Etymologie
La bastide, ville occitane ici ou maison provençale là, nécessite
d'aller à la définition du mot pour mieux comprendre qu'il puisse y
avoir un même mot pour deux réalités différentes.
Etymologiquement, le mot "bastida" (bastit, bastia) possède, à
l'origine, un sens très large : construction récente ou en cours, de
quelque importance (un bastit en occitan… une construction bâtie).
C'est par la suite que le mot prend deux significations différentes.
1/
Dans le Sud-ouest, le terme de "Bastide" prend dès le XIIIème
siècle le sens de : "ville neuve, peuplement nouveau ("nova bastida",
"nova populatio").
La bastide se distingue alors de : "villa", "castrum",
"sauveterre", "salvetat", "castelnau", "villeneuve" d'origines
différentes, souvent antérieures.
2/
En Provence, le mot "Bastide" connaît une autre signification,
récemment vulgarisée, en désignant des "Demeures campagnardes,
complément des hôtels urbains. Résidences secondaires, au centre d'une
exploitation agricole de rapport". Ces "bastides provençales" apparues
au XVIème siècle ont vu leur plein épanouissement aux XVIIème et XVIII
siècles.
Une vague de peuplement et d’urbanisation va commencer en Albigeois en
1220. Cette véritable « révolution urbaine » va s’étendre à la Gascogne
et à l’Aquitaine, ce mouvement que l’on appelle aussi le « phénomène
bastide » durera jusqu’en 1357 – 1358.
Ainsi plus de 300 bastides seront ainsi fondées parfois « ex nihilo » en
moins d’un siècle et demi.
Il est difficile de s’imaginer ce que représente cette vague
urbanistique. Cet urbanisme domine encore de nos jours les campagnes du
sud ouest.
Les plans sont en général en échiquier, avec une place centrale et un
beffroi en bois qui s’élève en son milieu entouré de galeries (las
garlandas à Revel).
La bastide est le résultat de plusieurs siècles de recherches sinon
d’expériences de création urbaine.
Les buts des fondateurs de bastides sont essentiellement politiques :
- contrôle des populations rurales après la croisade des Albigeois ou
lors de rivalités entre les seigneurs, mais aussi possibilité de
relogement de populations qui ont souffert de ces guerres
- prélèvement d’impôts, de taxes en contrôlant les transactions
- grand mouvement
d’affranchissement des serfs, les colons ayant dorénavant un statut
d’hommes libres
- souci de
regroupement des populations, l’habitat rural étant à cette époque assez
dispersé
- meilleur aménagement du territoire et une valorisation des terres
- installation de la sécurité et du développement des échanges, en effet
une bonne partie de la population médiévale semblait ne pas avoir de
domicile fixe, pratiquant souvent des travaux saisonniers et vivant de
larcins, grâce à ce tissu urbain ce climat général d’insécurité va se
réduire.
Ces créations urbaines ont entraîné des concurrences acharnées des
seigneurs pour drainer ou conserver les populations.
Ces villes neuves conduisent à un phénomène urbain concurrentiel avec
les autres types d’habitats (castra, villages ecclésiaux, sauvetés,
castellas, basse cour de mottes castrales).
Il est non imposé et librement consenti par la population.
Lors de la création de ces bastides, les seigneurs voisins se plaignent
de l’exode de leurs tenanciers attirés par un nouvel urbanisme qui leur
apportait :
- une qualité de vie essentielle au Moyen Age
- la sécurité
- mais aussi des droits économiques et politiques étroitement
imbriqués.
Les droits et les devoirs sont clairement annoncés par les articles des
us et coutumes des villes neuves.
A chaque fondation, une charte des coutumes est rédigée. C’est la charte
de fondation.
Pour la bastide de Revel la charte était composée de
89 articles.
Les coutumes consacrent de nombreux articles concernant le respect du
fief, ce qui correspond à notre notion de droit de la propriété.
L’habitant peut aussi quand il veut quitter la ville à condition d’avoir
payé ses dettes (liberté de déplacement).
Avec ces deux conditions, liberté de choisir sa résidence et garantie du
fief, l’urbanisme reste l’objet bâti par tous, c’est à dire par la
communauté des « bourgeois » (ce n’est pas ici la notion de celle du
XVIIIème - XIXème siècle, dans notre cas le bourgeois est l’habitant du
bourg…), par le consulat (à Revel il y a 6 consuls) ou par la jurade.
Le « bourgeois » est souvent lié par un contrat, il peut prêter serment
(parfois à partir de 13 ans). Il s’engage à respecter les coutumes,
sorte de constitution définissant au niveau local les relations entre le
« seigneur de la ville » et la communauté d’habitants. Il devient
responsable de la ville qui fait de lui un responsable économique et
politique.
Revel sera fondé au milieu de la forêt de « Bauré », ce nouveau « centre
urbain » va dynamiser la vie économique artisanale, agricole et
commerciale de la région.
Les villages de Vauré, Dreuilhe et Vaudreuilhe feront une même
communauté avec la ville de Revel, ce fait sera générateur de nombreux
conflits entre les consuls de Revel et les habitants des terroirs
annexés.
Grâce au pouvoir de la famille de Rigaud, Vaudreuilhe retrouvera son
indépendance en 1518.
Pourtant on peut estimer qu’un essai a peut être été tenté à Vauré avant
la fondation de Revel, puisqu’en 1249 son consulat est attesté.
En 1322, Vauré est détenteur d’importants privilèges : la juridiction
criminelle, les prisons, fourches et piloris, les assises du juge
du Lauragais, l’octroi de deux foires par an et d’un marché
hebdomadaire.
Nous avons là, la preuve d’une étonnante vitalité de Vauré.
Si le Roi n’a pas poursuivi son essai à Vauré, c’est peut être parce que
l’abbé de Soréze y détenait des droits.
L’église Notre Dame des Grâces construite en 1350, a dépendu longtemps
de l’église paroissiale Saint Sernin de Vauré, prieuré-cure de l’abbaye
de Soréze.
