Société d’ Histoire de Revel Saint-Ferréol LES CAHIERS DE L’ HISTOIRE - N°19 - Année 2014 |
LES HUGUENOTS - Dossier transmis par Jean Paul Carrié
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Transmise par Jean Paul Carrié, cette étude a été publiée dans la « Revue Historique de Toulouse » tome XXVII N° 87 – 88 - troisième et quatrième trimestres 1939 – Toulouse. Imprimerie Berthoumieu.
Même si certaines informations sont erronées (en particulier la date de fondation et l’origine de la fondation de Revel), cette publication qui fourmille de nombreux détails grâce à son auteur (il n’est pas identifié) est digne d’intérêt car les principales données proviennent directement de documents d’archives inédites.
INTRODUCTION
Par Bernard Velay
La « Guerre de Religion » déclenchée, les faits étaient là pitoyables, exploits et atrocités sans nom ; ils sont exposés ici avec émotion et bien souvent avec trop d’exaltation, d’outrance sans aucune complaisance à l’égard des huguenots, certes auteurs du massacre des Dominicains du couvent de Revel mais fallait-il pour autant les diaboliser, n’étaient-ils pas également victimes d’une exaspération ?
Pour faire bonne mesure, il faudrait lire les textes relatant les exactions et les tueries commises hélas au nom de la foi par les dragonnades impitoyables de sa majesté très catholique à l’encontre des courageux camisards cévenols si attachés à la liberté de leur culte.
« Les Huguenots chez les Dominicains de Revel » curieux titre ! On dirait qu’ils y sont accueillis ! Il doit être considéré comme un témoignage de la faiblesse des hommes déchaînés même pour des causes qu’ils estimaient justes ! »
Cette violence si dangereuse pour la paix a endeuillé villes et villages et n’a pas épargné notre bonne bastide de Revel que le roi Philippe VI de Valois lui aussi très chrétien, avait fondée dans un souci d’harmonie et de prospérité de ses habitants, qu’ils soient nobles, bourgeois, artisans ou manants …
Le philosophe protestant Pierre Bayle (1) qui a été étudiant au collège de Puylaurens n’a-t-il pas démontré : « qu’il était vain et stupide de prétendre convertir des gens de force ».
N’a-t-on pas exagéré à l’endroit des Dominicains, en les considérant que sous l’angle obtus de l’inquisition, oubliant ainsi leur œuvre admirable et charitable d’éducation des jeunes. Voisins de Sorèze, cela ne peut nous échapper …
Et puisqu’il est question du père Lacordaire dans cette rude et triste histoire, j’aimerais citer ce passage d’une conférence de Carême que ce grand prédicateur a donnée à Toulouse en 1854 :
« On peut ôter au sage son bonheur parce qu’on peut lui ravir des choses qu’il aime et qu’il a le droit d’aimer mais la paix n’est au pouvoir de personne.» Quelle proximité avec le bel enseignement de Pierre Bayle !
1-
. « Pierre Bayle un Ariégeois citoyen du Monde » par Hubert Bost directeur des études à l’école des Hautes études de Paris ? Il occupe la chaire « Protestantisme et culture dans l’Europe moderne 16e et 18e siècle »
« La prétention de convertir les gens de force » n’est plus d’actualité du moins concernant le catholicisme et le protestantisme
Le texte
O lamentable calamité ! O décadence misérable ! O Religion de Saint-Dominique fondée sur tant de Sainteté, agrandie par tant de zèle, enrichie de si éclatantes vertus, à quel état nous vous trouvons réduite, comme la tempête vous a bouleversée ! A quelle source nos yeux puiseront-ils assez de larmes, mes Pères, pour pleurer comme il le mérite ce deuil navrant ? Il semble qu'on ait vu disparaître, jusqu'aux vestiges mêmes de la religion d'autrefois ! »
C'est en ces termes dramatiques que le Père Vincent Justiniani, Maître Général des Frères Prêcheurs (1), s'adressait aux Pères Capitulaires réunis à Avignon en 1561 pour la tenue du Chapitre général. Le tableau est sombre, il n'est pas forcé. Le P. Vincent Justiniani venait de parcourir tout le Midi de la France bouleversé par les guerres de « la Religion ». De l'extrémité de la Provence aux confins du Béarn, il n'avait trouvé que des ruines, là où s'érigeaient auparavant les vastes couvents et les splendides églises de l'Ordre.
Cependant, cette dévastation devait être plus complète encore dans les années qui suivirent. La date de 1561 ouvre justement en Languedoc la période aiguë et sanglante de ces luttes, période qui se prolongea environ une quinzaine d'années. Ce fut alors que les nombreuses villes tombées au pouvoir des Réformés, connurent non seulement le sac et le pillage des couvents, mais encore le meurtre des religieux et des habitants catholiques.
Les Actes (les Chapitres généraux qui suivirent celui d'Avignon, se font l'écho douloureux de cette persécution violente (2). On y trouve comme en un martyrologe la mention de la plupart des religieux de l'Ordre,
massacrés à cette époque par les Huguenots. Ces listes sont cependant loin d'être complètes. Des documents d'archives, dont certains ont été ignorés des annalistes du XVIIè siècle, révèlent souvent des noms et des chiffres que l'on ne soupçonnait pas (3).
