Société d’ Histoire de Revel Saint-Ferréol PARU DANS LES CAHIERS DE L’ HISTOIRE NUMERO 7 - 2001 - |
HISTOIRE DE LA POSTE DE REVEL Messagers, porteurs, directeurs et facteurs, receveurs et receveuses
Constant Bouérat - Jean Hébrard - Émile Mons
|
NOTE LIMINAIRE
En 1995, M. Bouérat, directeur d'établissement principal honoraire des Postes à Toulouse, envoyait un questionnaire à la poste de Revel dans le but d'écrire l'histoire du bureau de Revel qu'il désirait publier dans les cahiers d' Histoire des Communications dans le Midi de la France pour lesquels il avait déjà écrit plusieurs articles.
La Société d'Histoire de Revel - Saint-Ferréol prit en charge ce travail de recherche qui se révéla vite captivant et riche d'enseignement tant sur l'organisation de la poste que sur les familles revéloises qui participèrent à son fonctionnement ; une collaboration féconde s'établit tout au long de l'année 1996 entre M. Bouérat à Toulouse et MM. Mons et Hébrard â Revel qui se concrétisa par deux articles dans les volumes VIII et IX de la revue « Histoire des Communications ».
Le document qui avait, à l'origine, justifié l'intérêt de ce travail était dû à M. Michel Bourguignon ; celui-ci, en effet, avait communiqué en 1987 à la Direction de la Poste à Toulouse un relevé des événements concernant la poste, établi à partir des délibérations du Conseil de la Communauté puis du Conseil municipal de Revel de 1729 à nos jours ; ce précieux et abondant corpus de quatre-vingt-sept pages ne demandait qu'à être exploité ; quatre années ont passé depuis la première publication ; de nouveaux documents permettent aujourd'hui de présenter une édition revue et augmentée du texte de 1996.
De tout temps, les hommes ont éprouvé le besoin de communiquer avec leurs semblables à distance quand ils ne pouvaient le faire de vive voix ; les diverses sociétés ont connu au cours des âges le cri , les ronds de fumée ou le tam-tam, transmissions sonores ou visuelles soigneusement codées ; des coureurs, des cavaliers à la mémoire sans faille venaient réciter au destinataire le message oral dont ils étaient les porteurs ; chacun connaît la grande mais brève nouvelle apportée par Philippidès, le coursier pédestre de Marathon qui, atteignant Athènes, s'écria nikê! (victoire!) et expira ; avec le document écrit sur tablettes d'argile chez les Perses de l'empereur Kourach que nous appelons Cyrus, et sur tablettes de cire dans l'empire romain, on était bien loin du papier pelure de la poste aérienne ; les Croisés des pays d'Occident apprirent au Moyen Orient à utiliser le pigeon voyageur ; si le ballon monté a eu, il n'y a guère que cent trente ans, un certain succès, par contre il semble que les cinquante-cinq boules de Moulins immergées dans la Seine à Melun du 14 au 28 janvier 1871 eurent de grandes difficultés à remplir leur mission, à savoir d'être repêchées dans Paris assiégé.
Qu'importe ! L'imagination de l'homme n'a pas de limites.
À la fin du Moyen Âge, notre pays a connu une prolifération d'institutions postales, chacune d'elles réservée à une société particulière : poste des établissements monastiques, messagers de l'université de Paris, messagers des grands seigneurs (dont le roi), porteurs de justice entre juridictions, messagers des grandes villes, etc.
Au milieu du XIV' siècle, la toute nouvelle bastide de Revel eut-elle son messager ? Voilà une question qui nous entraîne au cœur du sujet : elle a été l'occasion d'un débat, somme toute assez innocent, entre spécialistes.
Eugène Vaille, érudit historien des Postes françaises, écrit que la charte de fondation de Revel, en 1342, avait prévu la création de messagerii, de messagers au service des consuls de la ville ; il s'est laissé abuser par l'assonance (et peut-être aussi par une mauvaise transcription orthographique) en assimilant les "messegarii" aux messagers ; la charte est sans équivoque en son dix-neuvième article :
« Item, quod per consules diace vilke instituentur sufficientes messegarii seu custodes fructuum, homines bonæ famœ quos messegarios consules poterunt emutare, qui messegarii in manibus dictorum consulum jurabunt suum officium fideliter exercere & quoties domino refit & prœdictis consulibus pertinet malum facientes revellare & nemini parcere prece vel pretio vel timore. »
« De même, que soient nommés par les consuls de la ville de valables mességuiers, c'est-à-dire des gardiens des cultures, hommes de bonne réputation, que les consuls pourront remplacer. qui jureront entre leurs mains d'exercer fidèlement leur office, et qu'il importe qu'ils dénoncent chaque fois les malfaisants au seigneur roi et aux consuls, et qu'ils n'épargnent personne, que ce soit par prière, par argent ou par peur. »
Il s'agit de gardes champêtres chargés de veiller sur les propriétés rurales, appelés encore mességuiers, du latin messis, moissons.
Mais, sans s'en douter, Eugène Vaille voyait juste, pour d'autres raisons qu'il ignorait, ne les utilisant pas dans son argumentation.
Sur le territoire très vaste rassemblé autour de la bastide, ces gardes champêtres avaient été dotés d'attributions élargies, qui ne se retrouvent pas ailleurs. Elles faisaient de ces hommes de terrain les porte-parole des consuls à l'intérieur de leur juridiction et dans les consulats (1) du voisinage.
Ils étaient agents de poursuite pour le recouvrement des taxes municipales :
Art. 10 :
« Item, habebunt dicti consules cognitionem & executionem de affanagio quocumque, quacumque sit summa, & dictam compulsionem facient per eorum messegarios seu per servientes regios, necnon cognitionem & compulsionem quarumcumque summarum aliorum debitorum quacumque sit causa debitorum, usque ad summam decem solidos tholosanos, salvo jure regis super clamoribus. »
« De même les consuls auront la connaissance et l'exécution de tout affenage (2) , quel qu'en soit le montant, et ils en feront faire sommation soit par leurs mességuiers, soit par les sergents royaux, ainsi que la connaissance et l'exécution par contrainte de toutes les sommes dues par les autres débiteurs, quelle que soit la cause des dettes, jusqu'à la somme de dix sols toulousains. sauf le droit du roi sur les proclamations. »
Art. 17 :
« Item, quod dicti consules pro talliis & collectis & emolumentis messegariæ levandis possint per suos messegarios pignorare & mandare & pignorare facere quoscumque qui solvi tenebuntur, absque licentia aliquorum. »
« De même, que les consuls puissent, pour la levée des tailles, impôts et frais de mességuerie, et par l'intermédiaire de leurs mességuiers, gager, citer ou faire gager tous ceux qui seront tenus pour solvables, et ce, sans permission de qui que ce soit. »
Ils étaient également agents voyers, veillant à la réparation des ponts, des chemins et des sentiers.
Leur rôle d'informateurs apparaît limité ; rien n'interdisait alors d'envoyer des porteurs spéciaux à Puylaurens, Saint-Félix, Castelnaudary ou Toulouse. Parcourir soixante kilomètres en un ou deux jours n'effrayait pas nos ancêtres, même chargés d'une lourde besace.
Plus fréquentes étaient les relations de service entre le bayle(3) , représentant local du sénéchal (4), et ledit sénéchal. La charte ne les réglemente pas davantage.
Revel fut à diverses reprises place forte des religionnaires. De forts contingents sillonnèrent le pays. Le chroniqueur castrais Gaches qui rédigea ses mémoires vers l'an 1600 raconte par quel ingénieux stratagème, lors du siège de Brugairolles (au sud de Montréal, entre Prouille et Limoux) par les Ligueurs de novembre 1587 à janvier. 1588, les assiégés purent échanger des messages avec notre cité.
« Privés de tout moyen de continuer leurs advis et d'en recevoir de dehors, comme ils avoient accoustumé, la nécessité les fit adviser d'un moyen estrange qui semblera fabuleux à la postérité. Les assiégés avoient accoustumé d'envoyer presque tous les soirs un soldat qui prenait avec lui un jeune mastin qu'il laissait à Besplas, attaché dans une chambre, avec ce dont il avoit besoin pour sa vie et passait pour porter les advis à Revel et, revenant vite à Brugayrolles, reprenait son chien, ce qui fut fait longtemps ainsi ; pendant lequel temps le chien apprit sy bien le chemin que lorsque les assiégés ne purent plus espérer le retour des soldats qui portaient leurs advis à Revel, ils hasardèrent de faire prendre le chien par le soldat qui, l'ayant laissé au mesme lieu, passa à Revel et, revenant vite à Besplas, reprit son chien auquel il attacha la response enveloppée dans un morceau de cuir au col ; l'ayant fait manger, il le mena dehors dans le chemin de Brugayrolles et, en le menaçant, luy cria : Viste, viste, à Brugayrolles !
Le chien ayant suivy le chemin tout droit, franchit les tranchées et aborda le fossé ; mais, ne pouvant entrer, il se mit à aboyer, ce qui réjouit fort les assiégés et, ayant fait entrer le chien, il fut fort caressé par les soldats.
Cela fut pratiqué jusqu'à la nouvelle de la défaite de l'admiral de Joyeuse (5) qui ayant été connue par ce moyen, les assiégés ne purent empescher d'en témoigner quelque joie, ce qui fit soupçonner le chien que l'on vit un jour franchir les tranchées et entrer dans la ville ; et comme on le guettait, il faillit une fois à estre tué par les arquebusades qu'on lui tira (6)
.
Il fut arresté qu'ils sortiraient avec leurs armes, enseignes déployées, mesches allumées, tambour battant, emportant ce qu'ils voudroient, et que les charrettes leur seraient fournies à cet effect.
Les otages reçus, le chien Ribet qui leur avoit servi de messager fia demandé par le jeune Mirepoix (7) à qui Portal (8) respondit qu'il ne le pouvoit accorder et qu'ils le vouloient faire marcher à la teste de la compagnie ; mais, sur les instantes prières du vicomte, le chien luy fut baillé. La Vila (9) sortit de Brugayrolles le 21 janvier, après sept mois de siège ; la capitulation fut bien observée. »
On ne peut taxer ce récit de légende.
Signalons que le docteur Clos, de Sorèze, ayant eu connaissance du récit de Gaches, l'a résumé à la page 116 de sa Notice historique sur Sorèze et ses environs, imprimée en 1822.
Au XVII' siècle, deux institutions d'envergure nationale, pour employer notre langage, desservaient postalement, à dates et itinéraires fixes, avec des tarifs préétablis, pour le courrier non officiel, la grand'route du Languedoc. Sans entrer dans les détails de leur évolution, c'étaient :
- la messagerie des Capitouls de Toulouse ; organisée en 1549, ses messagers jurés se rendaient à Paris, -Lyon et Marseille chaque semaine, et à Bordeaux deux fois par mois ;
- la poste royale ; celle-ci desservait Toulouse depuis Paris via Lyon et Montpellier depuis 1538 ; en 1622, elle ouvrit à Toulouse un bureau recevant les correspondances privées et officielles, lorsque fut mise en service la route directe de Paris à Toulouse, précédant de peu celle de Bordeaux à Toulouse. Ses courriers y circulaient deux fois par semaine.
La poste royale absorba, en 1674, les messageries toulousaines et les autres entreprises similaires, telles les messageries des États du Languedoc, organisées en 1657, qui assuraient l'acheminement du courrier entre Toulouse et le Bas Languedoc via Carcassonne, et Toulouse et le Haut Languedoc via Castres.
Tout un réseau informel reliait les communautés à Toulouse et aux quelques bureaux de poste établis sur les itinéraires des liaisons postales ; il était desservi par des piétons réguliers ou occasionnels.
Revel se tint à l'écart de ces organismes. Les raisons en sont mal connues. Depuis le milieu du XVIIème siècle, la perte pour la ville de l'eau détournée vers le Canal des Deux Mers et le départ des manufacturiers protestants après la révocation de l'Édit de Nantes avaient entraîné le déclin des industries de tannerie (affacheries), teinturerie, traitement des laines. L'endettement de la ville n'avait pas permis de relever toutes les ruines accumulées par les luttes intestines de la première moitié du siècle.
Le besoin postal existait pourtant. Sur les plans administratif et judiciaire, Revel entretenait des relations avec Toulouse, siège du Parlement ; avec Montpellier, siège de la Cour des aides et de l'intendant du Languedoc ; avec Lavaur, siège du subdélégué de l'intendant (c'était le diocèse civil) ; avec Castelnaudary, siège de la sénéchaussée et présidial du Lauragais, par où s'évacuait la production agricole depuis l'ouverture du Canal royal en 1682.
Sur le plan religieux, le consulat de Revel relevait des diocèses épiscopaux de Lavaur (Revel-ville, Vauré et Couffinal), de Saint-Papoul (Dreuilhe et Vaudreuille) et de Toulouse (paroisse de Saint-Pierre de Calvairac et ses annexes de la plaine) ; sans oublier les liens traditionnels avec Puylaurens renforcés par les affinités nées de la Réforme. Par contre, Castres, extérieur au diocèse de Lavaur et à la sénéchaussée de Lauragais, n'était pas concerné.
Depuis la fin du XVIIème siècle, la poste royale, désormais sans concurrence, pratiquait une ferme politique de raccordement des petits consulats à son réseau en augmentant le nombre de ses bureaux. De 50 en 1650, ceux-ci étaient devenus 770 en 1704 et seront 1380 en 1789.
Autour de Revel, elle tenait ceux de Castres, Villefranche, Castelnaudary, et bientôt Puylaurens en 1715.
Les consuls de Revel décidèrent d'établir une liaison postale avec Castelnaudary où étaient les intérêts commerciaux de la cité, et qui était le mieux placé pour les relier à Toulouse, à Montpellier et, éventuellement au reste du royaume.
On commença prudemment en 1706 par un piéton ou petit porteur ; le règlement du 30 décembre de cette année mentionne une liaison hebdomadaire entre Revel et Castelnaudary (le dimanche, semble-t-il) pour laquelle la ville s'impose la somme de vingt-cinq livres par an, destinée à la rétribution d'un porteur.
Piétons ou petits porteurs, ainsi appelait-on à cette époque, dans toute la France, les messagers des consulats. Rien ne les obligeait d'aller à pied, mais s'ils usaient d'une monture, celle-ci n'était pas prise en compte dans leur rétribution.
Le porteur, accrédité par la Communauté (10) de Revel en réunion du Conseil politique (11), était ensuite présenté au bureau d'attache de Castelnaudary ; et il devenait jurat - assermenté dirions-nous aujourd'hui - après avoir prêté serment devant les consuls.
Il devait placer à la porte de son domicile une boëte où l'on jetait les correspondances à expédier, le prix du port étant en effet acquitté par le destinataire et non par l'expéditeur,
Avant de partir, il allait chercher à la maison commune le courrier des autorités et l'emportait avec celui déposé dans la boëte. Au retour, comme il était redevable au directeur de la poste de Castelnaudary des taxes grevant le courrier qu'il en avait reçu, il le portait au domicile des destinataires, ce qui pouvait entraîner quelques longues marches dans le vaste territoire du consulat ; les destinataires lui remettaient le prix du port inscrit sur la lettre au-dessus de l'adresse par le bureau expéditeur ; il ramenait à Castelnaudary le courrier refusé par le destinataire et l'argent des taxes perçues pour le courrier remis.