La charte est donc promulguée par Agot de Baux, chevalier de Bram,
sénéchal de Toulouse et de l’Albigeois, fondant ainsi la bastide le 8
juin 1342, le tout en exécution des lettres royales de Philippe VI de
Valois, le Roi fondateur de la cité de Revel.
Ces lettres ont été données à Maubuisson près de Paris, le 6 février
1341 (NDLR : on trouve aussi la date du 21 février).
La confirmation de la charte de fondation faite à Conflans daterait du
mois de mai 1345.
Cette charte a été constamment confirmée à la demande des consuls, par
les différents rois qui se sont succédés, notamment en 1356, 1359, 1402
et 1426.
Une traduction française en a été faite en 1663 sur un autre vidimus
datant de 1497.
En 1490, elle fut confirmée par Charles VIII, en 1510 par Louis XII, en
1560 par François II et en 1609 par Henri IV.
Le seul
vidimus qui est conservé est celui de Louis XI, sur parchemin daté de
1462 (texte ci après et reproductions photos du vidimus).
Une autre date a été relevée sur les textes celle de décembre 1343
par laquelle une copie est faite par Pierre Marconandi juré et substitut
et François de Rieux, notaire royal stipulant que le seigneur gouverneur
et sénéchal de Toulouse fait et accepte l’acte du 8 juin 1342…Bastide
(ville)
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Une bastide (de l'occitan bastida) est l'une des quelques deux cent
cinquante à trois cents villes ou villages neufs fondés dans le
sud-ouest de la France entre 1229 (Le Traité de Paris [1] parfois
considéré comme l'acte fondateur de mouvement de création urbaine) et
1373 et répondant à un certain nombre de caractéristiques d'ordre
économique, politique et morphologique.
Définitions d’une bastide ?
Le mot bastide dans les textes médiévaux peut avoir différentes
significations selon les périodes. C'est seulement à partir de 1229
environ que le terme prend le sens de ville neuve ("bastida sive
populatio").
C'est au XIXe siècle que commence l'étude historique des bastides.
Les grandes caractéristiques des bastides :
une bastide est une ville,
il existe un acte fondateur,
et des textes originels.
Il s'agit de très courtes définitions pour une question aussi complexe,
mais l'essentiel y est. On pourrait ajouter que la bastide est un
lotissement dont la taille est fixée par son concepteur et dépend de la
place qu'il doit occuper dans un réseau urbain général. Les bastides
sont l'expression d'une volonté médiévale d'aménagement du territoire.
De plus, il apparaît aujourd'hui que les bastides ne sont pas réellement
toutes des fondations a novo (ex nihilo).
En effet, le terrain choisi pour leur implantation ne se situait
généralement pas au milieu de nulle part. Il s'agissait souvent :
soit de villages absorbés (c’est le cas de Revel avec Vauré, Dreuilhe et
Vaudreuilhe)
soit d'un lieu mythique,
soit d'un grand carrefour où se déroulait déjà un commerce à un certain
moment de l'année (en fait, une bastide sans corps).
Aujourd'hui, on s'accorde à dire qu'il s'agit de nouveaux lieux
d'établissement pour des groupes de population à but agricole,
commercial ou politique.
Lieux d'implantation de bastides
Le sud-ouest est inégalement touché par le phénomène des bastides. Deux
espaces sont réellement privilégiés dans le choix des sites :
le piémont pyrénéen
l'axe garonnais élargi vers l'est le long du Tarn, du Lot et de la
Dordogne, pour des raisons naturelles : l'altitude et la qualité des
sols.
Certaines bastides s'établissent toutefois dans des positions défensives
fortes.
Certaines sont entre les deux, moyennement ouvertes et protégées, comme
hésitantes.
Mais la majorité s'implante dans des vallées sans accident.
Phases de fondation des bastides
Préhistoire du mouvement (1144-1229)
C'est entre 1144 et 1248, année de la mort de Raymond VII, comte de
Toulouse, que sont construites les premières bastides, 1144 est l'année
de fondation de Montauban, par le comte Alphonse Jourdain.
À la période de la Croisade des Albigeois, le pouvoir français montre
tout son intérêt pour l'espace aquitain.
Il s'agit d'une époque de transition avec l'époque romane. On procède
par tâtonnements dans la recherche d'un nouveau style.
De 1144 à 1208, le comté de Toulouse connaît son âge d'or. Montauban est
fondée par le comte de Toulouse aux portes de l'abbaye Saint-Théodard, à
une cinquantaine de kilomètres au nord de Toulouse. Mais la guerre des
Albigeois éclate et l'élan des fondations est brisé.
Il reprend cependant dans les années 1220 avec l'installation du royaume
de France dans le Languedoc (1224) et le traité de Meaux-Paris (1229)
qui coupe l'Albigeois en deux le long du Tarn.
L'Est est réuni au domaine royal et l'Ouest reste au comté de Toulouse.
Alphonse de Poitiers épouse la fille aînée de Raymond VII qui n'a pas de
fils. Le comté de Toulouse est donc voué à disparaître.
La paix est revenue et la région se stabilise. Les pôles principaux de
la région au début du XIIIe siècle sont Toulouse, Albi et Montauban, qui
est déjà une grande ville à cette époque. Les bastides sont un effort de
reconstruction après tant de guerres.
Elles sont fondées de préférence sur les routes entre Toulouse et Albi.
Cependant, quelques fondations françaises dans le Languedoc et fuxéennes
dans l'Ariège constituent une minorité.
De 1271 à 1290
Alphonse de Poitiers meurt en 1271, sans enfants. C'est le sénéchal
français de Toulouse, Eustache de Beaumarchès qui lui succède.
En 1272, Edouard Ier est sacré roi d'Angleterre.
En 1272, le sud-ouest est partagé de manière presque égale entre les
deux hommes. L'ouest et le nord-ouest sont aux mains des Anglais, l'est
et le sud aux Français. Les « Gascognes » centrales et occidentales
constituent la région frontalière entre la France et le roi-duc.
