ferréol cavalcade et mât de cocagne au Rond. A cinq heures du soir bal sous la halle jusqu’à sept heures suivi à neuf heures d’un feu d’artifice très réussi. Il a eu lieu en face de l’hôtel du commerce, porte de Castres, puis bal jusqu’à minuit.
...Mardi 7 juillet, poursuite de la fête avec un temps frais. A trois heures et demie du soir, les cloches de l’église paroissiale ont annoncé à la population revéloise le décès du vénérable pasteur de cette ville Monsieur l’abbé Berdoulat, âgé de quatre-vingts ans et curé de Revel depuis le huit décembre 1852. Monsieur Berdoulat était dans son lit depuis dix-huit mois, infirme et paralysé du côté droit. Les amusements de la fête se sont continués malgré ce décès par un bal à la promenade dite Grande Allée. Aucun incident durant la nuit.
...Mercredi 8 juillet, quatre heures du matin. La cloche du beffroi annonce aux habitants de la ville, par le glas funèbre, qu’elle a perdu son pasteur. Cette sonnerie a duré demi-heure et s’est répétée à midi et le soir à l’angélus. Le corps de Monsieur le curé Berdoulat a été déposé sur un magnifique catafalque à l’entrée du chœur, la tête faisant face à la porte d’entrée de l’église. Le cercueil est recouvert de branches de lys et de cyprès. De nombreux fidèles prient dans l’église ornée de tentures noires. A huit heures du soir ont eu lieu les vêpres des morts puis à dix heures le cercueil a été fermé et scellé avec du plomb. Quelques personnes dévouées ont veillé à l’intérieur de l’église.
...Jeudi 9 juillet, le glas funèbre du beffroi a sonné à sept heures ainsi qu’à la paroisse. A neuf heures du matin, la cloche a appelé les fidèles à la cérémonie funèbre. A dix heures, la messe a commencé. Elle a été dite par l’archiprêtre de Villefranche, l’offrande a été faite par l’abbé Pradal. L’éloge funèbre a été prononcée, après la messe, par l’archiprêtre du haut de la chaire voilée de noir. Il a choisi son texte sur la construction de l’église actuelle ( la construction des deux tours et des clochetons ont été payés par le curé Berdoulat sur ses propres deniers. Voir cahier n° 5) et sur les vertus sacerdotales de son pasteur. Après quoi a eu lieu l’absoute et ensuite le défilé processionnel du cortège qui a été nombreux et magnifique par le port de toutes les bannières des sociétés de secours mutuel et des congrégations. Le cortège a parcouru la rue Notre-Dame, le couvert des moines, le couvert de la volaille, la rue de Dreuilhe, la Patte d’Oie et le chemin de Carcassonne enfin celui du cimetière. Le pouvoir civil, maires adjoints avec leur écharpe, drapeaux et tambours faisant des roulements, sont arrivés au cimetière à midi et demie. Le cercueil a été déposé au caveau de la croix centrale après avoir enlevé les décorations et déposé de nombreuses couronnes sur la voûte du caveau. Le cortège s’est remis en marche après cette cérémonie dans le même ordre. Il y avait trente-quatre prêtres, un dominicain, un bénédictin. Un repas a été servi par l’hôtel de la Lune à tout ce clergé. Le curé défunt avait prévu le menu de ce dîner qui devait être servi au clergé assistant dans le grand salon ainsi que pour les membres de sa famille au nombre de trente personnes dans la salle à manger. Il avait réglé aussi minutieusement la décoration de son cercueil.
Le 24ème régiment d’artillerie et le 14ème de Toulouse sont arrivés à Revel pendant cette cérémonie, l’un venant du Causse, l’autre de Toulouse. Ils ont été les témoins de belles funérailles…
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Suite des précédents Cahiers d'Histoire de Revel . ANNEE 1893 PARU DANS LES CAHIERS DE L'HISTOIRE N°20 et 21
1893, Antoine Rodier est maintenant à la retraite. Il a tout loisir pour observer la vie revéloise : cirques, nouvelles plantations, faits divers, politique, liaisons secrètes plus ou moins avérées, rien ne lui échappe. A travers ses notes, prises au jour le jour, se dessine un intéressant tableau de la vie sociale à Revel en cette fin de XIXème siècle.