On peut situer entre 1561 et 1577 (4), les événements tragiques qui se déroulèrent successivement ou simultanément, dans la plupart des villes du Midi de la France, où les Frères Prêcheurs possédaient des Couvents (5). Dans chacune de ces villes, l'Ordre de Saint-Dominique et la Réforme, s'étaient affrontés dans une lutte sans merci. Dès ses premières manifestations, en Languedoc particulièrement. L’hérésie avait été dénoncée et poursuivie vigoureusement par les Inquisiteurs dominicains. De ce fait, les Frères Prêcheurs avaient encouru la haine des protestants. Dès que ceux-ci s'emparaient d'une ville, ils assiégeaient le Couvent dominicain qui s'y trouvait érigé, s'acharnant sur sa précieuse bibliothèque, brûlant ses archives, détruisant sa belle église, chef-d’œuvre la plupart du temps de l'art gothique méridional.
Un des plus glorieux chapitres de l'Histoire de l'Ordre de Saint-Dominique est à faire. Aucun travail d'ensemble, n'a été encore consacré au rôle héroïque des Frères Prêcheurs pendant la Réforme. Pour le réaliser, il serait à souhaiter que, dans une suite d'études fragmentaires, on donne pour chaque couvent détruit, pour chaque groupe de martyrs ou chaque martyr isolé, un récit détaillé des faits. Les dépôts d'archives conservent de nombreux documents inédits, dont l'origine juridique peut donner à ces récits une valeur et une authenticité incontestables (6). Les Archives Municipales sont, dans bien des endroits, une mine précieuse à peu près inexplorée. Le seul inconvénient, c'est qu'elles sont souvent d'un accès difficile, soit à cause de leur installation défectueuse, soit à cause de l'absence de classement. Les Archives Municipales de Revel forment justement un de ces dépôts peu connus, qui réservent des éléments précieux, sinon uniques, pour étudier la vie et l'action des Frères Prêcheurs dans cette ville, au XVI' siècle.
Un travail ultérieur, utilisera dans leur totalité les documents importants qui nous intéressent, et qui permet-ternit de raconter avec plus de détails et de précision, le martyre des vingt-trois dominicains massacrés en 1576 par les Huguenots (7), Le but du présent article, beaucoup plus restreint, est plutôt de faire connaître la part qu'eurent les Frères Prêcheurs, dans la conservation du culte catholique à Revel, de 1567 à 1630 environ.
En Languedoc, le Couvent de Revel vient presque au dernier rang dans le Martyrologe dominicain de la Réforme. Quant aux dates, mais non pas quant au nombre des religieux massacrés.
Bien qu'assez rapproché de celui de Toulouse et très voisin de celui de Castres, le Couvent de Revel était assez important. Sa fondation se confond presque avec les origines de la ville qui ne sont pas très anciennes. On sait que Revel ne fut d'abord qu'un simple château qu'édifièrent en 1174 deux vassaux de Roger II, vicomte de Béziers. En 1332. Philippe de Valois y fit construire une « Bastide », et les privilèges qu'il accorda, y groupèrent rapidement deux à trois milliers d'habitants.
Quant au Couvent des Frères Prêcheurs, il fut fondé en 1377 par Louis, duc d'Anjou, alors Gouverneur de Languedoc. La translation du corps de saint Thomas d'Aquin à Toulouse était toute récente (1369), et le duc d'Anjou. Sans doute en mémoire de cet heureux événement, mit le nouveau couvent sous le patronage du grand docteur dominicain. Entr'autres privilèges, il obtint du roi Charles V, son frère, l'anoblissement de deux arpents de terre, achetés le 17 septembre 1377 par les Frères Prêcheurs pour la fondation de leur couvent (8).
Les religieux, d'après les documents inédits du XVIè et XVIIè siècle (9), paraissent avoir toujours été assez nombreux dans ce couvent. A l'époque de leur massacre par les Huguenots, ils devaient atteindre le chiffre de 38 à 40 (10).
Les Archives Municipales de Revel nous ont conservé un document précieux, non seulement pour préciser l'action des Frères Prêcheurs dans cette ville au XVIè siècle, comme il sera montré plus loin.
Mais pour nous donner au moins une idée de ce qu'étaient le couvent et l'église de ces religieux au moment où ils furent détruits par les religionnaires (11).
Malgré les lacunes du début, résultant du mauvais état du manuscrit, nous apprenons cependant certains détails intéressants. L'orientation du couvent est décrite d'une façon précise :
« L'église était assez grande; elle mesurait environ treize canes de long sans y comprendre le chœur et le presbytère; et cinq canes de large sans y comprendre les chapelles. Le chœur et le presbytère avoient huit canes de long, le chœur en avoit eine de large comme l'église, et le presbytère trois et demi, estant en angles ronds. Il y avoit quatre chapelles du coté du midi, et quatre du coté de l'aquilon; elles avoient doutze pans de largc dans œuvres, et environ trois canes de long. Les marques des quatre (lu coté d'aquilon restoient avant qu'on eust basti la petite église que nous avons aujourd'huy (1696), maintenant il ne reste que les marques de trois. Le chœur et le presbytère estoient du coté d'orient... (12) l'église du coté du couchant, au même endroit où elle est aujourd'huy.