Les seigneurs locaux cherchent à rester autonomes en passant d'un camp à
l'autre.
Les terres anglaises, surtout du nord-ouest, sont couvertes de bastides.
Les anciennes ont été fondées par la France, les nouvelles par
l'Angleterre.
Ce sont des terres peu sûres. Les bastides y sont placées sur des sites
défensifs à proximité de cours d'eau qui sont des voies de transport en
temps de paix.
À la fin de cette troisième période, le Lot et la Dordogne seront assez
uniformément recouverts de bastides, le long des cours d'eau.
Du côté toulousain, Eustache fonde des bastides suivant une auréole
autour de la métropole qui s'interrompt au sud-est.
Dans l'Albigeois et la vallée de la Garonne, il intensifie
l'implantation de bastides pour consolider le pouvoir français.
Enfin, en Gascogne orientale, il existe de nombreux comtés. En effet, il
s'agit d'une région cloisonnée par le relief qui n'intéressait pas
Alphonse de Poitiers. Les bastides qu'Eustache y fonde sont un moyen
pour lui d'infiltrer la région.
De 1290 à 1350-1375
Cette période est marquée politiquement par une tension croissante entre
l'Angleterre et la France.
Eustache de Beaumarchès meurt et la guerre de Gascogne éclate. Il s'agit
d'une offensive française. Ceux-ci prennent l'Agenais. La paix de
Montreuil rend à l'Angleterre beaucoup de ses terres dévastées par la
guerre.
La majorité des bastides construites à cette période le sont au
sud-ouest de l'espace aquitain. Elles sont le fruit d'initiatives
anglaises et seigneuriales. Le roi de France y participe peu.
Il y a aussi intensification des implantations de bastides dans les
régions déjà couvertes, ainsi qu'apparition de fondations de bastides
dans le Lauragais et entre l'Ariège et l'Agout. Ces dernières pour
assurer le contrôle des relations entre Toulouse et le Languedoc.
Revel fondé en 1342 est une des dernières bastides qui ont été fondées…
Situation
géographique
La zone des bastides s'étend :
au sud jusqu'aux Pyrénées au nord jusqu'aux plateaux et serres
proches de la Dordogne et aux montagnes du Rouergue et du Limousin
à l'ouest jusqu'à l'océan Atlantique.
Situation sociale
La société de l’époque est essentiellement rurale. Les paysages sont
très individualisés.
Politiquement, la terre est divisée en de tout petits pays. Les plus
grands sont à l'époque le Périgord, le Quercy et le Rouergue. On peut
parler de balkanisation du Midi aquitain en 1200.
Cependant, malgré ce morcellement, sur tout le sud-ouest existe une
grande unité de culture : la culture occitane.
Cela n'empêche pas une relation entre le Pays basque et le Toulousain.
Dans ce premier, les paysans sont semi-nomades. Lorsque la terre est
épuisée et les forêts dégradées là où ils sont implantés, le hameau
migre.
Mais ce ne sont jamais de grandes distances qui sont parcourues. Les
églises, elles, restent en place.
Dans le Toulousain au contraire, la terre est plus fertile. Des villes
antiques avec de l'artisanat contribuent à y enrichir la bourgeoisie.
Situation politique
Une foule de péagers vit de la taxation des paysans et des voyageurs.
Ils assurent un climat d'insécurité et leur argent ne leur suffit
souvent qu'à entretenir un petit castrum et quelques hommes d’armes.
Au-dessus de ceux-ci sont établis des seigneurs.
Ils règnent
chacun sur plusieurs dizaines de villages et bourgs. En 1150, ils sont
vassaux du roi de France, soit directement, soit par l'intermédiaire des
grands féodaux, comme Raymond V, comte de Toulouse, ou Aliénor
d'Aquitaine (duchesse d'Aquitaine, comtesse de Poitiers et reine de
France).
Par le mariage de cette dernière en 1152 avec le roi d'Angleterre, le
sud-ouest devient une terre de conflits entre les royaumes de France et
d'Angleterre.
Dans le sud-ouest un système de chartes se développe avant l'apparition
des bastides. Il s'agit en fait de documents écrits où sont stipulées
les redevances dont la population doit s'acquitter. Celle-ci préfère ce
système moins arbitraire et de plus en plus de seigneurs l'adoptent.
Dès le XIIe siècle, Auvillar et Montauban avaient déjà des chartes de
coutumes et des amorces de paréage qui sont les outils juridiques allant
permettre l'éclosion des bastides.
Pour J. Poumarède, historien du droit, « La pénétration du droit romain
dans le bassin de la Garonne coïncide avec un grand mouvement
d'affranchissement urbain et de création de bastides. Le principe de
liberté individuelle que véhicule le droit romain est le ferment de
cette éclosion urbaine acceptée par une féodalité méridionale peu
cohérente ».
Les seigneurs de l'époque sont de deux types :
Seigneurs laïques :
un seigneur laïc est un noble qui offre la
protection à ses gens. Pour être réellement dissuasif face aux autres
seigneurs voisins, il doit faire de grandes dépenses militaires.
Cependant, à l'époque, les loups et voleurs sont bien plus menaçants. La
construction d'un château fort suffit donc bien souvent à assurer la
protection des gens.
De nombreux châteaux sont construits dans la région. Autour de ceux-ci
se développeront des castelnaux, villages agglutinés au castrum central.
On peut souvent encore aujourd'hui déduire l'origine de ces villages de
la présence dans leur nom de mots tels que : castéra, castel ou
castelnaud.
Le site
d'implantation est toujours défensif, souvent perché. Au centre du
castelnau se trouve une tour carrée ou rectangulaire. C'était le logis
seigneurial ainsi qu'un poste d'observation.
Les maisons du castelnaux sont serrées autour. Il en résulte un
urbanisme à rues tortueuses et placettes.
Seigneurs ecclésiastiques
:
sont eux des hommes d'Église.
Leur rôle est aussi d'assurer la protection de leurs gens, mais ils le
font d'une manière différente.