Il arrondissait ses fins de mois en effectuant des démarches ou commissions que lui confiaient ses concitoyens et les gens habitant sur son parcours. Mais il n'était pas accrédité par les autres communautés, ce qui aurait demandé des accords pour le partage de sa rétribution.
Quant au courrier administratif, celui qui était destiné aux autorités supérieures devait être affranchi au départ ; pour Lavaur, il n'y avait pas de porteur permanent à service régulier on prenait, dès lors que besoin était, un exprès (12), porteur occasionnel à pied ou à cheval (ou chevaucheur). Cela coûtait cher ; en voici trois exemples .
Le 22 janvier 1730, on envoie un exprès à Lavaur pour régler l'affaire qui oppose la Communauté à monseigneur le marquis de Villars Brancas ; plusieurs voyages et cinq journées de déplacement lui seront remboursées seize livres.
Le 9 octobre 1745, le trésorier de la Communauté rembourse à Dominique Armaing, syndic, les « trois livres qu'il a payées en août et septembre pour deux lettres de M. de Boisseson, subdélégué du diocèse de Castres, à lui remises par un exprès venant de ladite ville. »
Le 27 décembre 1745, il est dû au même Dominique Annaing « la somme de treize livres treize sols dix deniers pour le fournissement par lui fait à la Communauté pour port de lettres, affranchissement des paquets ... » dont il demande le payement.
Au début de 1729, un changement d'horaire des grands courriers desservant la route de Toulouse à Montpellier désorganisa à Revel le rythme des usagers de la poste en reportant du dimanche au lundi la réception de leur correspondance arrivée au bureau de Castelnaudary, « causant beaucoup de retardement aux affaires, lequel ne peut se réparer qu'en obligeant un facteur d'aller deux fois la semaine de cette ville à Castelnaudary, en lui fixant le lundy et le vendredy. »
Sans doute, le facteur en service à l'époque refusa-t-il de doubler son service pédestre et dominical. Le conseil de la Communauté fit aussitôt un appel d'offres. Un nommé Pierre Lacombe proposa d'assurer ce service à cheval pendant deux ans au prix de vingt-cinq livres par an qui était déjà la somme imposée, c'est-à-dire autorisée par l'intendant et inscrite au budget communal ; et pour le surcroît de travail, il demandait « qu'on luy paye un sol par lettre au-dessus de la taxe, de toutes celles qu'il ira retirer du bureau de Castelnaudary. »
Ce sol était déjà, en d'autres agglomérations, la surtaxe perçue par la poste lorsqu'elle ouvrait un bureau secondaire, dit de distribution, à la demande des collectivités.
Le soumissionnaire avait-il trouvé une équivalence entre ce supplément d'une part, et le doublement de son travail, y compris la fourniture du cheval, d'autre part ?
La mobilisation du messager peut être évaluée à une petite journée pour chaque rotation, soit une quarantaine de kilomètres (trois lieues (13) à l'aller, autant au retour) parcourus à un petit trot de huit à onze kilomètres à l'heure, la prise en charge du courrier à Castelnaudary, enfin sa remise aux destinataires.
Un brassier gagnait alors une dizaine de sous par jour (une demi-livre). Une cinquantaine de voyages à pied par an, soit 25 livres, était ainsi une rétribution normale ; un millier de lettres par an, chiffre vraisemblable, devrait rapporter à Pierre Lacombe 1000 sous, soit 50 livres, à savoir 25 livres pour la rotation supplémentaire et 25 livres pour la nourriture et l'entretien du cheval, Pierre Lacombe, semble-t-il, savait compter. Il deviendrait ainsi, non seulement messager rétribué par les consuls, mais aussi distributeur aux yeux de la poste rémunéré par le biais de la surtaxe.
Lacombe fut coiffé sur le poteau par Jean Pierre Fourgassié qui emporta le marché aux mêmes conditions, « à la charge de bailler bonne et suffisantes cautions », stipule la délibération du conseil de la Communauté en date du 24 avril 1729.
D'où l'on peut penser que Lacombe n'avait pu fournir les dites cautions. Le premier mai, à la délibération suivante, le sieur Fourgassié présente au conseil le sieur Jean Corraze qui est accepté par l'assemblée comme fournissant pleige (14) et entière caution.
Jean Pierre Fourgassié donna satisfaction aux usagers et, en 1743, le maire, M. Auriol de Laplagnolle, déclarait en séance du conseil que « ledit Fourgassié s'est très bien acquitté (15) jusques à présent sans que la Communauté ait eu aucune plainte de sa conduite ; et comme d'autre part, il arrive (16) à Castelnaudary trois courriers la semaine qui sont les mardi, jeudi et dimanche, il importe pour l'intérêt public d'obliger ledit messager d'aller en la ville de Castelnaudary lesdits trois jours de chaque semaine ... ; » l'assemblée, appelée à délibérer, « accorde au dit messager la somme de cinquante livres par année à commencer de ce jourd'hui sous le bon plaisir de Monseigneur l'Intendant, à la charge pour ledit messager d'exécuter le présent délibéré, auquel effet messieurs les maire et consuls sont priés de faire présenter requête audit Seigneur Intendant pour supplier très humblement Sa Grandeur d'homologuer la présente délibération et de permettre l'imposition de ladite somme de cinquante livres annuellement au profit dudit messager, en laquelle est comprise celle de vingt-cinq livres qui s'impose déjà. »
L'année suivante, le 22 avril 1744, le maire reçoit un nouveau règlement des dépenses ordinaires de la Communauté, sur ordonnance du 31 janvier 1743 des commissaires du roi et des états (17) qui fait défense d'imposer le traitement du porteur de lettres dans le budget des dépenses ordinaires.
À Revel, les consuls et les conseillers délibèrent que « les dits nouveau règlement et ordonnance de nos Seigneurs les Commissaires du Roy et des États sont reçus avec la civilité requise et seront incessamment registrés dans les archives... et que messieurs les maire et consuls sont priés de permettre d'imposer la somme de cinquante livres au profit du messager de cette ville ».
Le surlendemain, le 24 avril, le nommé Entraigues, huissier au recouvrement des tailles du diocèse, arrivant de Lavaur, signifie par exploit à M. de Laplagnolle, maire, une ordonnance de messieurs les commissaires du roi aux états datée du 27 janvier dernier pour la restitution des sommes indûment versées au messager.
Deux jours après, le 26 avril, le Conseil délibère d'une commune voix « qu'attendu que l'imposition de vingt-cinq livres au profil du messager s'est faite conformément aux anciennes et nouvelles impositions, MM. les maire et consuls sont priés de faire une recherche aux archives de la Communauté pour justifier des permissions de faire des impositions et de présenter ensuite requête à nos seigneurs les commissaires du roi aux états et les supplier de relaxer les dits sieurs maire et consuls, greffier et départeurs (18) de la demande et peines portées par ladite ordonnance. »
Six mois plus tard, le 20 octobre, le sieur Desplas, premier consul, en l'absence du maire, annonce « qu'une ordonnance des commissaires du roi aux états a débouté la Communauté de sa demande d'imposer cinquante livres annuellement en faveur du messager, mais comme lesdits seigneurs commissaires ont pu ignorer la nécessité que la Communauté a que le porteur soit maintenu dans ses fonctions comme très utile au public et notamment en temps de guerre (19) , il arriverait que les affaires du roi et du public seraient totalement retardées ; pour y remédier, il convient de donner pouvoir à maître Bousquet, procureur de la Communauté de Revel auprès de la Cour des Aides de Montpellier, de présenter requête tendant en opposition envers ladite ordonnance et supplier en même temps nosseigneurs les commissaires de permettre l'imposition de cinquante livres annuellement au profit du porteur de lettres. »
Le 27 décembre 1745, M. Gouttes, premier consul, rappelle « qu'il est dû à Fourgassié la somme de cinquante livres pour les gages que la Communauté lui a accordés, de laquelle somme ledit Fourgassié, messager, demande le paiement pour la présente année qui écherra le premier janvier prochain » ; il est alors permis de penser que Revel a eu gain de cause et que Fourgassié a été payé selon l'usage à la fin de l'année écoulée.
Jean Pierre Fourgassié assurait encore son service en 1749.
Deux ans avant l'ouverture du bureau de Revel, les consuls proposent, lors de la délibération du 8 janvier 1769, un nouveau règlement indiquant les horaires des porteurs revélois et sorézien :
« Il a été dit par messieurs les négociants, commerçants et marchands de cette ville que pour faciliter et restaurer le commerce, il serait important qu'ils fussent instruits des avis que les négociants étrangers donnent à leurs commissionnaires sur les augmentations et diminutions des denrées et notamment des grains dans cette ville, au lieu que les messieurs de Chaury (20), ayant un courrier d'avance se rendent le samedi grand matin à notre marché et par les lettres qu'ils ont reçues du Bas Languedoc achètent les grains ; il paraît naturel que les citoyens de cette ville devraient sans difficulté jouir de cette facilité, sur quoi le sieur Molles de Puiredon, premier consul, maire, sur les éclaircissements que messieurs les négociants de cette ville lui ont remis, prie et requiert l'assemblée de délibérer sur les objets ci-après :
1° - Le dimanche matin, le porteur de Revel partira pour porter les lettres à Chaury et le même jour portera celles du Haut Languedoc qui seront remises immédiatement le même jour.
2° - Le mardi, le porteur de Revel partira pour Chaury (21), le même jour et portera les lettres qui seront remises de suite.
3° - Le porteur de Sorèze arrivera le mercredi à onze heures du matin chez le porteur de Revel qui lui remettra ses lettres, et partira à midi de Revel pour Chaury, et il ne sera de retour chez le porteur de Revel que le lendemain jeudi matin et laissera le paquet de lettres chez le porteur de Revel qui se chargera de les remettre de suite.
4° - Le vendredi après-midi, partirait le porteur de Revel pour remettre les lettres le même jour au bureau des postes de Chaury, et arriverait le samedi matin et porterait les lettres du Bas Languedoc.
Un motif aussi intéressant pour la patrie exige, messieurs, que vous vouliez y donner vos attentions et délibérer à la (...) et augmentations des gages pour le porteur.
Délibéré d'une commune voix que l'assemblée faisant tant pour elle que pour le général de la Communauté, a agréé le proposé du sieur Molles de Puiredon dans tous ses chefs et pour l'accordement qu'il faut faire avec le porteur du présent lieu, la Communauté a député M. Jacques Sarrat, négociant, pour faire l'accordement avec ledit porteur pour un an et lui donne pouvoir de demander aux particuliers, suivant leurs facultés, le montant dudit accordement. »
Il ne fut pas donné suite à ce projet, comme en témoigne un an plus tard une délibération sur le même sujet.
Le mardi 6 février 1770, on apprend en séance du Conseil, que le porteur de lettres a disparu depuis quelque temps après beaucoup de plaintes qui ont été portées contre lui, ayant commis dans ses fonctions bien des fautes graves.
L'assemblée élit à la pluralité des voix Daniel Guy, dit Cougot, cordonnier, avec le calendrier de service suivant entre Revel et Castelnaudary :
1) départ le lundi midi, retour le mardi matin
2) départ le mercredi midi, retour le jeudi matin
3) départ le vendredi midi, retour le samedi matin
4) départ le dimanche matin et retour le même jour
sous la rétribution du précédent porteur ( mais nous ne connaissons ni le précédent porteur, ni sa rétribution, et la répartition du service avec le porteur de Sorèze ne semble pas avoir été mise en pratique).
Il y a alors un incident, dont le greffier ne fait pas état, mais qui apparaît à la fin de la séance où seuls les consuls, deux conseillers et le procureur du roi ont signé, la plupart des conseillers (douze) s'étant retirés sans vouloir signer, de ce requis suivant les règlements.
Le lendemain, mercredi 7 février, le Conseil se réunit à nouveau (ce qui est très rare), M. Borrelly, directeur du bureau de Castelnaudary, ayant refusé la veille de remettre les lettres, ce qui peut causer bien des préjudices à plusieurs personnes.
Daniel Guy présente alors sa démission ; elle est acceptée par le Conseil qui élit François Fabrègues, peigneur de laine, dont on trouve les conditions plus avantageuses : il offre de remplir sa charge selon le calendrier présenté la veille, sans émoluments de la Communauté mais sous la rétribution d'un sol par lettre remise.
Le dimanche 18 février, il vient au greffe de l'hôtel de ville faire sa soumission pour la durée d'une année, prêter le serment en tel cas requis, et présenter son père, Michel Fabrègues, négociant, qui se rend pleige caution.
Par un acte déposé le samedi 7 avril à l'hôtel de ville, Fabrègues prie messieurs les consuls de nommer un autre porteur à sa place attendu qu'il ne peut en aucune façon exécuter la promesse qu'il fit à cause de son peu d'expérience et bas âge ; on l'invite à continuer ses fonctions jusqu' au dimanche suivant, auquel jour la Communauté s'assemblera.
Un rapide coup d'œil dans les registres B.M.S. (22) nous a permis de comprendre les véritables raisons de la démission de Fabrègues : ce garçon en bas âge, né le 8 septembre 1748, allait tout de même sur les vingt-deux ans ; il s'était marié le 5 février 1768 (avec une certaine précipitation sans doute, puisqu'une petite Marie naquit à son foyer le 21, quinze jours plus tard). On imagine qu'au printemps de 1770, il y eut dans le logis du jeune Fabrègues des explications orageuses entre lui et son épouse au sujet de son emploi du temps qui le faisait découcher trois nuits par semaine et disparaître encore le dimanche pour la journée.
Nous lui pardonnerons volontiers sa démission.
Le dimanche 22 avril, le Conseil se réunit, destitue ledit Fabrègues et reçoit l'offre de Jean Gasc de remplir les fonctions de porteur suivant l'ancien usage qui consiste à aller à Chaury trois fois par semaine, dans la journée, sans aucune rétribution de la part de la Communauté, mais seulement d'un sol par lettre, sous le cautionnement de Raymond Noël, négociant. La soumission au greffe, pour une année seulement, a lieu le lendemain.
Voici le texte intégral du proposé et du délibéré du Conseil de la Communauté du 28 mai 1770 relatif à la demande d'ouverture d'un bureau de la poste aux lettres à Revel.
« La promptitude et la sûreté du commerce entre les différentes villes et provinces a été l'un des principaux objets que la Cour s'est proposée en établissant les bureaux des postes ; il est cependant encore plusieurs endroits qui ne participent qu'imparfaitement aux avantages de ces établissements.