..... A côté vers le midi estoit le cloistre..... Et la sacristie estoit derrière..... Autour du cloistre estoit le chapitre et une chapelle, le réfectoire et autres offices. Au-dessus estoit le dortoir (exposé) au midy. L'infirmerie estoit au-delà du cloistre du coté (l'aquilon, et les chambres des hommes du coté de midy. Au-delà des bastimens estoit un ..... jardin jusqu'au chemin public qui est entre l'enclos et les murs dela ville. Au milieu du jardin, il y avoit un grifoul avec un bassin; on faisoit venir l'eau par les tuyeaux souterrains du ruisseau qui faisoit moudre les moulins et passoit l'eau dans la ville avant qu'on eust fait la rigole du Canal Royal. »
Couvent de la galerie du Levant. La porte principale sous la galerie et la porte intérieure donnant accès à la cour.
Les seigneurs de Belloc avaient, sur le couvent des Frères Prêcheurs, le titre de fondateurs et protecteurs qui remonte aux origines du couvent. A l'époque de la fondation, ils donnent aux religieux le « Pré de Vaure » et leur assurent une rente annuelle de trente-deux cestiers de blé pour leur entretien. Cette rente était encore exactement servie au moment Où Raymond Parent écrit sa Chronique (1696) (13). D'autres donations faites par la même famille, aux siècles suivants, entraînèrent parfois pour les Frères Prêcheurs des charges qu'ils ne purent continuer à remplir, et qui donnèrent lieu à des transactions. En 1506 (14), Robert de Manent, seigneur de Belloc leur avait donné une maison « à la rue des Tinturiers ou de Laigne », à charge pour eux d'aller célébrer .chaque semaine quatre messes basses au Château de Belloc, mais les religieux décimés et dispersés par les guerres religieuses n'étaient plus, au début du XVIIè siècle en état de remplir cette obligation (15).
Le but précis de cet article est de suivre les Frères Prêcheurs de Revel, dans ces années troublées, où ils maintenaient avec une énergie admirable l'exercice du culte catholique, dans la ville soumise aux Huguenots. Cependant, il sera opportun de revenir en arrière pour avoir mine idée de ce que fut la persécution religieuse qu'ils subirent.
Pour ce bref récit nous puiserons, non seulement dans les documents inédits de Revel, dont la Chronique de Raymond Parent est leplus important, niais aussi dans un des chroniqueurs de l'Ordre, le Père Jean (le Sainte-Marie de Réchac. Ce religieux a publié. Dans la première partie du XVIIè siècle : (16) « Vies des Saints et Bienheureux de l'Ordre de Saint-Dominique. » S'intéressant très particulièrement aux martyrs de la Réforme protestante au XVIè siècle, il se livra à de longues et minutieuses enquêtes, dans toutes les villes où les Calvinistes avaient détruit des couvents de Frères Prêcheurs et massacré des religieux.
Sur place, il repérait les ruines, consultait les Archives qui avaient échappé au feu ou aux lacérations, il interrogeait les survivants de cette époque troublée. Son récit a donc la valeur des témoignages contemporains.
A Revel, l'enquête de Jean de Réchac fut particulièrement fructueuse, et, ce qui est pour satisfaire les plus exigeants en matière de critique historique, il recueillit les plus importants témoignages, de la bouche même d'un vieil huguenot nommé Fissel, âgé alors de 78 ans. Un des plus anciens pères dominicains de la Province, témoin des faits, put lui aussi en faire un récit détaillé.
L'histoire de Languedoc (17) parle d'une seule prise de Revel en 1577. En réalité, la ville tomba trois fois au pouvoir (les Calvinistes : le 29 septembre 1567, le 13 décembre1576, et en l'année 1621. Elle fut même surprise une quatrième fois par M. de Rohan, le 26 octobre 1627 (18).
Couvent de la galerie du Levant.
Architecture d’une porte intérieure.
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Couvent de la galerie du Levant.
En Mai 2009, lors des travaux de réfection, une équipe de la Société d’Histoire de Revel Saint-Ferréol
était intervenue et avait mis à jour un ancien sol composé de pierres jointées …
Il semble bien que si les Calvinistes ne se rendirent vraiment maîtres de Revel qu'en 1567 'et n'y commirent leurs atrocités qu'à cette date les Frères Prêcheurs souffraient depuis plusieurs années déjà de l'état de trouble dans lequel se trouvait plongé le Languedoc. La population de Revel et des environs, déjà divisée par cet esprit nouveau qui semait la discorde et lâchait la bride aux pires instincts, rendait leur ministère ingrat et difficile. D'autre part, et pour plusieurs raisons, ils étaient particulièrement en hutte à l'hostilité des religionnaires. Revel était dans le ressort de l'Inquisition de Toulouse dont l'exercice était confié aux Frères Prêcheurs. Ceux-ci, comme on l'a vu plus haut, s'étaient nettement déclarés les adversaires de la nouvelle hérésie, dès sa pénétration en Languedoc, et avant même qu'on ait pu en constater les manifestations extérieures.
Dès l'année 1516, on voit le dominicain Raymond Gosin (19), nommé Inquisiteur de Toulouse à cette date, mettre au service de la vérité catholique le zèle le plus ardent, doublé d'une éloquence persuasive. Dès cette époque il dirige des procès intentés contre l'hérésie nouvelle.
Cependant, le ministère doctrinal des Frères Prêcheurs ne se bornait pas à poursuivre les Calvinistes, et à rendre contre eux des sentences de condamnation. Fidèles à cette mission apostolique dont saint Dominique leur avait donné un si bel exemple au XIIIè siècle, ils se donnaient avec zèle à une prédication populaire (20), atteignant directement les milieux déjà travaillés par l'erreur. Jamais peut-être, la prédication dominicaine ne fut aussi courageuse et active. Et il arriva parfois que des événements tragiques y ajoutèrent une note héroïque.