La sécurité est garantie par la dissuasion : la menace
d'excommunication.
En effet, les terres de l'Église et surtout les villages ayant le statut
de sauvetés sont protégés en droit par la paix de Dieu.
À l'entrée et aux carrefours les plus fréquentés de ces terres appelées
finages est implantée une croix qui marque l'entrée d'un espace sacré.
Lorsqu'on dépasse ces bornes il faut déposer les armes.
Les noms actuels de ces villages, aussi appelés sauvetés, reflètent
aussi leur histoire.
Cependant au niveau de l'urbanisme, les formes sont assez proches de
celles des castelnaux.
Les maisons se pressent autour du sanctuaire central car il s'agit du
lieu véritablement inviolable. Dans ce sanctuaire, le clocher est
généralement construit comme une tour de guet ou donjon et souvent
l'église est fortifiée. Une lourde porte, de petites ouvertures romanes,
des murs épais avec contreforts ne sont pas un luxe dans ces temps
troubles.
Situation
religieuse
Le XIe siècle voit s'établir et s'épanouir dans le sud-ouest la doctrine
cathare, qui trouve dans les conditions socio-culturelles de cette
région un terreau favorable à son développement.
L'anticléricalisme intransigeant de ce mouvement et son opposition à la
hiérarchie catholique, valent aux cathares de s'attirer les foudres de
l'Église catholique romaine, qui les condamne comme hérétiques et
cherche à les éliminer, d'abord par le prêche et le débat doctrinal,
puis par la force.
La croisade contre les Albigeois, prêchée par Innocent III en 1209 et
menée par Simon IV de Montfort, a comme conséquence, outre le fait
d'éliminer le catharisme, d'affaiblir les pouvoirs locaux au profit des
Capétiens, qui s'établissent durablement dans la région. Ainsi, le comté
de Toulouse est rattaché à la couronne de France en 1271.
Dans les villes s'établissent des évêques et des monastères cisterciens
s'implantent dans toute la région.
Les gens, très religieux, lèguent souvent à leur mort une partie de
leurs terres à l'Église ce qui fait que celle-ci est devient vite une
grande propriétaire terrienne.
Paysage urbain
En 1200, une grande partie des agglomérations de la région sont des
castelnaux et des sauvetés. Les autres ont souvent des origines
gallo-romaines (leurs noms finissent généralement en - ac ou - ville).
Les bastides arrivent donc dans un paysage déjà très humanisé. C'est ce
qui explique entre autres de nombreuses irrégularités dans le
parcellaire de certaines bastides ou des orientations étonnantes
d'églises : il s'agit d'héritages antérieurs à la fondation.
Propriété du sol
La première nécessité pour fonder une bastide est de posséder le sol.
Mais le droit
médiéval était complexe. Souvent avant les fondations il a fallu établir
un contrat de paréage entre le fondateur et les seigneurs voisins.
Celui-ci fixe le statut juridique et fiscal de la bastide. Il prévoit
aussi ce qu'il adviendra si la bastide est un échec ou si elle croît.
Il existe au Moyen Âge trois formes de propriété du sol pour un seigneur
qui étaient sous la forme de droits qu'un seigneur pouvait détenir ou
partager :
droit de prélever l'impôt seigneurial (le cens, la dîme)
droit de rendre la justice (haute et/ou basse)
droit de vendre la terre
Souvent la terre est détenue en copropriété, un seigneur possédant tous
les droits à la fois sur une même terre étant très rare.
Au moment de la fondation des bastides il faut tenir compte de ces
propriétés du sol. Dans des bastides comme Revel, le roi est le seul
seigneur laïc.
La fondation en est donc grandement facilitée. Mais ailleurs de longues
tractations entre les co-seigneurs doivent avoir lieu. De plus,
quelquefois des constructions existent déjà sur les terres choisies pour
fonder une bastide, par exemple des granges.
Le contrat de paréage définit les droits des divers seigneurs et prévoit
les limites de la bastide et ce qui y sera fait à l'intérieur :
nombre de maisons, de jardins, de terres cultivables,
taille des parcelles,
les bâtiments civiques et religieux et leur défiscalisation.
Cependant le contrat de paréage ne fixe pas le statut des forêts et
pâturages autour de la ville (propriété collective ou répartition égale
entre les nouveaux venus). C'est à la nouvelle communauté de le décider.
De plus, il ne fait d'aucune manière allusion au plan de la nouvelle
ville.
Une nouvelle
vision du monde
Alcide Curie-Seimbres écrivit en 1880 « Des bastides qu'on croit voir de
grands potagers distribués en carreaux et desservis par des allées
droites".
En effet, les bastides sont très ordonnées orthogonalement. Cela rompt
fortement avec les formes romanes des villes que les contemporains
pouvaient observer.
Une hypothèse est que les urbanistes médiévaux auraient trouvé dans les
monastères les modèles romains et les auraient reproduits.
Mais cette hypothèse se heurte au fait que les monastères n'ont jamais
formé les architectes. Vitruve n'est redécouvert et diffusé qu'au
XVIe siècle. Et surtout, la logique qui sous-tend le tracé quadrillé des
bastides n'est pas du tout la même que celle des tracés des Romains.
Les urbanistes médiévaux ont bel et bien fait du neuf. Ils ont inventé
un urbanisme gothique. Mais cela s'est fait de la même manière que les
architectes gothiques. Ca ne vient pas des progrès techniques.
L'originalité de l'architecture gothique tient en une réflexion très
achevée sur le thème de la standardisation.
Éléments d'une bastide a place.
Au centre de chaque bastide on trouve invariablement une place. C'est
totalement contraire aux exemples des villes des siècles précédents, les
castelnaux et sauvetés.
Aucune cité gallo-romaine de la région n'a gardé à cette époque sa place
antique. Les castelnaux et sauvetés n'ont pas non plus de place.
En Italie toute proche non plus on n'en trouve pas.