Du nombre est la ville de Revel, considérable par le nombre de ses habitants qui monte à près de six mille personnes, par ses fabriques de petites étoffes et de bas, par le grand commerce qu'elle fait en grains de toute espèce, en bestiaux, tant avec les provinces voisines qu'avec l'étranger, même par trois foires annuelles et trois marchés chaque semaine, ce qui entretient une correspondance qui entraîne annuellement l'envoi ou la réception de plus de dix mille lettres qui la plupart roulent sur des paiements à faire ou à recevoir, éloignée de trois lieues du bureau le plus voisin établi à Castelnaudary, elle ne peut profiter des courriers qui y passent quatre fois la semaine qu'en confiant ses dépêches les plus intéressantes à des exprès ou des commissionnaires presque toujours négligents et inattentifs et souvent infidèles, en sorte qu'elles se trouvent tantôt retardées et arriérées et quelquefois même totalement égarées, ce qui n'a été malheureusement que trop souvent éprouvé ; elle partage ces désagréments meurtriers pour son commerce avec la ville de Puylaurens la plus considérable et la première du diocèse, avec celle de Sorèze qui ne l'est pas moins par le collège fameux que les Bénédictins de la congrégation de Saint Maur y ont ouvert depuis plusieurs années pour la jeune noblesse française et étrangère, et enfin avec plusieurs endroits commerçants du voisinage qui, comme elle, tirent leurs lettres de Castelnaudary, à l'exception de Puylaurens qui les tire une seule fois la semaine du bureau de Toulouse quoique plus éloigné que celui de Castelnaudary, en sorte que tout souffre également de la privation du bureau des postes en cette ville, et d'un messager, et sur l'exactitude et la fidélité duquel on puisse compter ; elle espère que, touchée de ces inconvénients, l'administration générale des Postes se déterminera d'autant plus volontiers à lui accorder un bureau que cet établissement évidemment nécessaire au public ne peut être à charge à la ferme des Postes ; un seul messager peut faire le service de Revel et de Sorèze, d'où tous les lieux circonvoisins pourront retirer leurs dépêches, et les affaires qui se font entre tous les lieux et Castelnaudary peuvent produire un fonds capable de dédommager l'administration générale des frais qu'exigera ce nouvel établissement, moyennant quoi, vu l'utilité des avantages de cet établissement, prie l'assemblée de délibérer.
Sur laquelle proposition, les voix recueillies, a été unanimement délibéré que l'assemblée prierait avec les plus vives instances l'administration générale d'ordonner l'établissement d'un Bureau des Postes à Revel, d'où le messager nommé puisse partir pour se rendre à Castelnaudary et y porter les dépêches le lundi, le mercredi el le vendredi à midi, et le dimanche à six heures du matin pour revenir le mardi, le jeudi et le samedi à midi, et le dimanche au soir en apportant les lettres et paquets tant pour Revel, Sorèze, Puylaurens que pour les lieux voisins, et ont signé. »
Nous noterons que le nombre de lettres circulant annuellement sur Revel, même s'il est exagéré - et nous le ramènerons à huit mille - représente quatre mille lettres â l'arrivée, donc remises et taxées ; soit pour le porteur 4000 sols ou deux cents livres ; le chiffre est alléchant et on ne s'étonnera pas de la facilité avec laquelle les édiles trouvent un volontaire ; par contre, le service est lourd, six demi-journées et une journée complète par semaine.
C'est peut-être ce calendrier surchargé qui a créé un malaise chez la plupart des conseillers politiques, à la séance du mardi 6 février 1770, parce qu'ils réalisaient que cette histoire de courrier n'intéressait que les gros négociants auxquels on ne faisait que trop de concessions.
Revel attendra encore un an avant d'avoir son directeur et son bureau.
Dans la deuxième moitié du XVIIIème siècle, la rénovation du réseau routier, sous l'énergique impulsion des Intendants de Montpellier qui reconstituent les voies anciennes et en font ouvrir de nouvelles, fait de Revel un gros bourg rural, avec foires et marchés bien achalandés .
En 1760, ont été terminées les routes de deuxième classe menant à Puylaurens et Lavaur, à Castres, et surtout à Castelnaudary en contournant Dreuilhe par l'Emmarse.
En 1770, on peut, par les routes de troisième classe, se rendre à Carcassonne en passant par Saissac, et à Toulouse par Caraman.
Les Postes françaises étaient exploitées depuis Paris par une Ferme générale, sorte d'établissement public à capitaux privés, sagement gérée par ses administrateurs et pressurée par le Trésor royal qui prélevait 90%, non des bénéfices, mais de la totalité des recettes.
La Ferme ouvrait dans les principales localités des établissements fixes, appelés Directions de la Poste aux lettres, chargés de centraliser, taxer, acheminer et remettre aux ayants droit les correspondances, ainsi que d'assurer les transferts de fonds entre les particuliers.
Sur le territoire de la Haute-Garonne actuelle, il y en avait six en 1704 et dix-huit en 1789.
Elle confiait ses transports à une filiale, la Poste aux chevaux. Ses relais, propriété des Maîtres de poste, étaient installés toutes les trois ou quatre lieues (de treize à dix-sept kilomètres) selon les difficultés du parcours, sur les grand'routes. Sur les autres routes et chemins, les liaisons étaient assurées par des courriers d'entreprise à cheval.
Les localités démunies d'un bureau de Poste aux lettres pouvaient se raccorder au réseau à leurs frais par des porteurs à pied ou à cheval allant au bureau le plus proche. C'était, depuis 1706, le cas de Revel dont le bureau d'attache était Castelnaudary.
En créant un nouveau bureau, la Ferme n'entendait pas se laisser enfermer dans les propositions ou les doléances des édiles de tel ou tel consulat. Son intérêt était de ne pas créer de liaisons nouvelles.
Elle autorisa donc la création d'une Direction à' Revel, sans modifier le rayon d'action desservi par le messager.
Selon l'Académie de philatélie, elle fut ouverte le premier juin 1771. Cette date peut être recoupée par une délibération du conseil de la Communauté de Revel du 24 juin 1771 au sujet du fonctionnement du courrier précisément ; en voici le proposé, écrit de la main de maître Raymond Bastoulh, avocat en parlement et procureur du roi à l'hôtel de ville et bureau de police.
« La jalousie de messieurs de Castelnaudary est insatiable ; ils font tout ce qu'ils peuvent pour tracasser notre commerce et gêner la bonne volonté de nos négociants ; ils font retarder nos lettres du Bas Languedoc le samedi et nous privent par conséquent de tous les avantages réels du commerce.
Cependant, telle n'est pas l'intention des Directeurs (24) puisque, pour nous favoriser, ils ont établi dans cette ville un bureau qui a ses règles fixes pour l'arrivée et le départ ; il convient donc, en maintenant nos droits, d'en porter nos plaintes pour faire cesser des pareils abus et écrire à M. Gest, contrôleur général des Postes, pour le prier d'en parler à M. Borrelly et lui donner les ordres les plus précis. »
Décidément, les relations avec Castelnaudary ne sont pas des meilleures.
Bureau de plein exercice, la Direction de Revel en exerçait toutes les attributions. Elle encaissait les recettes et adressait sa comptabilité directement au bureau comptier de la Ferme générale de Paris. Elle recevait aussi et fermait des paquets (dépêches) pour le bureau de Paris, évitant ainsi que le courrier de la capitale ou y transitant soit travaillé par des bureaux intermédiaires.
Le directeur avait reçu à la création du bureau une « commission » de la Ferme générale sur présentation ou après agrément du maire et des consuls, assistés des conseillers politiques, et après avoir fourni « bonnes et valables cautions ».
Dans les bureaux à faible trafic, le directeur était un homme-orchestre, effectuant toutes les opérations, y compris la remise du courrier au guichet de l'établissement qui fonctionnait à son domicile ou dans un local lui appartenant, et rares étaient les collectivités comme Revel qui consentaient à rétribuer un facteur.
Toutefois sa charge ne l'occupait pas en permanence. Il était rétribué à la remise, c'est-à-dire à deux sols par livre, soit 10% de la recette nette, constituée par la perception effective des taxes des correspondances délivrées et par les droits sur les envois de numéraires (un sol par livre partagé entre le directeur du bureau d'envoi et celui du bureau payeur).
Le premier directeur fut Jean André Brunet.
Ouverte le premier juin 1771, la direction de Revel fut confiée à Jean André Brunet, cautionné par François Filhol.
Né à Saint-Félix de Caraman vers 1733, il était déjà installé comme marchand épicier à Revel en 1757. Il y épousa le 13 février 1760 Élisabeth Pages, née en 1732, héritière de feu son père Mathieu, faiseur de bas au métier, et de son grand-père Jean, maitre-forgeron au faubourg de la porte de Castres, qui lui avaient laissé près d'un hectare de bonnes terres à la plaine du Laudot, une maison avec dépendances et jardin audit faubourg, et, à Vauré, une vigne et une terre. Élisabeth mourut à la naissance de leur troisième enfant, en 1763.
Tout au début de cette année 1763 qui verra la malheureuse disparition d'Élisabeth Pagès, Jean André Brunet avait eu l'honneur insigne d’ être choisi par ses pairs comme consul au second rang (celui des marchands).
Brunet, à une époque où l'absentéisme aux délibérations du Conseil de la Communauté était règle courante, présente un taux de fréquentation bien satisfaisant : il a signé vingt-quatre fois pour les trente-trois séances de l'année ; et encore faut-il l'excuser pour ses absences du 24 juillet, jour du décès de sa femme, et des séances suivantes où il eut sans doute d'autres soucis que le municipe. Il ne sera plus présent qu'une fois en novembre et s'il vint à la séance du 29 décembre, ce fut pour demander le règlement du compte détaillé de fournitures vendues par lui à la Communauté dans l'année courante, d'un montant de 86 livres 14 sols 6 deniers.
Un incident survient aux élections consulaires du premier janvier 1764 : les quatre nouveaux consuls refusent de prendre leur charge sous prétexte que les travaux communaux entrepris l'année précédente ne sont pas terminés ; ils ne veulent pas en assurer la responsabilité ; l'élection de 1763 est donc reconduite pour l'année 1764 ; Brunet y remplit ses fonctions honorablement avec vingt-cinq présences sur trente-six séances.
En 1765, il est élu d'office au Conseil politique comme second assesseur, en tant qu'ancien consul, coutume qui ressort moins de l'honorariat que du désir d'assurer, d'une année sur l'autre. une certaine continuité dans la gestion des affaires municipales. On l'y retrouve en 1766, année de son second mariage avec Anne Filhol.
Il est encore réélu comme consul en janvier 1768 et reprend sa toge (25) au deuxième rang. Le premier consul et maire est alors Abel de Portal de Saint Alby, seigneur de Lembreusse, dont il est le locataire au couvert de la volaille (actuellement au numéro 8 de la galerie du couchant ; la maison traverse sur la rue du Cap Martel au numéro 5, où se trouvaient les écuries).
Curieuse année d'administration municipale que cette année 1768 : le maire n'apparaît que deux fois aux délibérations ; peut-être a-t-il repris du service dans les armées du roi ; c'est Jean André Brunet qui préside les séances pendant les six premiers mois ; on ne le verra plus par la suite, les séances du second semestre étant présidées par Raymond Noël troisième consul.
À l'actif de Brunet, il faut signaler un fait qui marque une certaine fermeté de caractère : en 1761 et 1762, maître Paul Bernard Durand, le notaire, avait été premier consul ; pour des raisons de commodité personnelle sans doute, il avait déménagé tous les documents administratifs de l'hôtel de ville en son étude, au rez-de-chaussée de sa maison, sise rue Saint-Antoine (actuellement rue Marius Audouy). Les maires et consuls suivants avaient tenté en vain d'obtenir le retour de ces pièces à l'hôtel de ville ; le notaire , pour quelque obscure raison, en avait différé le transfert et son étude était devenue l'annexe obligée de l'hôtel de ville. Dès sa réélection en 1768. Brunet fait voter à l'universalité des voix la nomination d'un conseiller politique, député « pour retirer d'entre les mains de maître Bernard Durand tout et chacun les papiers, titres, documents, cadastres, brevettes et autres, et le cabinet (26) et coffre appartenant à la Communauté pour du tout en être fait un inventaire en double original, et le tout être remis au Sieur Aversenq, notre greffier. C'est ainsi que l'hôtel de ville retrouva ses archives.
A cette époque, le Bureau des Pauvres de Revel, en l'absence d'établissement hospitalier, gérait les fonds (allocations municipales mais surtout dons et legs particuliers) destinés à secourir à domicile les déshérités et les miséreux du consulat.
Le trésorier de ce Bureau est, jusqu'au printemps de 1764, François Filhol, marchand et notable de la ville (il fut conseiller politique en 1761) ; le 2 mai, il laisse la place à Jean André Brunet, peut-être pour le distraire de son veuvage, peut-être parce qu'on avait vu en lui des qualités et une expérience comptable qu'on tenait à utiliser.
Brunet reste à ce poste jusqu'au 4 novembre 1768, date à laquelle le Bureau arrête le compte de sa trésorerie.
Ainsi, Jean André Brunet était sans conteste l'un des notables de la ville.
Entre temps, il s'était remarié en 1766 avec Aime Filhol, la nièce de François Filhol.
A ce mariage était témoin Abel de Portal de Saint Alby, futur brigadier (27) des armées du Roy, chez qui, nous l'avons vu, il habitait et exerçait son commerce. Six enfants s'ajoutèrent au cours des années suivantes à la table de famille, de 1767 à 1778.
Brunet saisit toute occasion de gagner de l'argent en 1778, il enlève la soumission d'un marché assez important, la plantation des ormeaux aux embranchements (que nous appelons aujourd'hui le Tour de Ville).
La plantation porte sur 1160 arbres ; la délibération du conseil de la Communauté a lieu le 20 septembre 1778 ; les premières offres sont déposées le dimanche 4 octobre à 3 livres 15 sols pièce ; les dernières, le dimanche 29 novembre après-midi, et les moins dites s'arrêtent à 2 livres 8 sols, offre de Brunet.
L'avant-veille, il avait été décidé d'abattre les ormeaux de la promenade Notre-Dame (aujourd'hui place de la Mission) qui dépérissaient et mouraient, et risquaient ainsi de porter préjudice aux nouvelles plantations ; vingt-huit arbres sont ainsi vendus le dimanche 29 en six lots pour une somme globale de 357 livres, rentrée d'argent non négligeable dans la caisse du trésorier de la Communauté, toujours en manque de liquidités.
Le 8 décembre, il est décidé de procéder au règlement de l'avance du premier tiers au sieur Brunet, et pour cela, l'assemblée nomme et taxe, à défaut de prêteur, un certain nombre des plus forts et aisés contribuables pour la somme de 927 livres 16 sols (28) .
A partir de 1771, la direction de la Poste aux lettres fournit une ressource appréciable à ce père de famille besogneux, gérant les biens de ses enfants du premier mariage et exploitant son commerce ; quant aux fournitures à la Communauté et aux soumissions des travaux de celle-ci, il n'en a peut-être pas tiré toujours le bénéfice espéré.
L'organisation du bureau l'occupe ; le service postal est modifié au niveau de la distribution ; le courrier arrivant de Castelnaudary est maintenant déposé au Bureau par le porteur qui n'a plus à s'occuper de le distribuer, ni d'encaisser le port. Quelques bureaux importants, Toulouse, Castelnaudary, disposent certes de facteurs assermentés, rétribués par la Poste pour porter le courrier à domicile.
Ailleurs, les destinataires doivent le retirer au bureau qui les dessert. Encore faut-il que le citoyen ordinaire sache qu'une missive l'attend dans la boutique du directeur du Bureau de la poste.
Parfois, les municipalités rétribuent un auxiliaire. C'est le cas à Revel, épisodiquement, car le candidat est peu motivé.