Un de ces prédicateurs infatigables, qui parcourait tout le Castrais au moment qui nous occupe, était le père Pierre Guillot, Prieur du Couvent de Castres.
« Il ne faisoit autre chose dans ses prédications que tonner contre les vices et annoncer au peuple quelque grand abandon et très juste de Dieu. Ces cœurs endurcys ne faisant aucun profit
De ses remonstrances, l'hérésie planta son siège dans ce pays (de Castres), et les catholiques zélés et fermes dans la foy, servirent de sujet aux cruautez de ces nouveau calvinistes » (21).
En 1562, alors que les Frères Prêcheurs de Revel vivaient encore Jans une demi-sécurité, les Huguenots ne devant être maîtres de la ville que cinq ans plus tard, ceux de Castres subissaient la plus odieuse persécution. Enfermés au nombre de quarante dans leur couvent par les hérétiques, avec quatre cents catholiques, ils étaient sollicités chaque jour avec menaces, d'embrasser la religion réformée.
Le P. Pierre Guillot, prieur du Couvent, paraissant être l'âme de la résistance, fut mis à part dans une basse fosse, où il passa plusieurs semaines avant d'être cruellement massacré. Il faut lire ce long et douloureux martyr dans Jean de Réchac pour avoir une juste idée de la « modération » des réformés.
Un détail assez curieux nous apprend que les Huguenots de Castres n'avaient pas entièrement perdu à l'école de leurs prédicants genevois, le goût du beau langage et de l'art oratoire :
« Le Père Pierre Guillot avoit un grand talent de prêcher la parolle de Dieu, et les nouveaux dogmatisants n'ayans aucun ministre qui put l'approcher de bien loin pour débiter ses pensées, ils le vinrent flatter en prison, et le supplier de leur faire quelques exhortations, sans rien toucher des poins qui estoient en controverse. Il le fit en partie, car enfin il se laissoit emporter par son zèle et déclamoit contre la fausseté de cette nouvelle religion. Ce qui aigrissoit au dernier point les hérétiques, et au sortir de la chaire, ils le batonnoient dos et ventre, et le ramenoient en prison. Cecy luy arriva cinc ou six fois, et de plus en plus, nonobstant les promesses qu'il faisoit de ne parler que de choses morales, il tonnoit contre Calvin et ses sectaires, et à proportion, il étoit moulu et brizé de cous » (22).
Tous ces détails lamentables, et dans la suite la nouvelle du martyr du courageux Prieur et de ses compagnons, parvenaient rapidement à Revel si proche de Castres, faisant pressentir la crise imminente (24). Elle éclata soudain. En la fête de Saint-Michel, 29 septembre de l'année 1567, la ville tomba au pouvoir des rebelles.
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Cette première sédition fut violente, et les détails suivants sont éloquents dans leur brièveté. Nous les puisons, soit dans les documents de Revel, soit dans Jean de Réchac qui les recueillit de la bouche même de ce vieux calviniste Fissel, nommé plus haut :
« Le sous-prieur du Couvent, nommé Sébastien Tire-Ville, un religieux du nom de Raymond de Matunet et vingt et un religieux, ainsi qu'un consul, Monsieur Durand, et plusieurs catholiques furent égorgés. Tués, poignardés, par un nominé Robert, et jetter après dans un puits, qui servoit alors pour nettoyer les habits des religieux. » Cette déposition est confirmée par une autre identique, faite « par un des anciens Pères de la Province du Languedoc » et « la tradition en est commune dans la Ville
De plus, « pour marque de leur glorieux martyre, plusieurs années après leur mort, ce puits regorgeoit des eaux rougeâtres au jour qu'ils furent martyriser, ce que tous les huguenos les plus âgés de la ville confessent encore aujourd'huy ». L'année qui suyvit le massacre, à la date anniversaire, « cette eau rougeâtre dégorgea si fort de ce puits qu'elle courut jusques dans la grande rue de la ville » (25).
Il faut porter au chiffre total de vingt-quatre les Frères Prêcheurs martyrisés à Revel. Peu de temps après la sanglante journée du 29 septembre, deux religieux, alors absents du couvent et voulant rentrer à Revel, furent saisis par les hérétiques « à une portée de mousquet de là.
L'un s'enfuyt et l'autre, nommé Raymond de Cannerie fut tué d'une arquebusade, et son corps laissé en proie aux corbeaux et autres animaux carnassiers » (26).
Conservée et mise en valeur dans la cour de l’ancien couvent de la galerie du Levant, cette « pierre-fontaine » faisait-elle partie du puits ?
Les religieux qui avaient échappé à la fureur calviniste et qui avaient eu la possibilité de fuir de la ville, y revinrent quelques jours après, dès que les rebelles en furent sortis. De leur beau couvent, ils ne trouvèrent plus que les murailles. Revenus au, nombre de quinze ou seize, ils se trouvèrent dans une très grande pauvreté, ce qui les obligea de recourir au Parlement et au Sénéchal, tant pour le recouvrement des titres du Couvent, que pour avoir de quoi subsister (27). En effet, deux mois après les tragiques événements, le 24 novembre 1567, les Frères Prêcheurs présentèrent au Parlement une requête pour rentrer en possession (de leurs biens (28). Cette démarche paraît être restée sans effet, car nous les voyons de nouveau recourir au Parlement le 18 février suivant (1568) (29), puis au Sénéchal de Lauraguais, le. 3 janvier 1571 (30) pour recouvrer les titres, biens et rentes du couvent.