Peut-être l'idée vient-elle du Proche-Orient. En effet y existaient des
places magnifiques et les croisés n'ont pas dû manquer de le mentionner
dans leurs récits à leur retour. Dans tous les
cas, le prototype de la place des bastides est celle de Montauban.
Dans cette ville, la place est un carré de 70m de côté.
Elle commande la division de la ville en quartiers appelés gaches.
Il n'y en a qu'une seule par bastide à l'exception de Saint-Lys (une
pour le marché et une pour l'église) et à Albias.
Il n'y a jamais eu de rapport direct entre la taille de la place et
l'importance de la bastide.
On choisit pour l'implanter le terrain le plus plat possible.
Mais surtout, le plus important, c'est que le fondateur cherchait à la
soustraire au maximum aux courants de circulation. Généralement l'accès
se fait aux angles.
On peut dénombrer 3 types de formes de place. Cependant, sur les 300
bastides recensées à ce jour, seules une centaine ont une place entrant
dans l'une des catégories :
Plan à enveloppement : la place est entièrement fermée vers l'extérieur.
C'est-à-dire que la place ne touche aucune rue. L'existence de ce type
de places montre bien que la place d'une bastide n'est pas un lieu de
circulation. Ces places sont cependant très rares. Elles se retrouvent
par exemple à Tournay où il s'agit d'un carré de 70m sur 72.
Plan à axe unique :
ce type de place résulte d'un plan de bastide organisé suivant un axe unique (une rue principale étoffée de plusieurs rues parallèles, coupées par des perpendiculaires). La place se trouve alors entre deux rues. L'entrée se fait par les angles. Ces places font en général 50 à 55m de côté.
Plan à quadrillage :
c'est le cas le plus fréquent (c’est celui de Revel), la place de bastide par excellence : une place quadrangulaire avec accès par les angles et dont les façades sont d'un seul tenant (sans andrones).
Cette place
dérive directement de celle de Montauban. Souvent l'emplacement de la
place est un îlot soustrait à la construction privée. Elle se situe en
général au centre de la ville et en commande tout le plan. Ce sont les
plus belles et les plus grandes places de bastides. Elles font 60 x 60m
en moyenne au XIIIe siècle, 90 x 90m au XIVe. Les plus grandes vont
jusqu'à 70 x 140m (deux îlots).
Rôle de la place
La place est d'emblée réservée au marché. Elle a en effet une fonction
économique très forte (plusieurs chartes stipulent que tout ce qui est à
vendre doit d'abord être amené sur la place).
Mais rapidement elle acquiert aussi une fonction municipale par la
construction de maisons communes sur la place. Cette fonction était
d'abord assurée dans l'église mais se laïcise très vite.
La place devient un centre d'attraction, voire un symbole social. En
effet, les maisons donnant sur la place sont souvent celles des plus
anciennes familles (celles s'étant établies en premier).
Couverts (las Garlandas à Revel)
Aujourd'hui lorsqu'on se promène sur la place d'une bastide on remarque
qu'elle est souvent à portiques. C'est un aménagement qui n'a pas été
fait que dans les bastides. On appelle ces places : places à couverts ou
places des cornières.
En fait, il s'agit d'ambons rajoutés aux façades des maisons après leurs
constructions.
Dans un premier temps ils étaient en bois puis ils sont remplacés par
des couverts en pierre plus tard. Les arcs les soutenants sont au départ
des arcs brisés, puis au fil des reconstructions seront remplacés par
des arcs en plein cintre.
Halles
Au centre de la place on trouve aussi souvent une halle de marché.
Comme les couverts, elle apparaît plus tard.
Il s'agissait de protéger les marchands du soleil et de la pluie.
À l'étage loge souvent le pouvoir consulaire. C'est bien plus simple
pour surveiller.
La halle a souvent un clocher. Elle a véritablement tous les attributs
d'une cathédrale commerciale. C'est une basilique ayant retrouvé ses
origines romaines.
Murailles
Les fondateurs ne construisaient pas de fortifications autour des villes
en général. Ils laissaient aux habitants le soin de le faire par un
impôt ou un octroi.
Cela fait que le jeu d'interférences entre la régularité du parcellaire
et le tracé du mur d'enceinte est à l'origine d'une grande diversité
dans le plan des bastides.
Il est rare qu'elles soient construites à la fondation de la bastide,
même dans celles implantées près d'une frontière (celles de Revel ont
été construites en 1355 soit 13 ans après la fondation – 1355 c’est
aussi le passage du Prince Noir à Castelnaudary).
Il s'agit en effet d'une époque calme (ce n’est pas le cas pour Revel)
entre la croisade des albigeois et la guerre de Cent Ans.
Au début de la guerre de Cent Ans, de nombreuses bastides furent
détruites du fait de l'absence de défenses. Les autres s'entourèrent
hâtivement de remparts de pierre.
Maisons
Les habitants qui s'installaient dans la bastide avaient en général un
an pour la construire, cela pour inciter les nouveaux venus à
s'installer durablement. Les premières maisons sont donc assez
rudimentaires en général.
Il existe des règles d'implantations très précises :
l'alignement de la façade avant est obligatoire
elles doivent être d'un étage en plus du rez-de-chaussée
elles sont non-mitoyennes (sauf sur la place) : entre deux maisons est
intercalé un androne (ou entremis), un espace de 25 à 40cm de large
destiné à éviter la propagation des incendies et à faciliter
l'écoulement de l'eau (à Revel on ne trouve pas de traces d’andrones).
Avec le développement économique, l'espace urbain mute. Autour de la
place, une petite halle s'établit devant chaque échoppe : ce sont des
couverts, des arcades, des amabans ou des garlandes (voir ci-dessus
couverts). Puis ce rajout apparaît dans les rues commerçantes. Sous les
rues des caves se creusent et au-dessus, certaines maisons se faisant
face se relient par des pontets.
Rues
Les rues principales, appelées charretières (carreyra en occitan) (parce
qu'elles permettent le passage de charrettes) font de 6 à 10m de large.
Elles longent les façades des maisons. Elles sont souvent les axes
longitudinaux de la bastide.