Dimanche 29 janvier au matin, température un peu froide et humide. A sept heures du matin a eu lieu la sépulture de Veterac Hyppolite l'ancien perruquier décédé hier. Il était âgé de 72 ans. Tous les assistants à cette sépulture se plaignaient de l'heure matinale de cette cérémonie puisque l'éclairage électrique était allumé. La soirée a été fort belle. Nous sommes allés en famille diner chez Monsieur Paul Cassan, aubergiste au Lion d'Or. Nous étions de nombreux convives et le repas a été délicieux avec un très bon cassoulet.
Lundi 30 janvier au matin sept heures, brouillard très épais qui n'a pas duré. J'ai fait porter à la veuve Combes, tante de Bosc dit le Canissou, serrurier, par Gros Joseph, forgeron, la somme de 300Frs pour hypothèque sur un champ qu'elle a acquis du domaine Devals, route de Sorèze. Elle a dix ans pour payer cette somme. La soirée a été fort belle. L'éclairage public du centre n'a pas eu lieu cette nuit et les particuliers ont été privés de lumière.
Février
Mercredi 1er février. On a ramené de la propriété de la Jalabertie deux cochons que l'on engraissait pour les tuer. Ces deux animaux on été conduits à la Bouriette chez Monsieur Barrau. C'est dans ce local que l'on fera la charcuterie afin d'éviter l'encombrement dans la maison de la rue de Castres. Un grand cirque a été établi sur le foirail de la porte de Castres. Il doit donner ce soir une grande représentation. Nous avons diné à la Bourriette à cause du travail de la charcuterie.
Vendredi 03 février. Il a gelé très fort mais le soleil est brillant. Aujourd'hui devait se tenir la foire, mais, par arrêté du maire, Monsieur Paul Sarrat, elle est retardée à demain, c'est-à-dire désormais toujours le samedi qui suivra cette date. C'est très fâcheux que l'on ait changé cette date puisque la foire de Revel se tenait ce jour-là depuis la fondation de notre ville.
Samedi 04 février. Temps superbe. C'est aujourd'hui jour de foire, la première de l'année. Il y a eu beaucoup de monde. Bal sur la promenade. Le cirque a donné plusieurs représentation avec énormément de monde. Le prix était de 25 centimes par personne.
Dimanche 05 février. Forte gelée mais soleil brillant. J'ai été à la grand messe de dix heures et demie. Au moment de l'élévation, le sieur Louis Planques, jardinier, dit le cirque( ?), a eu une attaque d'apoplexie. Ce jeune homme âgé de 32 ans était affreux à voir dans cet état, la bave lui sortait de sa bouche et il se débattait avec une force incroyable. Il s'est affalé ensuite au milieu de la nef.
Son père qui était à côté de lui, aidé de quelques paroissiens l'a emporté dehors avec beaucoup de difficultés. La soirée a été fort belle. Il y a eu bal au Casino et un autre au Lion d'Or à la Patte d'Oie.
En effet des jeunes gens ayant eu une difficulté avec le propriétaire du Casino, ils ont eu l'idée pour lui nuire de faire un autre bal à cet endroit. Les employés du cirque déménagent leur outillage malgré qu'ils distribuent un prospectus en ville annonçant une soirée non payante, car une des artistes a accouché la nuit dernière, d'une petite fille fort jolie et bien portante. Elle a été baptisée à l'église à deux heures de l'après-midi avec une pompe peu usitée dans notre pays. Le carillon a sonné à toute volée à l'arrivée de la nouvelle née, accompagnée du parrain et de la marraine, portée dans les bras de l'accoucheuse Madame Elise Franc en grande toilette. Cette petite fille a été baptisée par l'abbé Daras. Immédiatement après le baptême, le cortège est sorti de l'église tandis que deux coups de pistolet de gros calibre étaient tirés par deux employés du cirque, placés sur les derniers gradins du portail. Aussitôt la musique du cirque, tambour en tête a joué une marche et a accompagné l'enfant à l'hippodrome de la porte de Castres en jouant des airs variés. Sur tout le parcours du cortège, un monsieur fort bien mis de la troupe équestre jetait à pleines poignées de fort bonnes dragées que gamins et grandes personnes s'empressaient de ramasser. C'est la première fois qu'un tel évènement se produit dans notre ville.