Après cette première sédition de 1567, qui fut assez rapidement réprimée, les catholiques se ressaisirent et continuèrent à vivre dans une paix et une liberté relatives jusqu’'en 1576, époque où les Huguenots se rendirent maîtres de la ville. Mais combien précaire fut l'existence des Frères Prêcheurs durant cette période de dix années ! Les religieux qui avaient échappé au massacre du 29 septembre 1567, étaient rentrés dans la ville quelques jours après au nombre de quinze ou seize. De leur couvent et église, il ne restait plus que les murs. Tous leurs biens avant été pillés ou volés, ils se trouvèrent dans un dénuement absolu.
Après cette trêve de dix années, les Calvinistes prirent la ville de nouveau par surprise. C'était le jour (le Sainte-Luce, le 13 décembre 1576 (31). Les Frères Prêcheurs furent chassés une seconde fois, et leur couvent et église déjà ravagés, subirent une destruction complète :
« Les calvinistes démolirent ladite église et couvent, de telle sorte qu'il n'en resta que la muraille du fond de l'église, et quelques masures de la même église du côté d'aquilon, ou paraissent encore les vestiges d'une partie du chœur, et du presbytère et de troys chapelles. Il resta aussi un coin de cheminée des infirmeries que nous voyons encore aujourd'hui. Il y avoit une autre marque de cheminée dans l'endroit où Mr de Moncalvol fit bâtir sa grange sur notre muraille » (32).
Après cette deuxième sédition de 1576, Revel passa entièrement sous la domination huguenote. Les Frères Prêcheurs furent bannis de la ville et durent se réfugier pour la plupart dans des couvents voisins. Quelques-uns cependant demeurèrent cachés dans la ville, ou tout au moins y revenaient fréquemment en secret, pour donner aux catholiques les secours religieux. Grâce à eux, le culte catholique ne fut pas entièrement interrompu.
Les habitants de Revel en témoignèrent sous la foi du serment dans la suite (33).
Le 22 mai 1603, les Frères Prêcheurs avaient été rétablis dans la ville en vertu de l'Édit de pacification du 23 novembre 1601. (34). Cet Edit, comme tous ceux qui furent rendues dans ces temps troublés, fut loin de pacifier les esprits, et de remettre en état tout ce qui avait été détruit par les rebelles. Les Frères Prêcheurs en rentrant à Revel ne trouvaient plus que des ruines sur l'emplacement de leur beau et vaste couvent. Ils ne pouvaient songer à y revenir. Mais quelques modestes maisons y attenant ou en dépendant étaient encore debout, et pouvaient leur servir de refuge provisoire. Usurpées par les calvinistes, il fallut l'intervention de la force armée pour qu'elles soient rendues à leurs légitimes propriétaires (35). Les religieux réinstallés tant bien que mal, n'eurent pas seulement à souffrir d'un complet dénuement. L'insolence des rebelles les exposait quotidiennement à des injures et à des mauvais traitements. Ils durent faire appel plusieurs fois à la Chambre mi-partie de Castres pour obtenir aide et protection (36).
Les Frères Prêcheurs étaient revenus à Revel au nombre de cinq, ayant comme prieur le Père Jean Maigneri, docteur en théologie et fils du couvent de Revel. Ce dernier avait été, sans doute à dessein, choisi parmi les religieux les plus éminents de la Province.
Les fonctions d'Inquisiteur général qu'il avait exercées quelques années plus tôt, disent assez qu'il n'était pas sans raison redouté des hérétiques (37).
Les religieux « se logèrent dans certaines petites maisons mal bâties, que le couvent avoit sur la garlande de la place, depuis l'église jusques à la maison qui estoit au coin de ladite garlande vers midy, laquelle maison les religieux avaient baillée en engagement à Me Jean Bertran, juge de Revel ». Ils vécurent là dans une très grande pauvreté, ne subsistant que des aumônes que leur donnaient quelques habitants catholiques, et quelques familles nobles du voisinage. Ils célébraient la messe et faisaient leurs prédications, dans la petite boutique de l'une de ces maisons, administrant les sacrements, s'occupant d'instruire le peu de jeunesse catholique qu'il y avait alors à Revel. La paroisse sans curé à cette époque, aurait été sans eux complètement abandonnée. Cependant, cette petite boutique devenait insuffisante pour les besoins du culte, même restreint à l'essentiel. Aidés de quelques aumônes, les Frères Prêcheurs avaient fait bâtir une petite église sur l'emplacement de l'ancienne, avec le consentement des Vicaires généraux de Lavaur, siège vacant. Cette petite église fut bénie le 16 Avril 1603 par l'évêque de Saint-Papoul. En même temps, les Frères Prêcheurs se chargèrent des fonctions curiales, par acte passé le 18 Avril 1603, entre Me Jean Lattes, recteur de Revel, et le P. Bladier, syndic du Couvent (38). Les années suivantes, les recteurs successifs de Revel (en 1604, nous en trouvons un nouveau, Me Jean Fresques), semblent s'être déchargés en partie de leur ministère sur les Frères Prêcheurs (39).
A cette époque, les religieux louèrent à des particuliers propriétaires des maisons de la rue de Soréze, des parcelles de leur enclos, moyennant une certaine somme d'argent pour « l'entrée » et une petite rente annuelle (40).