Jacques Raimond, dit Lasserre, fut agréé le 25 juillet 1773, au traitement annuel de trente-cinq livres. L'inflation ayant porté le salaire du brassier à douze sols par jour, c'était l'équivalent d'environ trois heures de service à chaque arrivée de courrier.
Lasserre prêta, entre les mains des consuls, le serment de remplir ses fonctions en homme de bien, d'honneur et de probité. Jean André Brunet, le directeur, s'engagea à lui remettre toutes les lettres, les gazettes et les paquets arrivés à la poste pour être distribués de
suite aux habitants de cette ville.
À quelque temps de là, Lasserre remit sa démission, et en janvier 1783, après une longue vacance dont se plaignirent les commerçants, l'emploi fut attribué sur adjudication à Martin Durand, dit Terra, pour quarante livres.
Devant les consuls, il lève la main, jure à la passion figurée de Notre Seigneur d'exercer les fonctions de la charge en homme de bien et d'honneur et avec toute la circonspection possible.
Le subdélégué de l'Intendant à Lavaur ayant oublié d'autoriser la dépense, une délibération régularisa sa situation au mois d'octobre.
Le directeur n'allait pas profiter longtemps des services de son facteur distributeur.
En 1783, Jean André Brunet jouissait auprès des édiles et du public d'une certaine notoriété. On pouvait penser qu'il était dans l'aisance, ce n'était qu'une façade ; par acte notarié du 8 janvier 1783, il était devenu le détenteur des biens fonds des Pagès appartenant à ses enfants du premier lit ; cette couverture foncière ne suffira pas à régulariser sa situation.
Il avait puisé largement dans les finances postales pour sauver les apparences et achalander son commerce.
Ce faisant, il était devenu un directeur infidèle.
Le 30 octobre de cette même année, le régisseur général des Postes et Messageries de France émit à son encontre une contrainte pour le recouvrement d'une somme de 3078 livres 12 sols et 9 deniers, ainsi que de la recette effectuée depuis le premier juillet. Il désigna Pierre Michel Borrelly, directeur de la Poste à Castelnaudary, pour diligenter les procédures.
La somme était importante. La recette des quatre mois échus (de juillet à octobre) n'apparaît pas ; on peut cependant l'évaluer assez précisément, par rapport à des recettes connues, à près de 1000 livres. L'on atteint au total 4000 livres.
Il est difficile d'évaluer l'équivalent de cette somme selon nos critères actuels, tant ont évolué les conditions économiques et sociales qui déterminent le pouvoir d'achat de la monnaie.
Un manouvrier, un brassier, le smicard de 1783, gagnait seize sols par jour ouvrable, soit 240 livres par an : le trou dans la caisse de la Poste représentait tout de même seize à dix-sept ans de salaire minimum 1783, aussi modeste fût-il.
Le convertir en francs actuels (un million trois cents mille francs, soit deux cents mille euros) ne signifierait pas grand-chose.
Néanmoins, la somme est de celles qu'un fonctionnaire moyen ou un petit commerçant n'est pas en mesure de rassembler rapidement en gageant ses biens propres.
On comprend mal le mécanisme de ces détournements ; le procédé classique appelé cavalerie boule-de-neige permet de dissimuler des déficits croissants jusqu'au moment où la trésorerie de l'établissement ne peut plus les couvrir.
Or, la comptabilité de la direction du bureau comportait deux butoirs :
chaque quinzaine, l'envoi des deniers perçus au caissier général de la poste à Paris ;
chaque quartier (trimestre), le solde des comptes.
Brunet dut recourir à d'autres artifices ; il profita aussi des retards apportés à la vérification de la comptabilité des petits bureaux.
Il ne sied pas de rêver pour expliquer des faits dont la logique et l'enchaînement nous échappent.
Le directeur de Castelnaudary ne traîna pas.
Le 10 novembre, il avait élu domicile pour la journée chez maître Antoine Lambrigot, huissier à Revel. Celui-ci intimait la contrainte à Jean André Brunet et à François Filhol, sa caution (et l'oncle de sa deuxième femme), leur faisant commandement « de payer dans le jour », sous peine d'y être contraints « par voyes accoutumées pour les deniers et affaires de Sa Majesté ». Le tout fut effectué « parlant à la personne du sieur Brunet », etc. etc.
Il leur était difficile d'obtempérer.
Le lendemain, le directeur Borrelly élut de nouveau domicile pour la journée à Revel, mais cette fois chez Jacques Maraval, premier huissier audiencier. Celui-ci s'était fait accompagner de Jean Bounet et de François Augé « pris pour son assistance et main-forte » pour se transporter avant midi à la maison et résidence de Brunet.
L'intéressé avait disparu. Il s'était probablement mis au vert, avec sa famille, du côté du faubourg de Castres.
Deux voisins, requis d'assister comme témoins à la procédure, s'y refusèrent et ne voulurent point décliner leur identité, nom ni surnom.
L'huissier fit commandement itératif « en parlant à la fille du sieur Brunet, qui a répondu que son père était absent. Ce qu'ayant pris pour refus de payement, j'ai pris, saisi et mis sous la main du roi et de la justice, premièrement ... » (suit l'inventaire.)
La saisie mobilière dénote qu'à l'origine, le fonds de commerce fut bien achalandé.
La boutique, au rez-de-chaussée, abrite trois activités, distinctes dans leur objet, réunies dans le même local. La poste paraît accessoire. La fille de Brunet est titulaire d'une commission personnelle (une licence) pour la vente du tabac et du sel.
L'essentiel de ce bazar est constitué d'un magasin polyvalent, à la fois épicerie, droguerie, herboristerie. On y trouve des fromages, du riz, de l'huile d'olive, du sénevé (moutarde), des bouteilles de liqueurs, et aussi de la rhubarbe, de la salsepareille, et encore du savon blanc, de l'amidon en grains, de la laque, de la litharge, de l'alun, de la terre d'ambre, de la manne (résine), des cierges de cire, des chandelles de suif, de l'huile pour lampe.
Mais chacun des articles est en petite quantité, indice d'une situation financière difficile lors de l'évaluation.
L'appartement des Brunet est dans la partie arrière de l'étage, celui de noble Abel de Portal sur la façade. Si l'on avait oublié qu'il abrite une dizaine de personnes, il paraîtrait confortablement meublé et largement équipé en pièces de meubles, lingerie, vaisselle et matériels divers. Les trois lits sont décrits avec leurs paillassières (sommiers), leurs couettes et coussins couty (matelas et traversins) remplis de quarante livres de plumes dans le grand lit à baldaquin, et de trente-cinq et trente livres dans les deux autres.
Dans le tiroir-caisse de la poste, il restait trois livres et douze sols.
La fille sauva sa régie de sel et tabac et obtint quelques meubles, prévus par la loi en pareil cas.
L'huissier était fort embarrassé pour faire transporter tout le reste en lieu sûr dans quelque entrepôt. Il se trouva fort aise d'agréer la proposition d'un voisin solvable, le nommé Bacou, qui s'offrit comme gardien des biens saisis.
Copie du procès-verbal fut baillée au sieur Bacou, « ainsi qu'au sieur Brunet, afin qu'il ne l'ignore, parlant à sa fille ».
En cas d'insolvabilité, Brunet s'exposait aux galères.
Il lui restait, de sa première femme, des biens immeubles ; il fut cependant déclaré en faillite, ainsi que sa caution, le sieur Filhol, l'oncle de sa femme. La famille fut mise à la ruine et vécut quelque temps dans la plus grande misère.
Anne Filhol, la femme de Jean André Brunet, mourut à Revel l'année suivante, le 16 décembre 1784. Jean André Brunet mourut aussi à Revel, le 10 novembre 1788.
L'aîné des garçons, qui était entré au séminaire, sera curé de Vauré, puis de Dreuilhe au début de la Révolution ; les deux autres, d'abord apprentis, l'un orfèvre, l'autre tanneur, feront ensuite une belle carrière dans les armées de la Révolution et de l'Empire ; l'une des filles épouse à Dreuilhe, en 1790, par devant son frère le curé, le sieur Rivenc, un chirurgien de Villespy (Aude) ; elle meurt dans l'année ; la plus jeune, restée célibataire, rejoindra son frère aîné le curé, après le Concordat, dans sa nouvelle cure de Saint-Julia.
Paul Borrelly est né le 11 novembre 1752 à Castelnaudary ; il est le jeune frère de Pierre Michel Borrelly, directeur de la poste dans cette ville, où il a succédé à leur père Henry.
Les fils Borrelly appartiennent à une famille aisée de la bourgeoisie chaurienne.
Leur grand-père paternel, négociant épicier à la fin du XVII' siècle, a laissé le souvenir d'une moutarde de sa fabrication qui eut un certain succès.
Leur père, Henry (1714-1789), avait épousé Anne Périès, sœur de Jean Péries qui sera consul de Castelnaudary vers 1750. Ce Jean était lui-même marié avec Anne Borrelly, sœur d'Henry et l'un de leurs fils, Jacques Périès (1736-1797) sera représentant du peuple à la Convention, puis membre du Conseil des Cinq-Cents. Ce double cousinage entre les enfants Périès et Borrelly se révèlera, nous le verrons, bien utile un jour.
Pierre Michel, l'aîné des garçons, directeur de la poste après son père et marchand droguiste dans le quartier Sainte-Croix est un notable sur la place de Castelnaudary ; il figurera sur les registres de 1813 dans la liste des cent contribuables les plus imposés de la ville.
Son jeune frère, Paul, est nommé directeur du bureau de poste de Revel le 16 octobre 1783, donc plus de trois semaines avant la saisie mobilière des biens de Jean André Brunet, dont la révocation fut sans doute concomitante.
Pierre Michel, si diligent pour régler la situation de Brunet, ne fut pas étranger à cette nomination ; Revel n'est point si loin de Castelnaudary ; trois lieues ne distendent pas les liens de la famille ; et les affaires ne pouvaient qu'en tirer profit, par l'ouverture d'un nouveau point de vente après la liquidation du magasin similaire de Brunet.
Ci-contre, Pierre François Billard, nommé caissier général des Postes en 1757, jouit d'une grande réputation de piété et c'est à la surprise générale qu'on découvre en 1769 que ce dévot cache un affairiste qui couvre ses banqueroutes en puisant dans la caisse des postes. Il aurait détourné cinq millions de livres. La peine fut légère, mais il était banni du royaume à perpétuité. Revel avait à cette époque un pilori semblable à celui de cette gravure, situé au découvert de la place, en face de l'actuelle pharmacie Boyer. La faillite de Brunet en 1783, à l'instar des prévarications de P.F. Billard, entraîna-t-elle pour notre malheureux premier directeur de la poste aux lettres sa mise au pilori pendant deux heures, un samedi matin, jour de grand marché, comme aurait pu le décider notre juge royal ? On ne sait. (Documents reproduits par Flohic, in Le Patrimoine de la Poste.) |
Ci-dessus, une session de tribunal au XVIème siècle. Trois messagers de justice vont porter à qui de droit les décisions du tribunal, dont le sceau est pendant ; ils sont armés d'une pique sur l'épaule et d'un sabre au flanc gauche ; ils portent sur la poitrine un écusson, signe distinctif aux armes de la ville. |
Ils ont mérité un timbre ... Fouquet de la Varane - Le règne d' Henri IV marque une étape dans l'évolution de la poste.
|
Louvois - François Michel Le Tellier, seigneur de Chaville, marquis de Louvois (1639-1691), commence en 1661 - il était alors ministre de la Guerre – à surveiller le service des Postes mal géré par Jérosme de Nouveau (voir ci-dessous Louis XI et l'édit du Luxies). De Nouveau meurt en 1665, ce qui lui évite des poursuites pour des manœuvres frauduleuses frisant l'indélicatesse. Louvois rachète la charge d'intendant général des Postes en 1668. |
Choiseul - En 1758, Louis XV donne à Étienne François de Stainville (17191785), son ambassadeur à Vienne qu'il vient de faire duc de Choiseul, le portefeuille des Affaires étrangères et trois autres portefeuilles : les Postes (1760), la guerre (janvier 1761) et la Marine (octobre 1761). Il sera ministre jusqu'en 1770, puis disgracié. |
Louis XI mérite t-il son timbre au titre de la poste ? Cet édit, dont la promulgation par le roi Louis XI est datée du 19 juin 1464, décrit en vingt-huit articles une parfaite organisation de la poste aux chevaux. Et on a longtemps donné à ce roi la paternité de la fondation de cette poste. |
Voici la copie de la commission donnée le 16 octobre 1783 à Paul Borrelly pour faire la direction du bureau de Revel.
Je soussigné, régisseur général des Postes et Messageries de France, ai commis et commets par cette présente la personne du sieur Borrelly à la place du sieur Brunet révoqué pour faire la direction et recette des droits, revenus et émoluments des ports de lettres et paquets de lettres, tant de France que des pays étrangers, tombant dans le bureau de Revel et lieux qui en dépendent, et ce, à commencer du jour de son installation, pour et si longtemps qu'il me plaira à la charge pour ledit Directeur de tenir bon et fidèle registre, dans lequel il insérera journellement tous les envois de lettres qu'il fera et recevra jour par jour ; et de compter de clerc à maître du produit, tant de son bureau que de ceux qui en dépendent, toutes fois et quantes il sera requis, et d'envoyer les deniers à Paris à M. Gauthier, Caissier général des Postes et non à d'autres, tous les quinze jours, et de solder lesdits comptes à la fin de chaque quartier (trimestre), même de payer et acquitter les billets et lettres de change que ledit sieur Gauthier pourra tirer sur lui à bon compte de sa recette, à quoi il demeurera obligé comme pour les propres deniers et affaires du roi, et à l'égard des lettres de change qu'il remettra audit bureau de Paris il sera tenu de les faire faire, ou endosser payables à M Gauthier, ou ordre, valeur reçue du directeur en compte des postes.
Observera que lesdites lettres de change soient à courts jours, sinon on les lui renverra à ses risques. Sur lequel produit ledit sieur Borrelly retiendra par ses mains la somme de deux sols pour livre (10%) du net de la recette pour appointements, frais de régie et loyer du bureau par chacun distribué en quatre quartiers.
Plus, ledit directeur sera tenu de faire faire une prompte et exacte distribution des lettres et paquets de lettres tombant dans son bureau, et fera partir les courriers exactement aux heures marquées, afin qu'il n'y ait aucun retardement, et que le service du roi et du public soit fait avec toute la fidélité et la diligence requises, observant de faire rendre ponctuellement à l'arrivée des courriers les lettres contresignées de nos seigneurs les ministres et secrétaires d'état, souffrir les visites des contrôleurs provinciaux qui seront nommés à cet effet, et autres personnes qui en auront charge et pouvoir de moi soussigné, leur donner pleine et entière connaissance de tout ce qui concerne ledit bureau et dépendances, et se conduire et comporter en ladite fonction avec zèle et affection, et fournir caution solvable avant de s'en mettre en possession, lequel cautionnement subsistera tant que ledit directeur fera la régie dudit bureau, nonobstant les changement, de baux qu'il pourrait y avoir.
En foi de quoi, j'ai signé la présente.