Mardi 14 février. Matin et journée superbe. C'est aujourd'hui Mardi Gras. De nombreux masques dans des costumes divers et parfois excentriques comme ceux représentant des figures d'animaux portés même par des petits enfants se promènent dans les rues de la ville. On peut signaler le petit garçon de la famille Dombre, famille protestante, qui est venue de Castres habiter Revel. Pendant que le bal du Lion d'Or battait son plein et que les masques se promenaient sur le boulevard, une voiture des pompes funèbres de la ville de Lavaur, toute tendue de noir, suivait le boulevard et est entrée en ville par la rue de Dreuilhe. Le public, impressionné par cet appareil, se serrait, les masques s'arrêtaient, d'autres faisaient le signe de la croix, enfin d'autres pensaient tout simplement à une fumisterie de Carnaval. Il n'en était rien. C'était que l'on portait un cercueil vide chez le plombier Bastier afin de pouvoir y mettre le corps du sieur Parratge ( ? ) qui doit être emmené, demain matin, à Lavaur pour y être enterré.
Mercredi 15, jour des Cendres, temps magnifique avec un léger vent marin. Les masques se promènent de bonne heure ce matin. Il y en a qui mangent des sardines et des oignons, assis au coin des rues ce qui fait rire les passants. C'est aujourd'hui la foire des Cendres à Puylaurens, une grosse foire, très suivie par les gens des environs. Nous sommes partis ce matin pour Mirabel afin d'acheter la vieille tapisserie d'Aubusson que possède Monsieur de Gineste, propriétaire de ce château. Cette tapisserie fut sauvée lors de l'incendie de Puylaurens. Cette demeure est un véritable manoir féodal qui date des origines de cette famille. Il a fallu attendre deux heures que le fils de Madame de Gineste rentre de la foire pour pouvoir traiter de l'achat de cette tapisserie. Il est entré avec toute sa famille dans le salon et n'a voulu céder la tapisserie qu'au prix de dix mille francs.
Mardi 18 février au matin. Il y a beaucoup de boue. Le temps parait calme, mais par moments souffle un vent du nord excessivement froid. Le journal la Dépêche annonce à l'édition de Toulouse que deux femmes se sont battues sus la galerie du nord, samedi à huit heures du soir et qu'il y a eu crêpage de chignon et des mots très orduriers. Le public nomme le nom des combattantes, c'est la fille Gauze dite la Dourgniole et la femme du garde de la ville Valette. J'ai été me promener avec les habitués sur la rigole jusqu'au pont de Picou. Le sieur Cathala Arthur, sacristain à l'église paroissiale, nous ayant rencontré, nous a annoncé le bruit qui court en ce moment en ville : Le sieur Louis Roger, fossoyeur, venait d'être révoqué de ses fonctions. Il aurait enterré la fille Carayol à 90centimètres seulement de profondeur. D'autres disent qu'il l'aurait exhumée et qu'il lui aurait enlevé ses bijoux. Ce qui est sur c'est qu'il a été convoqué par le commissaire de police à la mairie. C'est ce soir que l'on doit faire de nouvelles expériences de lumières électriques. On a placé une trentaine de lampes devant la porte de l'église et le public jugera de l'effet en y allant à huit heures du soir. Il y a eu sermon ce soir à huit heures. On a pu y aller sans se mouiller, la pluie ayant cessé. L'éclairage électrique a été très brillant, c'était un essai fait par l'ingénieur (voir article cahier N°6 sur l'arrivée de l'électricité à Revel). Pas d'incident à noter pour la nuit.
Mars.
Mercredi 01er mars. Beaucoup de boue ce matin dans les rues mais température fort douce. On commence a défricher le côté du levant du padouvenc de Castres pour une plantation de platanes. Le maire a fait publier en ville d'avoir à enlever le dépôt de fumier que les propriétaires y ont déposé. Le Cirque Pinder a fait placer de grandes affiches aux coins des rues annonçant son arrivée pour le dix mars. On parle beaucoup en ville de la révocation du fossoyeur Roger. Il est remplacé par le Lanternou. C'est la première fois qu'il creuse aujourd'hui une tombe dans le nouveau cimetière. A proportion qu'il s'est mis à creuser, la fosse s'est remplie d'eau. J'ai été me promener sur la rigole avec mes amis habituels. En rentrant, j'ai arraché une dent, à la carotte, à Mr Couturier car il souffrait atrocement. Le souper a eu lieu à sept heures. La fille de service, Anna Vigne qui était sortie pour aller voir ses parents à la rue de Sorèze, est rentrée toute excitée et essoufflée nous annonçant une grande nouvelle qui venait d'arriver. Voici les faits. La veuve Lafon après une vive discussion avec sa belle fille avec qui elle habite, était allée, conduite par son fils Emile chez Mr Salvaing, horloger, couvert du nord dit couvert haut, pour passer la soirée. Sa belle fille profitant de l'absence de la fille de service qui avait été mettre le moine au lit, avait soulevé le couvercle d'un puits qui était dans la cuisine et s'y était jetée la tête la première. Aux cris poussés par la fille de service, des promeneurs sont entrés dans la maison et ont réussi à la sortir par les jambes. Peu s'en est fallu qu'elle fut victime de cette folie momentanée.