Les maisons occupées par les Frères Prêcheurs étaient insuffisantes et mal adaptées aux exigences de la vie régulière. Les religieux, malgré leurs ressources restreintes et les difficultés de tous genres qui s'élevaient à chaque instant entre catholiques et huguenots, dans une ville qui était loin d'être pacifiée, résolurent de bâtir un petit. Couvent à côté de la petite église récemment édifiée.
« Ils le construisirent sur la garlande de la place, depuis l'église jusques à la maison tenue par Mr Jean Bertran juge. Ils y firent un dortoir à huit chambres, quatre du costé du jardin, et quatre du costé de la place. Celles du costé de la place étoient soutenues sur les arceaux de briques au lieu de poutres. Celles du costé du jardin avoient des greniers au-dessous; sous les greniers étoient le relier, l'écurie et autres offices. »
Cette disposition se justifie par la vérification qui en fut faite par experts le 16 juillet 1636 (41).
Ce couvent si modeste qui ne rappelait que de très loin celui qui avait été complètement détruit en 1577, ne devait avoir qu'une durée éphémère.
En l'année 1621, les Huguenots prirent de nouveau les armes et chassèrent les religieux pour la troisième fois (42). « Ils pillèrent l'église et le couvent et après, les démolirent.
Notaire à Revel, les Frères Prêcheurs s'obligent « à assister aux processions de la paroisse, les fêtes solennelles et les dimanches, et aux messes des obits jusqu'à ce qu'il y ait 12 prêtres séculiers résidant à Revel pour faire le dit service. Et jean Fesquet, recteur et ses prêtres, s'obligent à bailler tous les ans aux Frères Prêcheurs, à la Saint-Julien, six cestiers de blé et de leur donner part comme aux prêtres séculiers des émoluments (de la chapelle de Sainte-Anne et bassin du Purgatoire » Ces conventions furent la source d'interminables procès (Arch. munic. de Revel).
Le XVII° siècle qui avec la maison de Me Jean Bertran, n'ayant laissé de tous nos bâtiments que la salle qui estoit tenue par Chaumet au costé de la porte de l'église, vers septentrion » (43).
Depuis 1 621 jusqu'à 1636, les Frères Prêcheurs n'eurent point de demeure fixe dans Revel, à cause des troubles fréquents provoqués par les Huguenots. Ils y séjournaient secrètement, mais devaient souvent fuir, menacés par quelque nouvelle sédition. La vie morale du couvent était cependant maintenue. Les changements successifs de prieurs que relatent les actes passés à cette époque, prouvent que la communauté était régulièrement constituée, et procédait à des élections, aux intervalles prévus par les Constitutions.
Comme on l'a vu plus haut, les Frères Prêcheurs étaient rentrés à Revel en 1602 au nombre cinq, avec le P. Maigneri comme prieur. La reconstitution du Couvent offrait de telles difficultés, que pour mener à bien une tâche aussi ardue, la continuité d'une même direction s'imposait. Le P. Maigneri assuma donc la charge de Prieur durant trois triennats environ. Puis nous avons une lacune, manquant de documents, pour connaître les noms de ses successeurs immédiats. Mais à partir de 1625 les élections priorales se font à des intervalles réguliers. De 1625 à 1627, c'est le P. Antoine Bannes qui est prieur (44), et c'est le P. Jacques Delolm qui lui succède dans cette charge. Celui-ci arriva à Revel le 25 juin 1627 pour diriger comme ses prédécesseurs une communauté sans couvent. « Il se mit en dépence chez Me Delmas, prêtre et vicaire, à six sous par jour, mais il n'y demeura presque point étant toujours en voyage pour les affères. »
Le 18 octobre suivant, les troubles recommençant à Revel, le Père Delolm et le frère Jean Delpi, convers, sont obligés de fuir et de se réfugier au couvent de Fanjeaux. Une semaine après, le 26, le P. Delolm revient seul à Revel et tombe en plein dans l'émeute qui vient d'éclater. Le lendemain 27, les troupes de Rohan, grâce à la complicité des habitants calvinistes, prennent la ville par surprise. Les rebelles laissent, ou plutôt obligent à partir les prêtres, les religieux et les habitants catholiques. Force est donc au P. Delolm de quitter de nouveau Revel et pour n'y revenir au moins officiellement cette fois, que le 14 septembre 1629. Cette date marqua le retour des catholiques protégés par l'autorité des Commissaires du Roi, ceux-ci ayant été députés pour procéder à la démolition des remparts de la ville (45). Le P. Delolm demeura jusqu'au 20 septembre dans une maison amie, puis prit pension jusqu'au 17 janvier 1630 chez un nommé Fontès « à deux sous par jour ». On le retrouve ensuite chez un autre habitant de Revel nommé « le Parisien », jusqu'à ce qu'il ait acheté une maison, c'est-à-dire jusqu'en février.
Dans sa vie si mouvementée, le P. Delolm ne cessait pas de travailler avec une admirable ténacité au rétablissement de son Couvent. L'année 1627, un Edit du Parlement avait condamné les Huguenots à donner une maison aux Frères Prêcheurs. Ils ne donnèrent pas la maison, mais une certaine somme « avec laquelle on acheta sans y penser la maison de ce Robert, meurtrier des religieux et catholiques » (46). Cette maison, située rue de Mr Thomas ou de Toulouse, avait passé depuis soit à un héritier, soit à un nouveau propriétaire, Me David Gaillard, notaire, avec lequel le P. Delolm passe l'acte d'achat le 23 février 1630.