A Paris, au bureau général des Postes, le seizième jour d'octobre mil sept cent quatre vingt trois.
Vu par nous, Grand'Croix, Prévôt, Maître des Cérémonies de l' Ordre Royal et Militaire de Saint-Louis, Intendant Général des Postes, Relais et Messageries de France.
A Paris, le 16 octobre 1783
Ce document, quoique long et d'une lecture ingrate, fournit assez de renseignements sur l'organisation de la poste en France, ainsi que sur les prérogatives et obligations des directeurs de la Poste aux lettres à la fin de l'Ancien Régime.
La date de la prise de service n'est pas indiquée ; elle était subordonnée à l'établissement préalable d'un cautionnement fixé, pour les recettes simples de même catégorie que Revel, à 10% de la recette nette de l'année précédent la nomination, soit l'équivalent des émoluments de la première année de service.
Une note manuscrite, anonyme, indique : M Borrelly a été nommé directeur à Revel au commencement de novembre 1783, et chargé de la recette des deux derniers mois de la dicte année. Elle semble répondre à une lettre de Borrelly du 5 septembre 1785, concernant une rectification comptable portant sur les débuts de son service.
Paul Borrelly vient d'avoir trente et un ans lorsqu'il arrive à Revel. C'est pour lui l'installation définitive.
Il achète une maison, rue de Castres (aujourd'hui, rue Victor Hugo, n° 2), à deux pas de la place centrale.
Le comptoir du bureau des lettres jouxte le comptoir de l'épicerie ; il y a moins de place que chez Brunet ; cela ne gêne personne ; on sait vivre à l'étroit.
L'emploi de facteur, que tenait Martin Durand dit Terra à l'arrivée de Paul Borrelly, devenant plus tard vacant, un nommé Blanfort sera agréé le 15 mai 1786.
C'est dans ce cadre que Paul Borrelly va fonder une nombreuse famille.
D'un premier mariage avec Marianne Rivent, une Revéloise, il a sept enfants : l'aîné, Henry, est né le 29 mars 1785 ; la benjamine, Henriette, née le 10 août 1797, coûtera la vie à sa maman. Désarroi de ce père de famille nombreuse !
Sur ces entrefaites, Jean François Cazeaux, chef du bureau des impositions du district depuis 1792, décède à l'âge de quarante-six ans.
Les familles Borrelly et Cazeaux sympathisent, surtout depuis que leurs deux chefs, lors de la réaction thermidorienne, avaient été assignés à résidence, puis incarcérés à Toulouse pendant l'été de 1795.
Cazeaux laisse une jeune veuve, Marie Barthes ; Paul Borrelly l'épousera et en aura deux filles : Adèle, le 2 septembre 1800 et Jacquette, le 4 septembre 1802.
À son arrivée à Revel, la tradition et l'expérience familiales prédisposaient Paul Borrelly au commerce d'épicerie. Sur les registres, il figure sous la profession de marchand ou marchand-épicier. Il appartient à cette catégorie sociale qui produit ou fabrique tout ou partie des produits dont elle assure la commercialisation. L'entreprise est familiale. Les deux fils, Henry et Louis, la poursuivront quand leur père se sera dégagé de la poste et des affaires.
Quand advint la Révolution, Paul Borrelly prêta, en leur temps, les serments que le nouveau régime exigeait des citoyens-serviteurs de la nation :
- le serment civique de fidélité à la loi et au roi (loi du 14 décembre 1789), le dernier sans doute qui fut prêté « la main levée à la passion figurée de Notre Seigneur Jésus Christ », c'est-à-dire sur le crucifix accroché au mur de la salle des réunions de l'hôtel de ville ; le serment professionnel que, depuis la loi du 20 août 1790, les postiers doivent prêter lors de leur entrée en fonction ;
- et, de par la loi du 14 juillet 1792, le serment d'être au service de la Nation et de maintenir la liberté et l'égalité, ou de mourir en la défendant, serment prêté le 23 octobre 1792, an premier de la République française.
Entre temps, le 26 septembre 1792, la Convention avait soumis la nomination des directeurs à l'élection par le peuple. La mesure suscita des oppositions de l'administration, et traîna en longueur jusqu'à ce qu'un accord se fût réalisé sur un simple agrément par le corps municipal,
- en vertu de quoi Borrelly se présenta devant le conseil le 26 thermidor an II (13 août 1794), fut agréé, et jura de maintenir la liberté et l'égalité, et la République une et indivisible (sans obligation de mourir).
Le facteur Blanfort ayant démissionné de son emploi , la municipalité de Revel voulut continuer de rétribuer un auxiliaire pour porter le courrier à domicile. Le nommé Philippe Tzar, dit Mirabal, sacristain de son état, se porta candidat ; recruté le 9 décembre 1790, aux appointements de 60 livres, il tint l'emploi pendant six mois jusqu'en juillet 1791, date à laquelle le directeur demanda son licenciement pour malversations et détournement des fonds de la nation ; Philippe Izar reconnaît en effet avoir pris certaines choses pour la somme de trente-huit livres et quelques sous, étant en besoin de quelque peu de marchandise, ce qu'il appelle un petit larcin ; cet euphémisme recouvre tout de même l'équivalent de sept à huit mois de son salaire, ou en termes d'aujourd’hui dans les vingt mille francs.
Philippe Izar prit très mal cette sanction ; nous en reparlerons quelques lignes plus loin.
Léodère Gery ne signale pas cet épisode dans sa monographie ; par contre, il fait de grands éloges de Philippe Izar ; sa maison servit de refuge pendant la tourmente aux membres du clergé réfractaire et, à l'occasion, de lieu de culte ; redevenu sacristain avec le Concordat, il le resta jusqu'à sa mort en 1836.
Le 13 septembre 1791, le trésorier du bureau municipal rend ses comptes au conseil et donne lecture de la réclamation de monsieur Borrelly ( sic, il deviendra citoyen dans peu de temps) en paiement de la somme de 619 livres 9 sols 6 deniers pour port de lettres, chandelles, etc. suivant son compte, lequel compte est approuvé et le trésorier prié de le solder.
Le 10 janvier 1792, à la suite de l'application de la loi du premier veto contre les prêtres réfractaires, Borrelly intervient pour calmer les esprits dans une dispute qui oppose les partisans et les détracteurs du vicaire Auriol que l'on veut expulser de Revel où il sème le trouble
et l'agitation.
Le 16 mars 1792, Mary, officier municipal, considérant qu'il n'y a pas de distributeur de lettres dans cette municipalité, propose la candidature du sieur Tassin, laquelle est retenue par le conseil, après audition du procureur de la commune, avec promesse de le faire jouir des émoluments attachés à cette fonction, à la charge pour lui de se faire agréer par le directeur de la poste aux lettres.
Après la chute de Robespierre (juillet 1794), la réaction au régime de la Terreur se fit violente dans le midi toulousain, sous le nom de Terreur Blanche ; à Revel, ex-Commune montagnarde, l'équipe jacobine en subit les effets : le 20 messidor an IlI (8 juillet 1795), quatre Revélois suspects d'incivisme furent assignés à résidence par la municipalité avec double surveillance exercée à leurs frais par la garde nationale pour la commune, et par la gendarmerie pour l'ordre public.
Paul Borrelly en était, poursuivi par la rancune de l'ancien facteur Izar, dit Mirabal, qui le dénonçait pour se venger de sa révocation ; avec lui, le percepteur Cazeaux, ami de Paul, Jean Antoine Guillaume Marie Durand, notaire et officier municipal, préposé aux transports militaires depuis le mois de mars, et enfin le nommé Viguier, lui aussi officier municipal.
Par mesure conservatoire, la municipalité avait bloqué le courrier.
Le 29 messidor (17 juillet), elle désigna les citoyens Molles et Barrau pour ouvrir les paquets (les dépêches).
Le même jour, en séance du Conseil municipal, il est fait lecture d'une lettre des administrateurs du district de Revel qui dit « que l'inspecteur des Postes des départements de Gers et Haute Garonne ... écrit de pourvoir sans délai au remplacement du citoyen Borrelly directeur, par la présentation de trois candidats.
Le Conseil, après avoir pris connaissance de la loy du 29 brumaire dernier, délibère qu'il sera désigné de suite au scrutin les trois candidats demandés par l'administration du district ... Le citoyen Gouttes Maury réunit seize voix, Sarrat Minimus six, Arnaud Julien cinq ; le district est avisé de cette élection. »
Le directeur général de la Poste à Toulouse ignora ou voulut bien ignorer la présentation faite par le Conseil municipal de Revel et envoya son contrôleur Cambon pour faire fonctionner le bureau. Il estimait sans doute que l'on ne peut en confier la direction qu'à un postier.
Le conventionnel Jacques Périès, le cousin germain de Paul Borrelly, était intervenu dès qu'il avait été informé de l'affaire.
Le 4 thermidor (22 juillet), le Comité de Sûreté générale de Paris arrêta que « ledit Borrelly ne sera plus sous la surveillance des gardes nationaux qu'on lui a donnés », arrête de plus « que les gendarmes ne seront point à sa solde pour le service qu'ils ont fait chez lui. »
Entre temps, les suspects avaient été transportés dans la maison d'arrêt de Toulouse. Un nouvel arrêté du Comité de Sûreté générale décida leur mise en liberté le 25 thermidor (12 août). Le 5 fructidor (22 août), la municipalité, n'ayant pas encore eu connaissance de cet arrêté, intervint encore en leur faveur. Libéré, Borrelly se présenta devant elle et fut confirmé dans ses fonctions de directeur des postes le 9 fructidor (26 août).
Ce n'était pas suffisant. Il fallait obtenir le retour à Toulouse de Cambon qui s'accrochait à son nouveau mais provisoire poste. Périès s'y employa auprès du Comité des Postes et Messageries de la Convention. De son côté, l'intéressé sollicitait sa réintégration officielle.
L'administration générale des Postes et Messageries lui donna satisfaction par arrêté du 2 vendémiaire an IV (24 septembre 1795) qu'elle lui notifia trois jours plus tard avec ce commentaire : « vu que vous avez été jugé par le représentant du peuple être exempt des reproches qui avaient été le motif de votre destitution, ainsi vous pouvez regarder comme non avenue toute disposition contraire à cet arrêté. »
La révolution allait sur sa fin ; une nouvelle constitution venait d'être proclamée le 23 septembre : un Directoire assurait désormais le pouvoir exécutif.
La Direction de la Poste aux lettres de Revel reste une direction simple, dont le directeur ne dispose statutairement d'aucun assistant, ne serait-ce que pour porter le courrier à domicile ; celui-ci reste quérable au siège de l'établissement.
Son trafic s'est accru fortement dès le début de la Révolution. Les idées fermentent dans des cerveaux qui s'emploient à les diffuser par l'écrit ; le législateur et les services de l'exécutif deviennent prolixes ; feuillets, libelles, mémoires prolifèrent ; la presse se répand.
Une innovation : le courrier familial ; quasi inexistant auparavant, il passe dans les mœurs avec l'éloignement de ceux qui servent aux armées.
Avec Saint-Gaudens, le bureau de Revel est le plus important des bureaux du département, si l'on excepte Toulouse qui les dépasse largement.
Le deux août 1811, une délibération du conseil national de la Poste fixe les appointements des directeurs : Toulouse, seul à traitement fixe, est doté de 3800 F.
Revel, appointé à la remise, reçoit 1182,62 F.
Saint-Gaudens, dans les mêmes conditions, le talonne avec 1169,69 F. Au bas de l'échelle, Caraman et Saint-Lys ont un forfait de 300 F.
De 1793 à 1795, des patriotes s'offusquèrent de ce que le nom de Revel (en occitan « rei bel », le roi beau) évoquait le monarque aimable, fastueux ou imposant qui avait décidé la construction de la bastide. C'est à cette époque que l'on appela notre cité Commune Montagnarde.
La poste ne changea pas son cachet d'identification ; l'administration centrale venait en effet de remplacer, à ses frais, les anciens tampons que les directeurs avaient confectionnés selon leur fantaisie et à leurs dépens ; c'est pourquoi philatélistes et marcophiles recherchent vainement aujourd'hui un cachet autre que celui, d'un modèle uniforme pour tous les bureaux, mis en service le premier janvier 1792, portant sur deux lignes le nom de Revel et le numéro 30 attribué au département ; nous ne deviendrons "REVEL 31" qu'en 1860, après l'achat de la Savoie et du comté de Nice par Napoléon III , « ALPES MARITIMES » faisant alors reculer notre « HAUTE-GARONNE » d'un rang.
Paul Borrelly, directeur de la poste, commerçant épicier, père de famille nombreuse, mène désormais une vie sans histoire.
Le premier messidor an IV (19 juin 1796) , l'agence nationale des postes lui notifie un redressement comptable de 276 livres 13 sols 3 deniers, portant sur 1793 et l'an II. Bien que la somme soit très supérieure au montant de la remise d'un trimestre, il ne lui est accordé aucun délai pour se libérer : il devra procéder par retour du courrier. « Nous vous invitons à la verser au reçu de la présente, soit dans la caisse du receveur de votre district, si elle est encore ouverte, soit dans celle du receveur du département. Dans l'un comme dans l'autre cas, le versement devra être fait avant le 10 messidor courant. Ensuite, vous nous ferez, par un chargement à l'adresse du citoyen Michel, caissier de l'arriéré des postes, l'envoi du récépissé qui vous aura été délivré. Salut et fraternité! »
Ce document, retrouvé dans les archives de la famille, montre, s'il en était besoin, la grande rigueur qui présidait au fonctionnement de l'administration des postes.
La poste occupe maintenant davantage Paul Borrelly. En atteste la progression de son chiffre d'affaires qui atteint cinq mille francs par an ; le premier prairial an VI (20 juin 1798), l'administration postale prend à sa charge la nomination et le traitement d'un facteur (ou
de plusieurs) pour les bureaux dont le revenu dépasse deux mille francs ; l'emploi de facteur échappe ainsi à la précarité du recrutement communal ; bien qu'il soit celui d'un auxiliaire à temps incomplet, il procure la stabilité et une rémunération attractive : cent cinquante livres, alors qu'en 1790, la commune n'en offrait que soixante.
C'est aussi une bonne opération pour la poste : la diminution du courrier non retiré fait entrer davantage de taxes dans la caisse ; nous connaissons par exemple le compte du premier quartier [trimestre] de 1809 (dix ans plus tard) : la recette de 2809,02 francs n'a été affectée que de 36,20 francs de non-valeurs au titre du courrier renvoyé à Paris pour être versé aux rebuts, sensiblement 1,5%.
Autre indice : en 1799, le cautionnement du bureau a été fixé à 3000 francs en biens fonds. Laurens Massia, négociant, s'est constitué caution et répondant de Borrelly jusqu'à concurrence de cette somme.
Selon l'acte passé le premier thermidor an VII (19 juillet 1799) en l'étude de maître Durand, notaire à Revel, enregistré à Paris par le notaire de la poste le 4 frimaire an VIII (25 novembre 1799), il a hypothéqué à cet effet des prés et des champs situés à Vauré, d'une valeur de 7200 francs et une maison dans le centre ville valant 7250 francs.