Jeudi 02 mars. Temps superbe. Mr Atric, ex employé de la banque de mon fils, est venu nous voir et a été invité à dîner. En son honneur, les deux employés de la maison ont été invités à prendre le café. J'ai blanchi au lait de chaux les souches de la vigne. Le soleil m'a fortement tapé sur la tête. Heureusement, j'ai saigné du nez ce qui m'a évité une insolation. Le père supérieur de la Doctrine de la Charité est venu me voir en compagnie de Mr Félix de Poitevin et je leur ai offert un sirop de grenadine. Mr Estrader, pharmacien à Toulouse et ami de mon fils, est arrivé par le train de sept heures du soir. Il a été trompé par une dame qui l'a prié de l'accompagner chez le docteur L…… en lui disant qu'elle ne connaissait pas les rues de Revel, ni la maison du docteur. Elle le trompait puisque en réalité c'était sa maîtresse qui venait de Bordeaux lui demander des finances comme elle a l'habitude de le faire de temps en temps.
Vendredi 03 mars. Temps superbe. Le journal la Dépêche annonce qu'il doit être fait une battue dans les bois de St Ferréol pour tuer de nombreux sangliers qui ont envahi la partie de cette montagne. D'autres parts des désœuvrés ont coupé le fil conducteur de l'éclairage électrique sur le chemin de Dreuilhe à Revel. Gare s'ils se font pincer ! J'ai fini de blanchir à la chaux les pieds de vignes. C'était nécessaire car de la mousse les avait envahis.
Samedi 04 mars au matin. Journée très belle. C'est aujourd'hui le marché hebdomadaire. J'ai été comme d'habitude à l'audition du juge de paix. Il y a une affaire de période électorale entre Mr de Bonnefoi et le maire de Revel. Cette affaire n'est pas terminée, on parle d'aller en cassation. On commente beaucoup en ville l'affaire de Valette, le garde de la ville, affaire qui l'oppose à Louis Delestaing. Le tribunal correctionnel l'a condamné à 50 Frs d'amende plus les frais avec bénéfice de la Bérenger. On lui a donné en effet cinq ans pour payer cette amende. Delestaing lui reprochait d'avoir voulu violer sa fille. Ce soir, il y aura sur la place de la fontaine monumentale une séance donnée par des singes savants. Un harmonium qui jouait la marche de l'artillerie a parcouru les rues de la ville annonçant pour huit heures du soir cette amusante soirée. Le sieur Jacques Raynaud, notre maçon à Revel, s'est rendu acquéreur de la maison occupée il y quelques années par le sieur Garric, horloger. Cette maison, la plus ancienne de Revel, qui fait l'angle avec la rue St Antoine et la rue de Dreuilhe et qui fait face à la place depuis l'ouverture du coin de cette galerie, appartenait puisque l'ayant construite, au sieur Guillaume de Flottes ancien seigneur de Revel. Il l'avait bâtie en pans de chêne sculptés qui provenaient de la forêt de Revel. Jacques Raynaud veut la reconstruire dans le style de l'angle du Capitole à Toulouse.
Manuscrit d'Antoine Rodier (juin – juillet 1893).
Archives Municipales de Revel.