Les rues secondaires, appelées transversales ou traversières, font de 5
à 6m de large, mais pouvaient aussi faire de 2 à 2,50 m. Elles coupent
fréquemment les rues charretières.
Enfin, les passages ou venelles font elles de 1 à 3m de large. Elles
sont à l'arrière des ayrals. On les appelle aussi parfois carreyrou.
La bastide se
compose dans le sens de la longueur de 1 à 8 rues. Ce nombre varie avec
l'importance de la bastide. Lorsqu'il n'y en a qu'une seule, on
l'appelle bastide-rue ou village-ruban. Il s'agit des bastides s'étant
le moins développées. Une cité classique en damier possède au moins 4
rues parallèles (à Revel il y en a cinq du sud au nord et deux de l’est
à l’ouest).
La chaussée est en terre mais quelquefois recouverte de pavés ou de
galets. Elle est constituée de deux plans inclinés vers un caniveau
central.
Types de terrains
Chaque bastide contenait soit 3, soit 4 types de terrains disposés,
organisés par types selon des couronnes autour du centre ville. Ces
terrains étaient tous divisés équitablement entre toutes les familles
venant s'établir dans la ville.
Ayrals
Au centre se trouvaient ces terrains découpés en parcelles régulières de
8m sur 24 en moyenne, appelées ayrals, et destinées à être bâties. On a
cependant des exemples de bastides avec des ayrals de 12 x 28m, ou
d'autres d'ayrals d'à peine 10m de profondeur. Cependant, on note que
les bastides de même taille avaient des lots de tailles semblables. De
plus, une proportion simple était maintenue entre la largeur et la
longueur de l'ayral, souvent de 2 ou 3.
On sait aussi que les 8m de largeur de façade sur rue sont dus au fait
qu'il s'agit de la portée économique maximale d'une poutre en bois.
Le fond de l'ayral était utilisé pour y implanter une cour, des latrines
et parfois une remise (ou aussi un « riou merdal »).
Le nombre
d'ayrals dans une bastide était limité. Il était défini dans le contrat
de paréage et pouvait varier de plusieurs dizaines (plus de 20 à Revel)
à plusieurs milliers (3000 à Grenade - Haute-Garonne).
Il est intéressant de noter qu'il n'y avait aucune dérogation faite sur
la régularité du parcellaire. Bâtiments publics et notables ne
bénéficiaient pas d'une parcelle de taille supérieure. Cependant, on
leur réservait couramment le droit de s'étaler sur plusieurs lots
voisins.
Jardins
Ceux-ci se trouvaient sur la deuxième couronne en partant du centre,
contigus aux ayrals. Ils étaient du même nombre que les maisons. Leur
superficie était réduite. Il y a souvent un rapport de proportion entre
la superficie de l'ayral et celle du jardin, 2 ou 3. La moyenne de
superficie est de 5 à 7 ares.
Vignes
On trouve ce type de terrain dans de nombreuses bastides mais pas dans
toutes (à Revel les vignes se situaient sur le versant montant à Saint
Ferréol, donc en dehors des murs de la ville).
Parfois il n'y avait qu'une partie de la population qui avait droit à
posséder un terrain pour cultiver la vigne.
Arpents
Les terrains de culture, appelés arpents, ceinturent toute la ville. Ils
sont extra-muros.
Leur taille moyenne est de 5 à
6ha, ce qui était largement suffisant vu les instruments rudimentaires
de l'époque.
Ici aussi
chaque famille recevait à son établissement dans la bastide un arpent de
même superficie.
Dans certaines bastides de défrichement, l'arpent était couplé à tout
autre terrain que la famille pourrait défricher.
Par exemple à Bouloc, chaque famille recevait 7ha et pouvait l'agrandir
de tout terrain de forêt qu'elle saurait défricher.
Des padouvencs existent à
Revel, il y en avait quatre de
20 hectares environ (celui de Castres, de Soréze, Notre Dame, Saint
Antoine). Il s’agissait de terrains vagues qui servaient à la
dépaissance des animaux domestiques lâchés en liberté (article 27 de la
charte) dans
la bastide.
Un grand nombre de bastides sont à plan inorganisé, mais une forte
proportion de fondations détient un plan particulièrement net.
Il semble qu'il y ait eu un modèle adapté à chaque fondation. En effet,
plus de la moitié des fondations ont été établies sur la croisée de deux
directions perpendiculaires qui, complétées par de nombreuses
parallèles, donnent un quadrillage.
Il existait au Moyen Âge une corporation de lotisseurs chargés de
diviser les lots sur le terrain et de prévoir leur destination. Mais il
est certain qu'on n'a pas fait appel à eux pour les bastides.
En fait, d'après les textes du XIIIe siècle nous étant restés, il semble
que ce ne soient pas des spécialistes qui aient mis en forme les
bastides. Il s'agirait plutôt de notaires, juges, baillis, sénéchaux,
voire des évêques.
Ce sont eux aussi qui apparemment auraient réalisé les éléments
indispensables de la ville que sont les puits, les fontaines.
À partir de
l'ensemble des bastides, on peut catégoriser en 5 types les plans.
Inorganiques ou embryonnaires
Elles sont soit totalement désordonnées, soit à l'état d'un embryon de
plan.
Les raisons peuvent être diverses :
ce sont des bastides fondées à partir de hameaux existants,
elles n'ont été que très faiblement peuplées, c'est un échec relatif de
la bastide
tout simplement les fondateurs étaient sans ou avaient moins de rigueur.
Circulaires
La seule bastide circulaire existante est Fourcès dans le Gers.
Ce type de bastide est donc très rare.
À enveloppement
Généralement il s'agit de villages n'ayant pas été créés de toutes
pièces au départ. Ils ont été précédés soit par une église, soit par un
noyau de maisons.
Les nouveaux quartiers s'implantent autour du noyau initial et le
noient.
À un seul axe
Ce sont les plus nombreuses. Lavedan estime qu'elles représenteraient
entre 30 et 40 % du total des bastides.