L'inflation des opérations postales n'empêche pas Paul Borrelly de solliciter et d'obtenir en 1807 le poste de receveur-buraliste pour la recette des droits de la régie et faire les inventaires des vins des communes de Revel et de Roumens, après avoir prêté serment le 30 janvier devant le juge de paix.
Démissionnaire le 27 décembre 1811, il propose son fils aîné Henry. Celui-ci est débitant de tabac de 1812 à 1821 ; il a dû verser une caution en liquide de 450 francs qu'il récupérera après avoir résilié sa commission. Ainsi peut-on dans la famille Borrelly glisser de l'épicerie à la fonction publique, section Finances, sous-section Indirectes.
Les archives pieusement conservées par sa famille nous ont permis de connaître les comptes du bureau de Revel de l'an VII (du 22 septembre 1798 au 21 septembre 1799) à l'année 1815 ; avant la Révolution, Paul Borrelly percevait une remise de 10% sur le produit des affranchissements encaissés ; par délibération de l'administration des postes du 6 brumaire de l'an VII, la remise était portée à 7/40 (soit 17,5%) du produit en premier net (29) pour les 4000 premiers francs (ou livres) et 3/40 (soit 7,5%) sur la somme qui excéderait.
La rétribution ( ou remise) de Paul Borrelly varia ainsi de 870,65 F en l'an VIII (son traitement minimum) à 1412,71 F en 1815 (maximum pour cette période). On peut penser que sous la Restauration, elle évolua régulièrement à la hausse à partir de 1500 francs, par le seul fait du gonflement des opérations postales.
L'époque napoléonienne a été l'occasion du développement de la poste militaire, mais sur le territoire de la nation, l'empereur utilisait les services des Postes et Messageries ; le document qui suit montre l'extrême minutie de l'organisation impériale dans un événement où Revel se trouva impliqué, si toutefois il fut donné suite à ce courrier.
L'empereur ou son représentant à Paris était relié chaque jour aux points les plus éloignés de l'Empire et aux états-majors des armées en opération par des courriers rapides, appelés estafettes, assurés soit par porteur spécial, soit plus généralement par des postillons des relais successifs.
Leur diligence était vérifiée au moyen d'un livret indiquant à chaque relais l'heure d'arrivée et l'heure de départ. Les plis étaient enfermés dans un portefeuille, dont seuls l'expéditeur et le destinataire avaient une clé, lui-même roulé dans une couverture pour être porté plus commodément en croupe : c'était le portemanteau.
À l'occasion de la bataille de Toulouse des 10 et 11 avril 1814, l'estafette de l'armée du maréchal Soult fut déviée par Revel.
Les coalisés ayant coupé la route directe au niveau de la Croix-Daurade, l'estafette fut acheminée par Castelnaudary, Revel et Caussade, sur Paris.
Comme il n'y avait pas de maître de poste ni de relais à Revel, le maire reçut les instructions détaillées, reproduites ci-après, pour le bon déroulement du service improvisé.
« Quartier général à Toulouse, le 10 avril 1814
Le directeur en chef des estafettes de l'armée à monsieur le maire de Revel
Monsieur le maire,
D'après les ordres de Son Excellence le Maréchal duc de Dalmatie, en date du 8 de ce mois, et dont j'ai l'honneur de vous transmettre copie, l'estafette du quartier général sur Paris doit être dirigée de Toulouse par Castelnaudary, Puylaurens, Castres, Alby pour aller rejoindre Caussade, sur la route ordinaire de Paris, et de là suivre sa destination. Comme la distance de Castelnaudary à Puylaurens est trop longue pour pouvoir être parcourue par le même postillon et le même cheval, je vous invite, Monsieur le maire, à vouloir bien, au reçu de la présente, requérir un cheval et un postillon sûr que vous chargerez du portemanteau de l'estafette qui vous sera remis par le postillon de Castelnaudary et que vous dirigerez sur Puylaurens où il y a un relais d'estafette établi depuis peu.
Vous sentez, Monsieur le maire, de quelle importance sont les dépêches qui vous seront remises et je pense qu'il est inutile de chercher à stimuler votre zèle en cette circonstance.
Je vous prie de vouloir bien, en m'accusant réception de la présente, me mander quelles sont les distances, réduites en lieues de poste qui existent entre Revel et Puylaurens, et entre Revel et Castelnaudary, afin que je puisse faire parvenir les jours alloués pour le salaire de l'homme à qui vous confierez le portemanteau et pour le prix du cheval. Il est accordé par l'administration des Postes trois livres par poste, savoir une livre (30) cinquante centimes pour le postillon et autant pour le cheval. Ainsi à commencer l'expédition de ce jour, il vous sera dû une somme réglée sur cette base pour la course que vous aurez fait faire de Revel à Puylaurens.
Lorsque vous recevrez des dépêches venant de Puylaurens, la course à régler sera comptée de Revel à Castelnaudary. Vous observerez, Monsieur le maire, que le portemanteau qui vous sera remis est accompagné d'un petit livret que l'on nomme « part » sur lequel sont portés dans une case à gauche les noms des relais à parcourir et dans une case à droite des blancs qui doivent être remplis par la personne chargée de recevoir le portemanteau à chaque relais, du jour et de l'heure auxquels le portemanteau lui est remis.
J'attends de vous, Monsieur le maire, une prompte réponse et je ne doute pas des soins que vous allez apporter à l'exécution du service dont je viens d'avoir l'honneur de vous indiquer la marche. Si néanmoins vous éprouviez quelques difficultés et si vous aviez besoin de renseignements, vous pouvez compter sur mon empressement à tâcher de lever les uns et à vous procurer les autres (31) . »
Au sujet de la transmission des nouvelles, on voit ici la supériorité de l'estafette sur le courrier postal. Pour une distance comparable entre Paris et Toulouse, la poste effectuait le trajet en cinq jours ; il fallait moins de temps à l'estafette pour l'aller et le retour.
Le 24 décembre 1815, Tabareau, inspecteur des postes à Toulouse, que sa santé immobilise au chef-lieu, charge Paul Borrelly d'installer avant le 31, à la direction de Puylaurens, dans le Tarn, monsieur Matabiou pour remplacer madame Coste. Le nouveau directeur est à son premier poste. Dans sa lettre, l'inspecteur recommande à Paul Borrelly de lui donner des instructions sur les parties les plus essentielles du service, telles que la réception et formation des dépêches, les affranchissements, les articles d'argent, la tenue des registres, la formation des états et l'époque de l'envoi de ces états. Il y joint les imprimés : trois exemplaires du compte de séparation de gestion et un exemplaire du procès-verbal d'installation. L'un des comptes et le procès-verbal doivent lui être retournés après l'installation, pour être expédiés à Paris.
Un inspecteur dont la signature est illisible ajoute à la note un mot gentil pour Mon cher Borrelly, avec l'accord de son camarade et confrère, l'informant que, « s'il ne peut s'y rendre lui-même, nous pensons qu'il n'est aucun inconvénient que vous y envoïés votre fils aîné. Je le connais, il est actif, intelligent et remplirait au mieux la mission dont il s'agit. Vous l'autoriserés seulement à signer tout ce qu'il sera nécessaire, tout comme si c'était vous-même qui aviés été sur les lieux ... Je vous salue de tout mon cœur. »
Cette apostille, chaleureuse et familière, montre l'estime que portent les inspecteurs au doyen des directeurs de la poste, en exercice dans la Haute-Garonne : la gestion familiale des affaires qui se traitent chez Paul Borrelly rendent le père et le fils aîné aussi aptes l'un que l'autre à gérer la direction et à être délégués pour l'installation du directeur de Puylaurens, dont le bureau, créé le premier juin 1715, cent ans auparavant, était beaucoup plus ancien.
Madame Coste usa de procédés dilatoires pour retarder son départ, mais ceci est une autre affaire.
On ne trouve plus trace de Borrelly dans les archives de Revel entre 1815 et 1828. Aux Archives Nationales (F. 90.20.367.5) la liste des directeurs de la poste de la Haute-Garonne pour 1817 indique seulement Borrelly sans autre précision. Était-ce vraiment Paul ? Il avait alors soixante-cinq ans ; à qui a-t-il passé la main ?
C'est en 1825 qu'apparaît dame Borrelly dans nos archives : le 2 janvier, le maire de Revel informe le préfet que, selon ses instructions, il s'est inopinément transporté le 31 décembre 1824, à huit heures du soir, au bureau de dame Borrelly, directrice de la Poste aux Lettres de cette ville, afin de dresser procès-verbal de la gestion comptable pendant l'exercice 1824.
Il procédera de même à la fin des exercices 1825, 1826 et 1827.
Cette démarche inopinée n'était pas inattendue : l'arrêté ministériel du 9 novembre 1820 avait prescrit l'arrêt des comptes à la fin de chaque année.
Mais qui était dame Borrelly ? Dans l'incertitude, trois personnes seraient concernées :
Marie Barthes, deuxième épouse de Paul Borrelly (elle a cinquante-six ans en 1820), et ses deux filles, Adèle et Jacquette.
On peut penser raisonnablement que Paul Borrelly cessa ses fonctions vers 1820 - il avait alors soixante-huit ans - et que sa femme prit la relève dans son univers familier, pour un travail auquel elle participait certainement depuis longtemps, aidée par ses deux filles, elles-mêmes au fait de la gestion des affaires postales ; c'est vraiment là une entreprise familiale !
Ainsi, en 1824, dans la maison de la rue de Castres, vivaient les parents, Paul, retraité, et Marie, titulaire de la direction, le fils aîné de Paul, Henry (du premier lit), resté célibataire, qui tenait l'épicerie et Adèle (du deuxième lit), célibataire aussi, qui tenait le bureau de la poste avec sa mère.
Avaient quitté la maison familiale : Louis, marié, qui continuait à venir travailler avec Henry, mais se brouillera bientôt avec lui ; Henriette, leur sœur, qui a épousé Salomon Cumenge et l'a suivi à Villespy (Aude) ; et Jacquette enfin, la benjamine, devenue dame Sablier le premier juin de cette même année 1824, qui vient de s'installer très provisoirement avec son époux dans la rue Notre-Dame.
Or, c'est précisément avec le mari de Jacquette, Fulcran Sablier, que va se poursuivre la direction de la Poste aux Lettres de Revel, qui reste ainsi dans la même famille.
A la fin du XVIIIème siècle, François Pons, un apothicaire de Lodève où il naquit en 1765, épousait une sorézienne, Marie Marguerite Azaïs, et s'installait à Revel en 1787 ; il avait acheté une maison ayant sortie sur la rue de Vauré et sur la rue de Castres (aujourd'hui rue Victor-Hugo ; la maison d'angle qu'elle encadrait appartenait à l'époque à des marchands de tissus, les Gabolde) ; Marie Marguerite Azaïs lui donnera huit enfants et mourra un an après la naissance du dernier, le 9 novembre 1809 ; des huit enfants, il ne restera à François Pons que l'aînée (Victoire Marie Dorothée) Charlotte, née le 10 mars 1788, et le sixième, Isidore, né le 15 mai 1804.
En 1796, ses recherches en herboristerie et distillerie permirent à François Pons de mettre au point une liqueur de menthe qu'il exploita un peu, entre autres liqueurs et pharmacopée. Il mourut le 6 juin 1824, adjoint au maire Isidore de David Beauregard, et la tradition familiale veut qu'avant de mourir, il transmît la formule secrète de la menthe poivrée à son fils.
Le jeune Isidore s'orienta vers le commerce des alcools et la fabrication de liqueurs du cru paternel et du sien propre ; l'affaire était prospère ; la pharmacie existait toujours, reprise en 1810 par le beau-frère d'Isidore, Jean Louis Pinel, un pharmacien venu de Saint-Félix ; les boutiques étaient bien placées au cœur de la ville, en face de l'épicerie-bureau de poste de la famille Borrelly.
C'est au début de la Restauration qu'arrive à Revel un neveu de François Pons, Fulcran Sablier (sa mère était une Pons) ; ce demi-solde des anciennes armées de l'empereur, sous-lieutenant de cavalerie, est né en 1781 ou 1782, au pied des Cévennes, à Lodève lui aussi, dont la cathédrale est dédiée au saint évêque Fulcran, ce qui explique le fulgurant prénom de cet officier.
Sablier est naturellement à la recherche d'un emploi ; à quarante ans, il lui faut se reconvertir à la vie civile. Son oncle l'initie à la chimie des alcools et en fait, semble-t-il, un bon préparateur. La maison Pons est appelée pour son commerce à fréquenter régulièrement le bureau de poste situé en face, où Fulcran ne tarde pas à apprécier le fonctionnement rigoureux de l'administration postale, et, plus encore, les charmes de la jeune Jacquette, la benjamine de la famille. Fulcran épouse Jacquette le premier juin 1824, comme il est dit plus haut.
Leur location de la rue Notre-Dame va durer seulement trois ans ; c'est dans cet appartement que vient au monde la petite Victoire le 23 mars 1826 ; le 22 juin 1827, Fulcran Sablier achète à Pierre Merle, marchand de chevaux, une maison de 130 m2 au sol dans la rue de Vauré (actuellement au numéro 26), où il installe sa jeune famille ; la maison est plus grande que la maison Borrelly ; le vieux Paul Borrelly règle alors ses affaires de famille : il laisse l'épicerie à ses fils et vient habiter avec sa femme et sa fille Adèle chez son gendre Fulcran dont il obtient la nomination comme directeur de la poste aux lettres le 11 août 1829.
Le doyen et trois femmes certainement fort compétentes en administration postale vont se charger de parfaire l'initiation de Fulcran dans les arcanes d'une paperasserie particulièrement lourde.
Celui-ci continue d'ailleurs ses activités de distillateur chez le cousin Pons au bout de la rue de Vauré.
Cette période est celle de nombreuses innovations dans le service de la poste : déjà en 1817 apparaît le mandat qui dispense du transport effectif du numéraire ; en 1827, tous les bureaux de direction tels celui de Revel sont desservis quotidiennement ; en avril de la même année, l'apposition d'un cachet dateur sur les lettres, au jour du départ et à celui de l'arrivée, permet de surveiller la fiabilité des acheminements.
Enfin, le premier avril 1830, la poste, jusque là cantonnée dans un petit nombre de bureaux, se porta hardiment dans toutes les communes du territoire par la généralisation de la distribution par un facteur rural. Ce fut là l'un des derniers actes des Bourbons ; quatre mois plus tard, le vent de l'histoire remplaça le roi de France par un roi des Français.
Les contraintes postales s'accroissent ; à défaut de statistiques locales, on peut signaler que le nombre de lettres fit plus que doubler en France de 1830 à 1848. Mais Fuicran est bien secondé par Jacquette et sa sœur Adèle restée célibataire.
Il assume son service tout en travaillant très régulièrement au laboratoire de la distillerie, où il est maintenant le détenteur des secrets de fabrication et le créateur de nouvelles formules de diverses liqueurs. Il développe aussi le commerce des alcools (eaux-de-vie du Bas Languedoc, armagnacs, cognacs et même alcools étrangers) dont la maison Pons est grossiste et assure la distribution par des dépôts chez les épiciers et marchands de vin de la région, Un des dépositaires est naturellement Henry Borrelly, le frère aîné de Jacquette, qui tient toujours l'épicerie de la rue de Castres.