Fonds Rodier - Série S
Jeudi 09 mars au matin. Beau temps et soleil magnifique. Le public de Revel est consterné par la mort de Mr Hyppolite Salvat. Il avait été mon camarade d'enfance, nous avons subi le hsort ensemble, passé le conseil de révision à Caraman lors de l'époque de la guerre de Crimée. C'était un homme bon surtout fort probe et religieux. A six heures du soir le bruit s'est répandu en ville que l'on avait trouvé le coupable qui contrariait depuis quelques nuits l'éclairage électrique et que ce coupable supposé était le sieur Bru Benjamin, ferblantier lampiste, habitant une maison qui lui appartient rue de Vaure. Cet individu, le plus malhonnête homme de Revel et surtout le plus haineux et le plus vindicatif, avait établi sur sa toiture, adossé à un des poteaux placé au sommet de la toiture, un fil conducteur qu'il avait adjoint au fil électrique et l'avait caché dans les tuiles pour le conduire dans le puits de sa maison. La lumière était ainsi détournée et perdue et retournait ensuite à l'usine de Dreuilhe et était à jamais perdue. Ce polisson n'en était pas à son premier essai et agissait de cette manière par expérience depuis plus d'un mois. L'administration Granoux a fait constater par des témoins le délit de manière qu'il ne puisse dire que le fait reproché n'était pas exact. Le sieur Bru n'était pas chez lui quand on a constaté les faits. Malgré tout ce qui lui était reproché, il n'a pas manqué d'assister comme bedeau au sermon du soir à huit heures. Tous les yeux des assistants étaient portés sur lui. On ne parlait que de sa méchanceté et de ses taquineries qu'il a pu faire à l'administration civile actuelle dont il est un des plus acharné ennemi.
Vendredi matin 10 mars. Temps splendide et chaleur excessive toute la journée. A dix heures du matin a eu lieu la sépulture de Mr Hyppolite Salvat, décédé avant-hier. Cette sépulture a été de 2ème classe. Les élèves du collège y ont tous assisté ainsi que tous les professeurs. Les élèves ont offert deux magnifiques couronnes. Les grands de l'école portaient le drap mortuaire. Le curé a officié. Pour la première fois, la musique la Lyre Revéloise a joué des marches funèbres. Les sœurs de Charité y assistaient. L'offrande a été fort longue à cause du nombre de personnes qui se sont rendues pour baiser la croix. Après l'absoute à l'église, le cortège s'est dirigé vers l'ancien cimetière où le corps a été déposé dans le caveau de famille. Après la cérémonie religieuse, le principal du collège de Revel a prononcé un discours rappelant les vertus et les bontés de Mr Salvat, vertus et bontés qu'il avait si bien montrées dans l'exercice de ses fonctions de professeur. A quatre heures du soir, le cortège du cirque Pinder, annoncé depuis environ une dizaine de jours a fait, si on peut dire, une véritable procession triomphale sur les boulevards avec biges, quadriges, chars dorés de toute beauté avec des chevaux superbes aux harnachements magnifiques, musique avec fifres mexicains, dromadaires, chameaux, éléphants avec cornac, amazones, chars égyptiens et nubiens. C'était magnifique. Une affluence considérable d'étrangers s'était rendue à Revel pour voir ce défilé digne d'un empereur romain. Depuis longtemps on n'avait vu une si belle cavalcade. L'hippodrome est situé à l'endroit ordinaire à part que les chevaux étaient parqués sous des tentes le long des boulevards. On dirait un vrai campement d'artillerie. Le public revélois conservera longtemps dans la mémoire la beauté de ce spectacle grandiose… (à suivre).
Relevé par J.Rey
N.D.L.R : la forme des écrits même avec ses imperfections a été conservée : il s'agit d'une transcription !
Aujourd’hui 1er juin, jour de jeudi, l’église paroissiale de la ville de Revel célèbre en grande pompe la Fête-Dieu. Le carillon annonce cette solennité. La grand-messe aura lieu ce matin à huit heures. Le ciel est voilé et la température bien fraîche. À partir de midi, le ciel s’est couvert et un orage s’est montré du côté de Castres. Nous avons dîné à la Bouriette. Un violent orage a éclaté et a duré environ deux heures. Le crieur public a prévenu les habitants de Revel que par avis de Monsieur le curé et de Monsieur le maire Paul Sarrat la procession de la Fête-Dieu sortirait dimanche comme d’habitude et suivrait l’itinéraire ordinaire et invite à se conformer aux usages habituels. On verra dimanche si après tout ce qui s’est passé il n’y aura pas d’incidents fâcheux à constater.
Vendredi 02 juin, le commissaire de police est venu prendre l’apéritif à la Bouriette. Il m’a dit que le public revélois était préoccupé de ce qu’on ne devait pas faire de reposoir à la porte de la rue de Vauré. Il est revenu sur cette détermination que l’on avait prise à la suite de l’affaire du curé car il y a des filles de ce quartier qui ont décidé d’en élever un de très beau. Mon fils a acheté à Villefranche à Monsieur Saint Serin, bijoutier, une pièce en or bien conservée de Néron avec sur le revers le temple de Vesta.