Elles sont généralement situées en plaine.
Elles sont construites comme leur appellation le suggère sur la base
d'une rue principale. Celle-ci était au Moyen Âge la voie de passage
obligé et reliait généralement les deux portes principales de la ville.
Parfois la ville ne s'est pas élargie autour de cette rue principale. La
place se trouve alors être un étalement, une excroissance de la rue.
Souvent, de nombreuses transversales coupent la rue principale.
On parle alors
de tracé en « arête de poisson ». C'est une forme de bastide s'adaptant
bien au relief, particulièrement lorsqu'il est escarpé. On les retrouve
d'ailleurs souvent sur des croupes allongées, comme Gimont dans le Gers.
Cette bastide fait 1000m de long pour 300m de large. La rue charretière
est la route d'Auch à Toulouse qui suit à cet endroit la crête. Elle est
coupée dans la bastide par de nombreuses transversales très raides.
Quelquefois la rue principale est
doublée et la place se situe alors entre les deux.
À deux axes (c’est le cas de Revel)
On aborde ici le cas des bastides considérées comme l'aboutissement du
modèle gothique de la bastide. Elles sont considérées comme les plus
typiques du mouvement. Dans tous les cas, il s'agit du modèle le plus
élaboré.
La base du plan, ce sont deux axes perpendiculaires commandant un
échiquier. Les rues se coupent alors en angle droit.
La place est souvent centrale, ou proche du centre, carrée ou
rectangulaire.
Les îlots sont réguliers, généralement rectangulaires.
Les contours de la bastide sont eux aussi géométriques : carré,
rectangle, parallélogramme, hexagone (c’est le cas de Revel) ou ovale,
les formes sont multiples.
Ce sont des bastides qu'on retrouve autant en hauteur qu'en plaine, mais
c'est dans cette situation qu'elles donnent leurs plus belles formes
géométriques.
Charte des coutumes
La fondation d'une bastide se fait par un certain nombre d'étapes :
choix de l'emplacement
choix du nom de la bastide.
Les noms des
bastides ont des noms forgés étymologiquement sur 5 racines :
- du nom du sénéchal les ayant fondées : Libourne (du nom de Leyburn)
- de l'autorité royale : Montréal ;
- rappelant des villes
extérieures : Grenade
- ressemblant aux noms de villes plus anciennes (racines latines)
- marquant leur origine ou leurs privilèges : Villefranche, La Bastide
(Revel viendrait du nom du seigneur Pierre de Mont-Revel qui devait
être seigneur de la Tour de Fournes près de St Ferréol – un texte de
1174 précise que le vicomte Roger Trencavel autorise le seigneur de
Saissac de fonder un castrum dit de MontRevel).
suit le contrat de paréage entre les seigneurs co-propriétaires
enfin, la conception du plan de la ville.
Une fois ces étapes franchies la ville n'est toujours pas fondée. Il
faut qu'une population vienne l'habiter. Il faut attirer des familles de
paysans. Pour cela, il est établi une charte de coutumes, qui est en
fait une liste de privilèges accordés aux habitants. Elle est d'ailleurs
présentée ainsi, comme une suite de privilèges, accordés l'un après
l'autre, comme si on en rajoutait de temps en temps pour attirer de
nouveaux habitants, ce qui était sûrement d'ailleurs le cas (dès le
départ on estime à 300 « colons » la population de Revel, Dom Devic et
Dom Vaissette annoncent le chiffre de 3000 qui paraît surestimé).
Ces privilèges étaient de 3 sortes :
des allègements fiscaux,
des mesures judiciaires et
des mesures honorifiques. Tous ces
privilèges donnés aux habitants, l'égalité pour ce qui est de la
distribution des terres et la quasi-égalité juridique dont bénéficient
les nouveaux bourgeois peuvent faire apparaître les bastides comme des
terres de liberté et d'égalité. Mais elles n'avaient pas du tout ce but
là. Elles ne cherchaient pas à remettre en cause le droit féodal, ni à
créer un désordre. Il ne s'agit que d'ajustements locaux afin
d'améliorer le rendement économique et fiscal de terres sous-exploitées.
Si les habitants paraissent libres, ils ne jouissent en fait que d'un
régime économiquement libéral. S’ils paraissent égaux, ce n'est qu'une
égalité des chances à leur installation. De toute façon, l'inégalité et
l'absence de libertés individuelles proviennent surtout de l'état de la
société médiévale.
D'ailleurs, pour permettre l'établissement de ces privilèges, les
bastides ont dû refuser l'établissement en elles de classes ayant déjà
des obligations ou privilèges, incompatibles avec ceux-ci.
Ainsi, les serfs, les nobles et les religieux sont interdits
d’installation dans la ville. Certains petits nobles vont préférer
troquer leur titre de noblesse contre celui plus lucratif de bourgeois
et faire don de leurs terres à la bastide.
Il n'existe pas non plus d'égalité entre les hommes et les femmes à
l'intérieur de la bastide. Cependant, les femmes sont mentionnées dans
les chartes de coutumes et ont certains droits reconnus même s’ils
restent faibles.
Par exemple :
dans la très grande majorité des bastides les hommes n'ont pas le droit
de battre leur femme, le cas d’adultère est puni
la dot est réglementée et parfois obligatoire aussi pour les hommes.
Les lépreux ne
sont pas bienvenus dans les bastides. Des léproseries les accueillent
dans quelques bastides mais ils sont de toute façon exclus de la société
(à Revel une léproserie aurait existée… face au cimetière actuel, donc
en dehors des murs). Ils sont obligés de porter un insigne montrant
qu'ils sont malades et ils doivent vivre à part des personnes saines.
La législation de la Gascogne entre 1290 et 1326 dit même : « Dans les
bastides ou nouveaux villages où ne se trouve pas une léproserie, les
lépreux ne peuvent recevoir l'aumône ».
Les juifs sont un autre groupe de personnes ayant souffert d'exclusion
dans les bastides.
Au début il n'y avait aucun problème. À Cologne, la rue des Juifs
donnait même sur la place.