Les pages tournent ; Paul Borrelly meurt en 1835, le soir de Noël ; il avait quatre-vingt-trois ans.
Tournons encore les pages ; nous voici en 1842 ; il y a beaucoup d'agitation à la distillerie, le patron se marie ; Isidore Pons, à trente-huit ans, las du célibat, convole le lundi 4 avril en justes noces avec Henriette Zoé de Bonnefoy ; il possède fortune certaine et solides revenus ; il possède aussi depuis longtemps la propriété de Jean-Vidal, sur la route de Montégut, où il va filer le parfait amour avec Zoé.
La distillerie peut marcher sans lui ; Fulcran Sablier préside au laboratoire et aux caves, l'excellent Pierre Gaspard Dirat, voyageur et représentant, toujours par voies et par chemins, ratisse la clientèle, le jeune Jean Get, embauché depuis quelques années comme comptable, se révèle une recrue de qualité ; sorti de l'école de commerce (à Castelnaudary sans doute), il administre la maison avec compétence et autorité ; son travail l'amène à passer tous les jours au bureau de la poste pour déposer et relever le courrier de la distillerie; il est un familier du guichet et il y a déjà longtemps qu'il s'intéresse à la petite Victoire au moins autant qu'aux lettres chargées ; et le vieux Fulcran, déjà sexagénaire, a tout le temps de l'observer à la distillerie ou au bureau de la poste ; il ne lui déplairait pas du tout que ce garçon fût son gendre ; on attendra cependant que Victoire ait seize ans ; son anniversaire tombe le 23 mars ; le mariage d'Isidore va retarder un peu celui de Victoire et de Jean Get ; préséance oblige : le jeune couple convole le mardi 12 avril, huit jours après Isidore et Zoé.
Jean Get vient habiter chez ses beaux-parents, le logement de ses propres parents, au bout de la rue Saint-Antoine, étant par trop modeste.
Et l'année suivante, en février 1843, Isidore Pons, retiré dans son château de Jean-Vidal, décide de cesser ses activités industrielles et vend son affaire à ses employés qui montent la Société Dirat & Get.
Fulcran Sablier n'apparaît pas dans le libellé de la société, mais il est toujours présent. Il quittera le service postal au début de 1848 (voir ci-après) et mourra le 9 janvier 1857, à un âge avancé, presque octogénaire. Il est resté jusqu'au bout attaché à la fabrique de liqueurs en qualité de préparateur, dans les nouveaux locaux ouverts par la Société Dirat & Get, sur l'emplacement de la future Fabrique Get (actuellement Centre culturel Get), l'immeuble de Pons étant devenu trop étroit et sans extension possible.
Il sera remplacé après son décès à ce poste de préparateur par un certain Pierre Get, de Bram, cousin des frères Get et homonyme du cadet.
La toute jeune Victoire Get, fille de Fulcran Sablier, figure comme directrice de la poste le 27 mars 1848 sur le registre de la correspondance du maire, à la mairie de Revel. Elle a juste vingt-deux ans ; elle est depuis six ans l'épouse de Jean Get dont elle aura cinq enfants de 1847 à 1860 ; l'aînée, Marie Louise Isaure, née le premier janvier 1847, qui deviendra madame Martin et décédera le 7 octobre 1951 dans sa cent-cinquième année, fut en ses vieux jours la doyenne des Revélois ; elle habitait alors au Château à l'entrée de l'avenue Roquefort en face de la Fabrique.
Fulcran Sablier prend sa retraite en 1848 au moment des journées révolutionnaires de février ; faute de documents, il est permis d'essayer de comprendre sa situation ; il est peut-être las des mouvements qui agitent le pays ; il avait dix ans à l'époque de la grande Révolution ; il a connu le Directoire et l'Empire, et l'épisode des Cent Jours, événement bouleversant pour l'officier qu'il était ; le retour des rois avec tout le mépris des nouveaux fonctionnaires pour les fidèles de la Grande Armée, la misère d'un demi-solde, l'enthousiasme pour les Trois Glorieuses en 1830, oh, combien amères dix-huit ans après, avec des émeutes, des journées sanglantes ! Et l'on va sans doute encore prêter serment ? Non ! Assez de parjures ! Fulcran Sablier se retire ; il ira tranquillement astiquer ses alambics.
De son côté, Jean Get a trente ans le 25 février 1848, au lendemain des journées insurrectionnelles des 22, 23 et 24 février ; il a l'enthousiasme de la jeunesse et la sérénité des adultes ; entraîné par Gaspard Dirat, il est plein d'idées et d'ambition et veut se lancer dans la politique municipale ; il faut pour l'instant attendre et voir la tournure des événements.
Il n'est pas impossible qu'il ait poussé son beau-père à proposer la nomination de Victoire comme directrice de la poste ; la direction de ce bureau est un atout qu'il ne faut pas négliger ; la poste est un carrefour des rencontres où l'on peut tâter le terrain, un bon observatoire pour qui est à l'affût des nouvelles ; pas de conflit de génération ici, on passe simplement la main.
Il règne alors une certaine insécurité dans les campagnes du Lauragais, provoquée par la misère. Au mois de novembre, la malle-poste est attaquée par un homme armé entre Castelnaudary et Revel ; le conducteur s'en tire en jetant sa bourse au malandrin. En mars 1850, l'écurie de Barrié, maître de la poste aux chevaux de Castelnaudary sera incendiée ; six chevaux périront.
Mme Get (Victorine dans l'intimité familiale, semble-t-il, et non Victoire) ne faisait pas de politique ; elle travaillait ; elle mit en œuvre la réforme fondamentale de la taxation du courrier. Au lieu d'être découpée en zones de taxes calculées en fonction de la distance entre les bureaux, la France devint, le premier janvier 1849, un unique territoire postal, avec réduction considérable du montant des taxes. En même temps furent mis en vente les premiers timbres-poste destinés à mettre le paiement des affranchissements à la charge des expéditeurs, et non des destinataires.
Les directeurs des directions simples craignaient qu'il en résulte une diminution de leur remise. Ils passèrent au régime de la rétribution fixe : pour Revel, le traitement était de 1500 francs et les frais de régie de 400 francs par an.
L'arrivée du chemin de fer en 1866 bouleversa le transport du courrier, affranchi des limites de la traction animale : intempéries, vitesse, capacité.
L'accroissement du trafic postal qui en résulta s'ajouta à celui qu'avait induit la réforme de 1849, ou, plus exactement, accrut ses effets en les prolongeant.
Désormais, la directrice s'adonne complètement à ses fonctions, dans un bureau ouvert au public tous les jours pendant dix heures au moins (art. 64 de l'Instruction générale de 1856), entre sept heures du matin et neuf heures du soir (art. 65). Un renfort est parfois nécessaire.
Dans les états de la population (recensement) de 1851, Jean Get se dit employé des postes, alors qu'aux autres recensements, il est licoriste (sic) ou fabricant de liqueurs. Le terme exact, en langage postal, était aide. Il ne s'agissait pas d'un auxiliaire rétribué, mais, d'un employé bénévole, nourri et logé par la directrice qui l'initiait au métier. Dans le cas présent, c'était la possibilité, pour Jean Get, agréé par l'administration et assermenté, d'assister la directrice, son épouse (art. 67 de l'Instruction générale).
Une fidèle servante, Marie Cassan, vit dans la famille depuis 1856.
Le premier janvier 1865, le titre de directeur est transformé en celui de receveur et Mme Get devient receveuse des postes.
Elle se retire du service en 1871, et nous n'avons encore ici aucun document à ce sujet ; on ne peut donc dire si sa cessation de fonctions est en rapport avec les événements tragiques de la Commune qui ont suivi la chute du Second Empire et la proclamation de la République.
La fabrique Get Frères achevait de reconstruire à cette époque l'immeuble que nous connaissons aujourd'hui sous le nom de Centre culturel Get ; aussitôt ces travaux terminés, on construisit le Château situé en face, où Jean Get installa sa famille en 1873 ; il revendit la maison de la rue de Vauré quelques années après ; cette maison avait été, du moins au rez-de-chaussée, le bureau de poste des Revélois de 1829 à 1871, pendant 42 ans.
La loi du 10 juin 1829 institue le service postal rural ; elle est mise en application le 1er avril 1830, après que l'administration des postes a recruté cinq mille facteurs.
À Revel est nommé Antoine Raimond dit Lasserre, 32 ans ; il n'a pas de costume particulier, mais une plaque sur la bandoulière du portefeuille ; il ne peut visiter chaque localité de son circuit qu'un jour sur deux ; en 1832, un deuxième facteur rural lui est adjoint et le passage est alors quotidien ; chacun d'eux a encore un circuit de 25 à 30 kilomètres.
C'est en 1835 que le port de l'uniforme dessiné et décrit ici est imposé, mais sans grand succès car il n'est pas fourni par l'administration ; en 1846, Lasserre, bientôt quinquagénaire, est toujours au service rural avec François Philipou, un veuf de cinquante-six ans et Raymond Lecointre, trente ans. En 1856, le port de l'uniforme est obligatoire, mais le chapeau haut-de-forme verni est remplacé par une casquette bouffante.
Le lundi premier janvier 1849, au bureau de la poste du n° 26 de la rue de Vauré, madame Jean Get vendit-elle beaucoup de timbres aux clients étonnés de devoir payer, lécher et coller avant de jeter le courrier dans la boite ? |
Schéma de la feuille du Cérès 20 cm noir |
Le couple 115-116 de la feuille de 20c. Un bloc de quatre 1F vermillon avec tête-bêche : c'est le plus recherché et le plus cher des timbres français à la cote des philatélistes. |
Marie Barthes, deuxième femme de Paul Borrelly, avait assuré la direction de la Poste aux Lettres pendant une dizaine d'années ; après les presque vingt années de direction de son gendre Fulcran Sablier, la fine de ce dernier, devenue madame Jean Get, a pris la relève en vingt-trois années de service,
La tradition des dames receveuses se poursuivra encore d'une manière continue jusqu'aux environs de 1910 et nous arrêterons là notre enquête, dépassant un peu le XIXème siècle que nous nous étions fixé comme terme,
Anne Mons - Mme Get est remplacée dans le courant de l'année 1871 par une demoiselle Alphonsine Joséphine Aime Mons, 41 ans, albigeoise, qui s'installe dans la rue Notre-Dame, à la maison portant actuellement le numéro douze. Sa mère, Agathe Sophie Cantarel, veuve Mons, originaire de Saint-Antonin vient la rejoindre ; quoique septuagénaire, elle devait à l'occasion tenir le rôle d'aide au bureau.
En 1876, la demoiselle Mons achète à Eulalie Colombier, veuve Lagarde, de l’Emmarse une bâtisse dans la rue du Cap-Martel, côté ouest, au numéro huit ; elle fait les travaux nécessaires à la création d'un appartement à l'étage et du local de la poste au rez-de-chaussée éclairé par une baie vitrée protégée d'une grille de fer qui restera en l'état pendant longtemps.
Anne Mons prend sa retraite à la fin des années 70, et, dans ses dernières années, va habiter chez les Perramond, au couvert de la Volaille (galerie du Couchant) ; c'est là qu'elle meurt le 19 mai 1887 et Jacques Audouy, qui fut son fidèle facteur et habite non loin, va faire la déclaration de décès à la Mairie, rue de Dreuilhe. Ses neveux, héritiers, quoique habitant Lyon, garderont la maison de la rue du Cap-Martel jusqu'en 1907.
Clémence Lapeyrère - Celle-ci dirige le bureau de la rue du Cap-Martel pendant cinq ou six ans ; elle est aidée au guichet d'une certaine Marie Laffiteau qui est aussi sa domestique. À cette époque se situe sans doute le transfert du bureau de la poste dans la maison voisine ayant aussi un appartement, au numéro six, chez M. Ducos, le camionneur.
Mme Lapeyrère prend sa retraite en 1885.
Sa remplaçante, madame Guy, de Bordeaux, habite cette maison les deux premières armées en attendant de trouver une autre location ; elle est accompagnée de son fils et de sa belle-fille, de Madeleine Ducamp, la sœur de cette dernière et d'une domestique. Son fils et Madeleine travaillent au bureau, le premier employé, la
seconde aide.
Après la naissance d'un garçon le 11 août 1886, le jeune couple repart à Bordeaux.
Madame Guy déménage alors au cœur de la ville, dans la maison Dombres, au couvert des Moines (galerie du Levant) avec au rez-de-chaussée un local convenable pour le bureau ; Madeleine reste avec madame Guy en qualité d'aide ; à son départ, elle aura deux employées , les demoiselles Julia et Marguerite (dont nous ignorons les patronymes) ; le bureau prend de l'importance.
Plus tard, une autre aide, Berthe Bondouy, vingt-trois ans, vient parfaire sa formation.
Madame Guy prend sa retraite le samedi 16 mai 1896 ; la veille, pour fêter l'événement elle était invitée à dîner (nous disons maintenant déjeuner) chez ses amis les Rodier ; on l’attendra avec une certaine impatience, retardée qu'elle fut par l'inspecteur venu de Toulouse vérifier la comptabilité et assurer la passation de service. Elle quitte définitivement Revel le mardi suivant pour retrouver sa famille à Bordeaux.
L'Administration Régionale des Postes, Télégraphe et Téléphone à Toulouse signe le 7 septembre 1896 un contrat de bail pour neuf ans avec Justin Gabolde à qui elle loue sa maison au numéro 14 de la rue du Temple, à l'angle de la rue de Castres (qui ne s'appellera Victor-Hugo que quatre ou cinq ans plus tard) pour 450 francs par an. C'est madame Escarguel, cinquante ans, née à Auch, qui aura l'honneur d'inaugurer les nouveaux locaux ; Nestor, son mari, représentant de commerce, l'aidera quand besoin sera. Ils se retireront vers 1910, après une carrière bien remplie.
Avec madame Escarguel se termine pour quelques années le temps des Dames de la Poste.
Et en guise de conclusion, un rapide coup d'œil sur le vingtième siècle !
Après elles, viennent les receveurs ; Élie Ortet, né à Aspet, que secondent les sœurs Alfonsi, Angèle et Berthe ; Clodomir Lacoste qui connaîtra les soucis d'un déménagement du service : en effet, si le bail de la maison Gabolde a été reconduit le 8 juillet 1914 sans difficulté, par contre Marcel Gabolde, avocat à Auch, refusera le nouvel du bail en 1923 et la direction des P.T.T. prendra un autre bail in extremis avec la famille du député Henri Auriol (dont l'avocat et député Jean-Louis Tixier-Vignancour sera le gendre) pour la maison de la rue Notre-Dame, au n° 28 ; le déménagement ne fut pas une mince affaire ; un autre receveur, Émile Cassé, de Servian (Hérault), apparaît dans les années 30 ... On trouvera en annexe une liste de ces receveurs et receveuses qui ont couvert le vingtième siècle.
La mairie de Revel avait songé plusieurs fois à construire un immeuble approprié pour le bureau des Postes ; malgré la variété des solutions, on se heurtait toujours à quelque empêchement, et l'aspect financier n'était pas le moindre.
Le problème est réglé au début des années cinquante sous la magistrature de M. Roger Sudre. L'administration des Postes construit en 1952 un Hôtel des Postes sur un terrain donne par la commune au marché de la volaille, en face de la Caisse d'Épargne.