Une salle basse fut disposée pour la chapelle, et le 7 mars 1630 (47), jour de Saint-Thomas d'Aquin patron du Couvent, le culte interrompu officiellement depuis 1621 fut rétabli et la messe célébrée. Le 17 mai suivant, une croix fut érigée solennellement. Deux mois après, le 12 juillet, le P. Delolm acheta une cloche du poids de cent quinze livres, à raison de douze sous par livre (48).
L'ancienne maison du meurtrier Robert, de tragique mémoire, n'offrait aux Frères Prêcheurs qu'une installation provisoire. D'ailleurs, les habitants et consuls de la religion réformée, avaient été condamnés en 1633 par un arrêt du Parlement de Toulouse, puis le 29 juillet 1636 par un édit de la Chambre mi-partie de Castres, à rebâtir l'église et le couvent tels qu'ils étaient en 1621, et en attendant que ces bâtiments fussent en état, de fournir une maison commode aux religieux, tant pour leur logement que pour le service du culte (49).
Les consuls calvinistes, par acte du 25 septembre 1633, affermèrent à Me Louis de Goutes, substitut de M. le Procureur général, une maison « scituée à la rue Sainct Anthoine dicte la Tour d'en Landelle, dans laquelle les religieux demeurèrent cinq ans. Puis, le 10 avril 1638. Ces mêmes consuls leur donnèrent la maison de Chauvet, contiguë à l'ancien Couvent.
Soit par la mauvaise volonté des consuls et des habitants calvinistes, soit à cause des difficultés du temps, la réédification de l'église et du couvent ne se faisait que très lentement. Ce n'est que le 27 avril 1643, que les Frères Prêcheurs quittèrent la maison de Chauvet et vinrent s'établir dans le nouveau couvent. Il était loin d'être terminé. On n'y avait encore bâti que deux chambres sur le jardin, et deux autres sur la place, le réfectoire et l'église.
Ces nouveaux bâtiments étaient déjà en très mauvais état, ayant été donnés à l'entreprise à des ouvriers peu consciencieux. « Les religieux ayant convenu avec ceux de la R. P. R. à la somme de deux mille cinc cens livres pour le bastiment qu'ils estoient obligés de nous faire en exécution de divers arrêts du Parlement, et sentence arbitrale de deux présidens et conseillers de la Chambre de l'Édit séant à Castres, ils reçurent cet argent, et le baillèrent par avance aux maistres Isaac Augé, charpentier, et Pierre Augé, masson, frères, sur les biens desquels ils feurent contraints de poursuivre décret, ce qui fust cause que le bastiment demeura dans l'état jusques en l'année 1676 qu'on y adjousta deux chambres du costé du jardin; et on acheva de couvrir la garlande en 1681 et 1682 »
Par transaction du 23 septembre 1646, les frères Augé pour indemniser les Frères Prêcheurs du tort qu'ils leur avaient causé, leur donnèrent deux arpens de vigne au lieu dit de la Peyrière, et « s'obligèrent de travailler leur vie durant, pour la seule dépence, de leurs mestiers de masson et charpentier, jusqu'à ce que le couvent seroit achevé de bâtir >> (51). Il ne le fut jamais, semble-t-il, et la chronique du P. Raymond Parent qui s'arrête à cette date de 1646, ne nous permet pas de suivre plus loin les Frères Prêcheurs de Revel.
A gauche le « Christ en Croix ». et à droite « deux personnages drapés » ( ?).
Planche photo - étude générale.
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Si la Réforme protestante fut impuissante à entamer la vitalité et la puissance de l'Ordre de Saint-Dominique, elle fut cependant fatale à certains Couvents du Midi de la France, qui ne recouvrirent jamais leur splendeur passée. Il faut bien se garder cependant, de confondre les ruines matérielles et les ruines morales.
Le XVIIè siècle qui apporta à la France un magnifique renouveau religieux, ne put réédifier les vastes couvents et églises, témoins de l'âge d'or de l'Ordre. Mais dans des cadres plus modestes, il restaura cet édifice spirituel, que, la Réforme protestante avait pu ébranler mais non détruire.
Sous l'impulsion vigoureuse de grands et saints religieux, la vie régulière reprit dans les couvents dominicains, avec une ferveur animée de la sève des premiers temps. De la Provence, terre d'élection du sentiment religieux, le P. Sébastien Michaëlis arriva en Languedoc, au moment même où la guerre religieuse traversait la phase la plus aiguë. Il implanta sa réforme, justement dans ces couvents languedociens qui avaient le plus souffert des violences des Calvinistes.
Le couvent de Revel fut de ceux qui, sous l'influence de Sébastien Michaëlis, vit refleurir la ferveur antique. Dès 1573, on le voit incorporé à la Province Occitaine, instituée par le Chapitre général de 1569 en vue de rétablir l'observance primitive (52). Tous les dominicains qui l'occupaient au moment des troubles religieux, faisaient donc partie de cette élite, que le célèbre réformateur avait su grouper autour de lui. Pour ce couvent, comme pour bien d'autres, un germe de vie avait été semé, à l'heure même où sa destruction semblait complète et définitive.
Mais ce que n'avait pu faire la Réforme, fut achevé par la Révolution. Le modeste couvent réédifié à grand-peine au XVIIè siècle, disparut dans la tourmente. Après le rétablissement de leur Ordre en France, les Frères Prêcheurs ne reparurent plus qu'accidentellement et en missionnaires, sur ce sol qu'ils avaient fécondé de leur sang.