Dimanche 04 juin. Après les vêpres qui ont eu lieu à quatre heures du soir, la procession du Saint-Sacrement est sortie à cinq heures très précises et a parcouru l’itinéraire ordinaire. Le reposoir du château Get sur le tour de ville a été splendide. Elle est entrée en ville par la rue de Sorèze et s’est arrêtée à la chapelle de la Providence dont la façade était bien décorée de tentures et de fleurs. Elle a poursuivi par la rue dite du Temple. Un peu de verdure y avait été jetée ; ensuite elle est passée par la rue de Castres où la décoration était nulle cette année. Elle est rentrée par la rue de Vauré où de chaque côté il y avait des vases garnis de très jolies fleurs.
Le reposoir de l’extrémité de cette rue sous le gros ormeau était superbe. C’est à cet emplacement qu’a eu lieu l’affaire du curé qui lui a coûté la somme de cinq cents francs. Arrivé au reposoir, le curé n’a pas voulu rester au sommet du gradin où on avait placé un tabouret pour lui. Les orphelins de la Providence ont chanté un cantique puis a été donnée la bénédiction suivie du « Te Deum ». Les gardes de la ville étaient tous présents sur ce point. Aucun incident malgré les craintes.
Un fait à remarquer : au café Delestaing au coin du boulevard et au café Bastier, à l’un quatre personnes assises et à l’autre six, de ce nombre Mingelou le correspondant de « la Dépêche ». La procession a suivi son itinéraire par la rue St-Antoine couverte de verdure, puis rue de Dreuilhe.
Les élèves du collège de Sorèze, collets rouges et pantalons blancs, képis rouges à la main ont assisté au défilé de la procession.
Nous avons soupé à la Bouriette et on est rentré à huit heures et demie pour aller sur la grande allée où la Lyre Revéloise devait jouer sur la nouvelle estrade que la mairie de Revel a fait construire par le charpentier Pujet. Grosse affluence sur la grande allée.
Vendredi 09 juin au matin. Le temps se couvre et il fait très chaud. Le sieur A….. fils a été conduit à Villefranche pour vol à la vigne de Louis Massot de 5m50 de tuyau de plomb et vendu au sieur C…. , chiffonnier au prix de 2 f 50. C’est le fils d’A….. dit le Caque l’assassin de son beau-frère.
Dimanche 11 juin, fête de l’octave du Saint-Sacrement. Le salut a eu lieu comme dimanche dernier. Au reposoir de la rue de Vauré les nombreux consommateurs du café Bastier ne se sont pas levés quand le dais s’est arrêté devant cet établissement. Ils ont été très inconvenants. Sur la grande allée il y a eu théâtre de guignol pour les petits enfants qui étaient très nombreux, assis sur ce point devant le café du Casino.
Le sieur Cavagi dit le Clabet a donné bal au jardin olivier. Ce Clabet aurait pu attendre encore, il y a sept mois qu’il a enterré sa seule fille âgée de 16 ans, son unique espérance. L’électricité s’est éteinte tout d’un coup à neuf heures du soir et toute la ville a été plongée dans la plus parfaite obscurité.
Lundi 12 juin, température brûlante le matin et le soir. J’ai reçu une lettre de Montpellier adressée pour moi par Monsieur Félix Salvaing au sujet d’une petite pierre de quartz hyalin que son père lui avait adressée pour moi. Elle est bien rédigée et me donne toute la description de son origine. Mon fils m’a acheté, au prix de 15 f, une superbe médaille de Charlemagne de un florin pour ma collection.
Vendredi 16 juin au matin. On apporte au marché des champignons. Les gardes de la ville les visitent et font jeter au fumier ceux qui sont véreux. La soirée a été fort pluvieuse et cette pluie a été bienfaisante pour la plaine de Revel. Par contre, il n’en a pas été de même pour d’autres contrées où la grêle a fait beaucoup de ravages et jeté la consternation chez les propriétaires. À neuf heures du soir il y a eu à la mairie le mariage de Monsieur Jules Albert, notre voisin, veuf âgé de 57 ans avec la fille de service de Monsieur Gabriel Malaterre, âgée de 49 ans et veuve du sieur C….. qui se pendit au chevet de son lit à la maison de sa mère située sur le boulevard de la République.