Mais comme les lépreux, dans toute la France les juifs vont être
pourchassés au XIVe siècle. Cela commence en 1306 lorsque le roi
Philippe le Bel expulse tous les juifs du royaume, confisque et met en
vente tous leurs biens.
Évolution des bastides
Les bastides peuvent réussir et il en existe encore de nos jours. Mais
elles peuvent aussi rater, se vider de leur population. Globalement les
bastides ont connu trois périodes de sélection.
Dès l'origine, un bon nombre est éliminé. Les rescapées connaissent une
croissance agricole et commerciale qui provoque des mutations profondes
dans l'organisation du sud-ouest.
La guerre de Cent Ans et la persistance de l'insécurité oblige les
bastides à s'équiper de murs.
Les plus lentes dans cette course à l'équipement défensif sont rayées de
la carte. Lorsque le calme revient, la région connaît une prospérité
inégale. La bourgeoisie s'affirme et c'est l'âge de l'ouverture des
grands chemins. Ceux-ci favorisent bien évidemment les bastides
implantées sur leur long.
Bastides
Par départements (liste non exhaustive) :
Ariège :
Campagne-sur-Arize, La Bastide-de-Bousignac, La Bastide-de-Sérou,
Mazères, Mirepoix, Rimont.
Aude :
Arques, Belpech, Carcassonne, Castelnaudary, Labastide-d'Anjou,
Montréal.
Aveyron :
La Bastide-l'Évêque, Réquista, Sauveterre-de-Rouergue,
Villefranche-de-Rouergue, Villeneuve-d'Aveyron.
Dordogne
(18 bastides) : Beaumont-du-Périgord, Beauregard-et-Bassac, Bénévent,
Domme, Eymet, Fonroque, Lalinde, Molières, Monestier, Monpazier,
Puyguilhem, Roquepine, Saint-Aulaye, Saint-Barthélemy-de-Bellegarde,
Saint-Louis-en-l'Isle, Vergt, Villefranche-de-Lonchat,
Villefranche-du-Périgord.
Gard :
Aigues-Mortes.
Haute-Garonne :
Aignes, Alan, Beauchalot, Blajan, Bouloc, Boulogne-sur-Gesse, Boussens,
Calmont, Carbonne, Cazères, Fonsorbes, Gaillac-Toulza, Grenade,
Labastide-Beauvoir - Labastide-Clermont, Lavelanet-de-Comminges,
Lestelle-de-Saint-Martory, Le Burgaud, Le Fousseret, Nailloux,
Montastruc-la-Conseillère, Montréjeau, Palaminy, Plaisance-du-Touch,
Revel, Rieumes, Saint-Félix-Lauragais, Saint-Lys,Saint-Sulpice-sur-Lèze,
Villefranche-de-Lauragais.
Gers :
Avensac, Barcelonne-du-Gers, Barran, Bassoues, Beaumarchés,
Bretagne-d'Armagnac, Castéra-Verduzan, Cologne, Fleurance, Fourcès,
Gimont, Jegun, Labastide-Savès, Lannepax, Marciac, Masseube, Mauvezin,
Miélan, Mirande, Monguilhem, Montréal-du-Gers, Pavie, Plaisance,
Saint-Clar, Sarrant, Seissan, Solomiac, Valence-sur-Baïse.
Gironde :
Cadillac, Créon, Blasimon Libourne, Sauveterre-de-Guyenne, Monségur,
Sainte-Foy-la-Grande, Pellegrue.
Landes :
Arouille, Baigts, Betbezer-d'Armagnacr, Bonnegarde, Cazères-sur-l'Adour,
Coudures, Duhort-Bachen, Geaune, Grenade-sur-l'Adour, Hastingues,
Labastide-Chalosse, Labastide-d'Armagnac, Miramont-Sensacq, Montégut,
Montfort-en-Chalosse, Pimbo, Port-de-Lanne, Rondebœuf, Roquefort,
Saint-Gein, Saint-Geours-d'Auribat, Saint-Justin, Saint-Sever, Sarron,
Sorde-l'Abbaye, Souprosse, Toulouzette, Villenave, Villeneuve-de-Marsan.
Lot :
Beauregard, Bretenoux, Castelfranc, Castelnau-Montratier, Cazals, Fons,
Labastide-du-Haut-Mont, Labastide-du-Vert, Labastide-Marnhac,
Labastide-Murat, Les Vitarelles, Montcabrier, Montfaucon, Orgueil,
Puybrun, Rudelle.
Lot-et-Garonne :
Aiguillon, Damazan, Durance, Laparade, Miramont-de-Guyenne, Monflanquin,
Montpezat, Penne-d'Agenais, Puymirol, Sainte-Livrade-sur-Lot,
Sérignac-sur-Garonne, Villeneuve-sur-Lot, Villeréal.
Pyrénées-Atlantiques :
Ainhoa, Arzacq-Arraziguet, Assat, Asson, Bellocq, Bougarber, Bruges,
Gan, Garlin, Navarrenx, Nay, La Bastide-Clairence,
Labastide-Villefranche, Lestelle-Bétharram, Montaut, Rébénacq,
Vielleségure.
Hautes-Pyrénées :
Avezac-Prat-Lahitte, Castelbajac, Galan, Lannemezan, Lubret-Saint-Luc,
Montgaillard, Peyrouse, Rabastens-de-Bigorre, Saint-Martin,
Sère-Rustaing, Saint-Sever-de-Rustan, Tournay, Trie-sur-Baïse, Vidalos.
Tarn :
Arthès, Castelnau-de-Lévis, Cordes, Labastide-Rouairoux, Lisle-sur-Tarn,
Pampelonne, Réalmont, Saint-Urcisse, Técou, Valence-d'Albigeois.
Tarn-et-Garonne :
Angeville, Beaumont-de-Lomagne, Castelsarrasin, Montauban,
Monclar-de-Quercy, Montech, Nègrepelisse, Valence-d'Agen,
Verdun-sur-Garonne