Les locaux insuffisants, mal situés, mais surtout vétustes de la rue Notre-Darne - la famille Auriol se souciant peu de faire les gros travaux qui lui incombaient - ces locaux donc sort évacués le 31 janvier 1953 après trente années de service postal. La banque Courtois achètera cette maison peu après.
Et les Revélois peuvent maintenant prendre rendez-vous pour fêter en 2003 (le temps passe vite) le cinquantenaire (32)de leur Hôtel des Postes.
Archives nationales - Paris :
F- 90. 20. 367/368 - recueil factice, personnel Poste Hte-Garonne 1793-1820.
Archives départementales de la Hte-Garonne :
In 8° 2793 - liste générale des Postes de France, 1734.
In 8° 1435 - livre de Poste, 1830,
In 8° 1314 - Mémoires de Jacques Gaches sur les guerres de religion à Castres et dans le Languedoc, publié par Ch. Pradel, Paris, 1879.
W ms 422 - Frère Léodère Géry : Monographie de la commune de Revel , manuscrit, 1903.
Archives municipales - Toulouse :
Annuaire du département de la Haute-Garonne, années 1817 à 1872.
Archives communales - Revel :
Délibérations consulaires & municipales.
Registres d'état-civil & états de la population.
Compoix de 1690 & matrices cadastrales.
Archives de l'hôpital - Revel :
Délibérations du bureau de la commission administrative.
Archives privées :
Mme Martin (†) & M. Mons.
Documentation imprimée
Instruction générale sur le service des Postes ‑
Imprimerie nationale, Paris – 3e éd. 1832 & 4 e éd. 1856.
Bibliographie sur l'histoire postale
E. Renard : Les Postes en Languedoc, de l'origine de la province à 1789 - éd. Privat, Toulouse, 1935.
Eugène Vaille : Histoire générale des Postes françaises, tomes I à VI, des origines à 1789 - P.U.F. 1947 à 1953.
Académie de philatélie - Paris : Encyclopédie des timbres-poste de France - tome I - 1968.
La Grande Encyclopédie - Larousse, p. 9777 - 1975.
Paul Charbon : Sur les routes de France, à pied, à cheval et en voiture de poste - éd. J.P.Gyss, Schirmeck, 1988.
Éditions du Patrimoine - Le Patrimoine de La Poste - Éditions Flohic - 1996.
Paul Charbon & Pierre Nougaret : Tiens, Via le facteur ! - Édit. Jean-Pierre Gyss, 1996.
François Bertin - La Poste du messager à cheval au courrier électronique - Éditions Ouest-France, 1999.
Nos remerciements vont à M. Michel Bourguignon qui
avait communiqué en 1987 à la Direction de la Poste à Toulouse un relevé des événements concernant la poste, établi à partir des délibérations du Conseil municipal
de Revel de 1729 à nos jours.
Affenage : aujourd'hui, l'affenage ou affouragement est la distribution du fourrage au bétail ; ici, il s'agit vraisemblablement d'une taxation du foin engrangé pour la mauvaise saison.
Bayle : en français, le bailli; c'est le juge local; le ressort de sa juridiction est le boaillage qui, à Revel, s'étend sur le consulat de Revel et les petits consulats voisins.
Le bayle peut être aussi le valet consulaire, agent d'exécution des consuls.
Brigadier : aujourd'hui, général de brigade.
Cabinet : gros meuble en forme d'armoire avec un pupitre et de nombreux tiroirs, placards et casiers, tout cela muni de solides serrures ; toute administration, tout négociant de quelque importance possède un cabinet.
Chaury : Castel nau (prononcez naou) d'Arry est la forme occitane ; le XVIIe siècle vit éclore une tentative de francisation, Château neuf d'Arry, ce qui est un peu long, et les greffiers imaginèrent le raccourci Chaury, qui est fréquent au XVllle siècle ; la forme occitane, Castelnaudary, gardera la préférence, mais les habitants sont toujours les Chauriens.
Communauté : c'est l'ensemble des citoyens ayant un métier, une situation, fut-ce celle de propriétaire, et résidant dans le consulat ; les consuls décident au nom de la Communauté.
Conseil Politique : les conseillers politiques sont au nombre de vingt-quatre (six à chaque rang : nobles et bourgeois, marchands, artisans et enfin habitants de Dreuilhe) ; ils sont convoqués aux délibérations (en général le dimanche, à 13 heures), mais ils ne brillent pas par leur présence. Ils sont renouvelés par fraction chaque année.
Consul : Quatre consuls (un noble ou bourgeois, un marchand, un artisan et un paroissien de Dreuilhe) administrent le consulat ; ils sont renouvelés chaque année, mais leur élection est en réalité une cooptation discrète qui ne figure pas dans les comptes rendus des délibérations ; ils se réunissent avec les conseillers politiques en principe le dimanche en début d'après-midi.
Consulat : Unité territoriale administrative élémentaire dans le Midi de la France sous l'Ancien Régime ; le consulat de Revel comprenait à l'origine les paroisses de Revel (Notre-Dame de Grâce), de Vaudreuilh (Saint-Martin) et Dreuilh (Saint-Sernin), de Gandels (Saint-Vincent) et Garrevaques (Saint-Laurent), de Couffinal (Saint-André), de Saint-Pierre de Calvayrac et enfin tout l'ancien consulat de Vauré (paroisse Saint-Saturnin). Ce vaste consulat se réduisit plus tard aux actuelles communes de Revel et de Vaudreuille.
Exprès : non pas le sens de rapide (express), mais le sens d'engagé seulement (exprès) pour un service.
Lieue : Quand on lit que la distance de Revel à Castelnaudary est de trois lieues, il s'agit de la lieue commune de Languedoc (6,173 km).
Lieue de poste : Elle a varié suivant les époques; elle servait à établir les relais de poste (toutes les trois ou quatre lieues) et les tarifs des taxes des lettres en fonction du nombre de lieues parcourues ; au XVIIIe siècle, la lieue de poste mesurait 2200 toises, environ 4,3 km.
Livre : Dans la première moitié du XIXe siècle, on disait indifféremment franc ou livre ; l'expression employée ici par l'officier impérial est amusante : il associe à livre, un mot de l'Ancien Régime, les cinquante centimes du système métrique révolutionnaire ; n'importe qui aurait dit trente sous.
Pleige : pleine (?), mais l'étymologie de ce mot nous est inconnue ; on le retrouve régulièrement dans l'expression pleige caution sous la plume des greffiers et des notaires.
Registres B.M.S. : baptême, mariage, sépulture ; jusqu'à la Révolution, les registres d'état civil ont été tenus par les curés ou leurs vicaires, et il leur arrivait parfois d'omettre les dates de naissance et de décès, événements non sacramentels. Quant aux protestants, on les ignorait ; ils allaient au désert.
Sénéchal : Le titre est purement honorifique, dit Ramière de Fortanier ; c'est le magistrat placé à la tête de la sénéchaussée, à peu près le tribunal de première instance. La sénéchaussée de Castelnaudary couvrait le Lauragais, à l'exception du comté de Caraman.
Toge : La toge et le chaperon étaient les marques vestimentaires qui distinguaient les quatre consuls aux réunions du Conseil de la Communauté, aux offices religieux et aux cérémonies officielles ; toge et chaperon ne leur appartenaient pas et devaient rester à l'hôtel de ville.
Mme Escarguel (Euphrasie) née Boyer, arrivée en 1896, attestée en 1906
M. Ortet (Élie), attesté en 1911
M. Lacoste (Clodomir), attesté en 1921 & 1926
M. Cassé (Émile), attesté en 1931
Mme Gastaud, installée le 1 er octobre 1937
M. Beurnier, du 11 décembre 1937 au 4 février 1938 M. Raynal, depuis le 19 novembre 1941
Mlle Saucède, depuis le 21 mars 1942
M. Troncquez, depuis le 12 septembre 1942
Mlle Saucède, depuis le 10 janvier 1945
M. Grilitard, depuis le 26 mars 1945
M. Cliva, depuis le 16 mars 1946
Mlle Saucède, depuis le 13 février 1950
M. Falcou, depuis le 1 er mars 1950
M. Delmas, depuis le 5 juin 1950
M. Falcou, depuis le 1 er août 1952
M. Hormière, depuis le 21 novembre 1952
M. Morava!, depuis le 16 juin 1955
M. Charbit, depuis le 26 octobre 1972
M.Dupuy, depuis le 13 novembre 1972
M. Coutens, depuis le 6 mars 1974
Mme Bacquié, depuis le 10 mai 1974
M. Ventouillac, depuis le 17 juin 1974
M. Laur (Robert), depuis le 25 octobre 1986
M. Boutes (Gérard), depuis le 4 juillet 1991
M. Maisonhaute (Georges), depuis le 13 avril 1992
M. Stebig (Dons), depuis le 5 juillet 1995
Mme Maligoy (Thérèse), depuis le 2 octobre 2000
1. 8, couvert de la volaille / galerie du couchant
2. 2, rue de Castres / rue Victor-Hugo
3. 26, rue de Vauré
4. 12, rue Notre-Dame
5. 8, rue du Cap-Martel
6. 6, rue du Cap-Martel
7. 7, couvert des Moines / galerie du levant
8. 14, rue du Temple
9. 26, rue Notre-Dame
10. square de la Poste / square du 11 novembre 1918
1. Jean André Brunet, directeur du 1er juin 1771 au 16 octobre 1783.
2. Paul Borrelly, directeur du 16 octobre 1783 jusqu'en 1820 environ.
2. puis 3 à partir de 1827 - Marie Barthes, épouse Paul Borrelly, directrice de 1820 env. au 11 août 1829.
3. Fulcran Sablier, gendre des précédents, directeur du 11 août 1829 à février ou mars 1848.
3. Victoire Sablier, fille du précédent, épouse Jean Get, directrice puis receveuse en 1865, de 1848 en 1871.
4. , puis 5. à partir de 1876 - Anne Mons, d'Albi, receveuse de 1871 jusqu'en 1879 environ.
5. puis 6. à partir de 1882 - Clémence Lapeyrère, receveuse de 1879 environ jusqu'en 1885.
6.puis 7. à partir de 1887 - Blanche Félicité Savaria, veuve Guy, de Bordeaux, receveuse de 1885 au 16 mai 1896.
7. puis 8. à partir du 7 septembre 1896 - Euphrasie Boyer, épouse Escarguel, receveuse de mai 1896 à 1910 environ.
En 1923, le bail Gabolde / Direction régionale des P.T.T. n'est pas renouvelé (8).
signature du bail Auriol / Dir. Rég. P.T.T. (9) ; le déménagement incombe à M. Lacoste, receveur.
Le 31 janvier 1953, après résiliation du bail Auriol (9) par l'administration des Postes, M. Hormière, receveur, s'installe dans le tout nouveau Hôtel des P.T.T. (10).
1). Consulat : Unité territoriale administrative élémentaire dans le Midi de la France sous l'Ancien Régime ; le consulat de Revel comprenait à l'origine les paroisses de Revel (Notre-Dame de Grâce), de Vaudreuilh (Saint-Martin) et Dreuilh (Saint-Sernin), de Gandels (Saint-Vincent) et Garrevaques (Saint-Laurent), de Couffinal (Saint-André), de Saint-Pierre de Calvayrac et enfin tout l'ancien consulat de Vauré (paroisse Saint-Saturnin). Ce vaste consulat se réduisit plus tard aux actuelles communes de Revel et de Vaudreuille.
2). Affenage : aujourd'hui, l'affenage ou affouragement est la distribution du fourrage au bétail ; ici, il s'agit vraisemblablement d'une taxation du foin engrangé pour la mauvaise saison.
3). Bayle : en français, le bailli; c'est le juge local; le ressort de sa juridiction est le baillage qui, à Revel, s'étend sur le consulat de Revel et les petits consulats voisins.
Le bayle peut être aussi le valet consulaire, agent d'exécution des consuls.
4). Sénéchal : Le titre est purement honorifique, dit Ramière de Fortanier ; c'est le magistrat placé à la tête de la sénéchaussée, à peu près le tribunal de première instance. La sénéchaussée de Castelnaudary couvrait le Lauragais, à l'exception du comté de Caraman.
10). Communauté : c'est l'ensemble des citoyens ayant un métier, une situation, fut-ce celle de propriétaire, et résidant dans le consulat ; les consuls décident au nom de la Communauté.
11). Conseil Politique : les conseillers politiques sont au nombre de vingt-quatre (six à chaque rang : nobles et bourgeois, marchands, artisans et enfin habitants de Dreuilhe) ; ils sont convoqués aux délibérations (en général le dimanche, à 13 heures), mais ils ne brillent pas par leur présence. Ils sont renouvelés par fraction chaque année.
12). Exprès : non pas le sens de rapide (express), mais le sens d'engagé seulement (exprès) pour un service.
13). Lieue : Quand on lit que la distance de Revel à Castelnaudary est de trois lieues, il s'agit de la lieue commune de Languedoc (6,173 km).
14). Pleige : pleine (?), mais l'étymologie de ce mot nous est inconnue ; on le retrouve régulièrement dans l'expression pleige caution sous la plume des greffiers et des notaires.
16). Maintenant
18) . Répartiteurs.
20). Chaury : Castel nau (prononcez naou) d'Arry est la forme occitane ; le XVIIe siècle vit éclore une tentative de francisation, Château neuf d'Arry, ce qui est un peu long, et les greffiers imaginèrent le raccourci Chaury, qui est fréquent au XVllle siècle ; la forme occitane, Castelnaudary, gardera la préférence, mais les habitants sont toujours les Chauriens.
21). Reviendra ...
22). Registres B.M.S. : baptême, mariage, sépulture ; jusqu'à la Révolution, les registres d'état civil ont été tenus par les curés ou leurs vicaires, et il leur arrivait parfois d'omettre les dates de naissance et de décès, événements non sacramentels. Quant aux protestants, on les ignorait ; ils allaient au désert.
24). de Paris
25). Toge : La toge et le chaperon étaient les marques vestimentaires qui distinguaient les quatre consuls aux réunions du Conseil de la Communauté, aux offices religieux et aux cérémonies officielles ; toge et chaperon ne leur appartenaient pas et devaient rester à l'hôtel de ville.
29) Le produit en premier net était le produit brut des affranchissements encaissés ou dus pour le courrier pris en charge par le bureau, y compris le montant de la remise de 5% sur les envois de fonds par les clients, diminué des non-valeurs ou détaxes résultant du courrier réexpédié, envoyé au rebut à Paris.
30). Livre : Dans la première moitié du XIXe siècle, on disait indifféremment franc ou livre ; l'expression employée ici par l'officier impérial est amusante : il associe à livre, un mot de l'Ancien Régime, les cinquante centimes du système métrique révolutionnaire ; n'importe qui aurait dit trente sous.
31). Le maréchal Soult apprit à Naurouze le 13 que l'empereur avait abdiqué le 6. Il signa l'armistice le 18, après en avoir reçu l'ordre écrit sollicité aussitôt auprès du major-général Berthier. Et les Toulousains en liesse fêtaient les Anglais de Wellington en leur criant Vellecomme avec l'accent du terroir.
32). Cette publication date de 2002.