Samedi 17 juin au matin, temps frais et sombre. Bénédiction, ce matin, du mariage de Jules Albert. Monsieur le maire Paul Sarrat, arrivé il y a peu de temps de son voyage à Schaffe…. (?) et qui prétendait savoir la langue allemande qu’il étudie depuis longtemps, n’a pu saisir aucune parole des prédications faites en chaire dans le temple.
Dimanche 18 juin. Le vent marin d’une violence inouïe s’est levé à l’heure de minuit. Les paysans sont sortis de leur lit de très bonne heure pour couper le blé. Malgré le dimanche tous étaient aux champs. C’est désolant de voir un vent pareil à cette époque de l’année car le blé est mûr. J’ai été voir le fils Louis Raissac, le jeune employé que des jeunes gens de 17 ans ont fait tomber de bicyclette, à neuf heures du soir, sur la route de St-Ferréol en lui lançant un manche à balai en travers. Il est tout contusionné. Il est aussi affligé pour sa montre. Il est probable que l’on trouvera les coupables. Il est au lit pour quelques jours.
Vendredi matin 23 juin, température fort chaude et le soleil est brûlant. Vers une heure le tonnerre a grondé puis la pluie s’est mise à tomber à torrents. Vers six heures du soir, le temps s’est remis au beau. Quelques feux de joie dits de la St-Jean ont eu lieu sur les boulevards et aux angles des rues qui ont beaucoup amusé les petits enfants. Il n’y a pas eu d’incidents à noter pour la nuit.
Samedi matin 24 juin. C’est jour de marché aujourd’hui à Revel. On a affiché le programme de la fête locale dite de Notre-Dame qui aura lieu le 02 juillet prochain. De très grandes affiches de plusieurs couleurs tapissent les murs de certaines maisons. Pour la première fois et c’est en l’année 1893 qu’il n’y aura pas de messe, à neuf heures du matin, le lundi de la fête pour la société dite de Notre-Dame. La cause en est que cette société qui donnait de l’éclat à la fête s’est dissoute en ce jour. Elle voulait fusionner avec la société St-Denis, mais les membres de ces sociétés n’ont pu s’entendre. Il ne reste plus que la société St-Denis. Le marché a été faible. Le bétail à cornes ne se vend pas et celui qui se donne au boucher est à un vil prix.
Dimanche 25 juin au matin, temps superbe le matin. Cependant quelques gouttes d’eau ont eu lieu mais elles n’ont pas duré. À l’hospice Roquefort, à huit heures, a eu lieu la première communion pour les enfants du collège au nombre de quatre avec une pompe inaccoutumée. Cette cérémonie a eu lieu sous la direction de l’aumônier l’abbé Olive. Cette cérémonie aurait dû avoir lieu à la chapelle du collège mais vu le délabrement de cette chapelle, le maire Paul Sarrat a donné l’ordre de la faire à l’hospice. Il y a eu amnistie pour les punitions des élèves accordée par Monsieur le principal à la demande de l’aumônier.
Lundi 26 juin. Temps superbe. On a été obligé de rester à la maison à cause des ouvriers maçons qui réparent la toiture endommagée par les ouvriers de l’éclairage électrique. À cinq heures du soir, le tocsin a sonné à toute volée. Le feu s’est déclaré à l’angle de la rue de Sorèze, côté droit, chez le sieur St-Martin, serrurier et épicier. Un tonneau rempli de pétrole ayant éclaté lors de son déchargement dans la cuisine, il a pris feu et le magasin a été complètement détruit. Grâce aux prompts secours organisés par les voisins, les dégâts n’ont été qu’au rez- de-chaussée.
Mardi 28 juin. Les marchands ambulants commencent à installer leurs baraques sous la halle en vue de la fête locale. Le commissaire de police n’est pas content du tout de l’administration civile. Il avait reçu des arrhes d’un des marchands venu de Carcassonne pour sa place, l’administration des droits de place n’a pas voulu que le lieu, par lui désigné à ce marchand, fut loué. Il faut s’adresser à Monsieur Constant seul placier désigné pour cela. C’est une vraie pétaudière que cette administration civile qui à tout instant donne des ordres contraires à ceux qu’elle a autorisés quelques moments avant.
JUILLET
Samedi 1er juillet, jour de marché à Revel, la chaleur est accablante de très bonne heure. Il ne s’est pas fait d’affaires. Une quantité extraordinaire de baraques foraines entourent les deux côtés de la halle et sous le découvert : ménageries, acrobates, manèges de chevaux pour les petits enfants fort bien ornementés, marchands de faïences et jeux de tourniquet, gâteaux, bonbons… La halle publique est superbement décorée de guirlandes de buis et pavoisée de drapeaux. Depuis fort longtemps on n’avait vu une si grande quantité de marchands étrangers et de saltimbanques pour la fête locale. Elle promet d’être fort belle vu la publicité donnée par le correspondant de « la Dépêche ». Le marché s’est terminé de bonne heure. À neuf heures précises, la cloche du beffroi a donné le signal de l’ouverture de la fête locale : belle musique, retraite aux flambeaux, sérénade aux autorités sous la halle, bataille de confettis. Ce sont des petits ronds de papiers de plusieurs couleurs que les gens se jettent à la figure et sur les habillements. Ce genre d’amusement tout nouveau pour les Revélois est fort bien pris et goûté par le public. L’illumination de la halle a été faite à la lumière électrique.
Dimanche 2 juillet. Grande fête locale. À quatre heures du matin, le canon s’est fait entendre. Il avait été supprimé depuis quelque temps pour la fête. La cloche du beffroi et de l’église sonnent à toute volée. Les offices religieux ont eu lieu à la paroisse avec la plus grande solennité. Procession extérieure sous les couverts des moines et de la volaille. Le bruit de toutes les musiques foraines jouant à la fois au même moment était assourdissant. Grande illumination du chœur de l’église par l’embrasement instantané de la coupole par le fulmicoton. À cinq heures, ascension d’un superbe ballon aux couleurs nationales devant le cercle des sports où un joli drapeau de cette société avait été arboré. Concert par la lyre revéloise et une foule compacte pour l’entendre. À neuf heures du soir, après avoir jeté un coup d’œil sous la halle et assisté à la jetée des confettis, je suis rentré chez moi. Au moment où j’arrivais à la porte de la maison, le tocsin a sonné avec une violence extrême. Tout le monde s’est mis à galoper dans les rues de la ville et la débâcle a été générale sous la place. Le feu s’était déclaré au hangar du sieur Rocaché où était toute la récolte de fourrage adossée au mur de la Bouriette. J’ai galopé et nous sommes arrivés avec toute la famille complètement essoufflés devant le sinistre. Le portail en fer était enfoncé. Le hangar était détruit et la petite voiture qui se trouvait devant l’entrée a été dévorée par le feu. On a pu préserver le bétail. Nous sommes rentrés à minuit escortés de nombreux amis qui étaient venus porter du secours dans le cas où notre maison eut été envahie par le feu. Il est fort à regretter que tous les ans à pareille époque et toutes les fois qu’il y a une fête, à la même heure, quelque maniaque s’amuse à mettre le feu et à détourner le public des amusements et jette l’épouvante en ville.
Lundi 3 juillet. Les revélois commentent beaucoup le feu de la Bouriette. C’est l’indignation générale. Après-midi, courses en voiture à St Ferréol ainsi que bal dans le parc. En rentrant de St Ferréol, une voiture de Sorèze ramenant des professeurs de l’école a heurté une femme de Revel et l’a gravement blessée au côté et au visage. On l’a transportée à son domicile dans un état désespéré. Mât de cocagne au rond dit de la Patte d’Oie. Bal sous la halle. À neuf heures du soir, feu d’artifice à la porte de Castres tout près de la fontaine monumentale dont le jet d’eau fonctionnait. Le feu d’artifice a été bien maigre.
Ensuite retraite aux flambeaux jusqu’à la halle pour le bal, concert de jeunes gens de la ville avant l’ouverture du bal, bataille continuelle de confettis sur les promenades et belle illumination. Beaucoup de monde également aux cafés de la place.
Mardi 4 juillet. Beaucoup de champignons sous la halle, mais les gens paraissent accablés de fatigue. Dans la nuit, quelques voyous ont lancé une grosse pierre sur la devanture du sieur Baillon dit Monsieur sans restriction. Triste amusement d’ivrognes probablement. À trois heures, jeu de la bague devant le café Guibert. À quatre heures, jeu de la poêle devant le café Mallet. À cinq heures, bal sur la grande allée fort bien arrosée pour la circonstance. Le public était surtout attablé devant le café du casino et du côté du café Gisclard. La retraite aux flambeaux s’est déroulée comme d’habitude sur la grande allée illuminée par les becs électriques. Cette fête s’est bien passée excepté le trouble de l’incendie de la Bouriette…
(à suivre ...)
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