Le silence et l'obscurité continuent à envelopper dans une sépulture ignorée, les restes des vingt-deux martyrs dominicains de Revel. Cependant, dans un émouvant voisinage, un autre tombeau se dresse, illustre et vénéré celui là.
C'est tout à côté de Revel, à Soréze, que repose le Père Lacordaire, ce grand restaurateur des ruines du passé. Et d'une génération à l'autre, malgré la persécution sanglante ou sournoisement légale, la vie dominicaine continue à s'épanouir, dans la robuste verdeur des chênes séculaires.
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(1)-Vincent Justiniani, élu Maître général au chapitre de Rome eu 1558,succédait à Etienne Usodimare dans cette charge.
(2)- Le Chapitre général de Bologne en 1564 ceux de Rome en 1569 et 1571 celui de Barcelone en 1574. Cf. Reichert, Acta Cap. Gen., t. IX.
(3)- Jean de Réchac, annaliste dominicain du XVII' siècle, dans son Histoire des Saints et Bienheureux de l'Ordre, t. III (Paris, 1647) estime à 151) les Frères Prêcheurs massacrés en France par les Calvinistes durant le XVI' siècle. Ce chiffre est au-dessous de la réalité.
(4)- II faudrait même remonter jusqu'en 1555 pour établir ces dates extrêmes, puisque l'on trouve à cette date le P. Bruni dominicain, massacré par les Calvinistes à N.-I). de Pitié de Mougères.
(5)- En 1561. c'est, à Pamiers, le martyre du l'ère Guillaume Galin et de trois autres dominicains; en 1562 à Toulouse. à Nîmes, à Montpellier. avec le martyre de quatorze religieux-. Mais on ne peut dans cette simple note citer tous les couvents dévastés de la région méridionale, compter tous les religieux massacrés. Voir un essai déjà réalisé dans cet ordre d'idées : M. Th. PORTS, Les Débuts de la Réforme à Pamiers, d'après des documents inédits (Bull. Histor. de Pamiers, année 1930).
(6)- Voir un essai déjà réalisé dans cet ordre d’idées : Mr Th Porte, les débuts de la réforme à Pamiers, d’après des documents inédits (bull. Hist. De Pamiers année 1930).
(7)- Dans l'Année Dominicaine, le P. SOÜEGER consacre aux martyrs dominicains de Revel, une notice de quelques lignes à la date du 13 décembre 1567 (cf. Année Dominicaine, réédition Jevain, Lyon, 1890). Tous les détails en ont été puisés dans le Père Jean-Marie de Réchac, l'annaliste dominicain cité plus haut. Tous deux font une erreur de date. Le premier en fixant à la date du 13 décembre le massacre qui eut bien lieu en 1567. niais le 29 septembre jour de Saint-Michel. Le second en le plaçant au 13 décembre 1576, qui est la date de la deuxième prise de Revel par les Huguenots. L'Histoire de Languedoc donne, pour ce dernier événement, la date du 13 décembre 1577. Quoi qu'il en soit, nous nous arrêterons aux dates données par les documents inédits des Archives municipales de Revel, utilisés dans cette étude.
(8)- Ara. munir. de Revel. Documents inédits.
(9)- Ibid.
(10)- Les documents inédits de Revel nous apprennent qu'après le massacre des vingt-trois Frères Prêcheurs, « les quinze ou seize qui restoient, se retirèrent de la ville ».
(11)- Ce document est un répertoire des rentes et titres du Couvent au XVIIè siècle. En 1696. le Prieur du Couvent Raymond Parent a joint à ce répertoire, une sorte de précis historique du Couvent, et une chronique des événements de son temps. Malheureusement les premiers feuiHets du registre manquent, et les suivants sont très endommagés. — Ce petit registre est couvert d'un feuiHet de parchemin provenant d'un missel du XIIIè siècle. Dans son « Advertissement », le Père Parent nous avertit du travail qu'il a réalisé avec la compétence d'un véritable archiviste : « Tous nos papiers estoient dans un cofre mélés ensemble. je les ays rangés en diverses liasses que j'ay distinguées selon les lettres de l'alphabet. Quand on en aura vu quelqu'un pourveu qu'on ayt soin de le remettre en son lieu, il sera facile de trouver ceux dont on aura besoin. »
(12)- Les ... indiquent les trous que porte le manuscrit.
(13)- Arch. munic. de Revel, docum. inédits.
(14)- Cette donation donna lieu phis tard à une acceptation officielle de la communauté des Frères Prêcheurs datée du 12 décembre 1557. et retenue par M' Raulet Sabathié, notaire. Cet acte indique que « seize religieux faisant la plus grande et saine partie de la communauté acceptent la fondation ». A cette époque, les religieux étaient donc assez nombreux (Doc. inédits de Revel).
(15)- A cet effet, en 1637, le P. Delolm, prieur, passa une transaction avec le seigneur de Belloc.
(16) A Paris, 1647.
(17)Tome XI, p. 631 (édit. Privat).
(18) Documents inédits de Revel
(19)- Raymond Gosin était né au Comté de Foix dans la dernière partie du XV" siècle. Il fut vicaire général de la Congrégation de France, et à cc titre participa à la réforme de nombreux couvents de son Ordre entre 1500 et 1505. Comme Inquisiteur il eut à diriger en juin 1518 un procès intenté pour hérésie, contre Bertrand de Manso, curé de Mauvaisin, au diocèse de Tarbes. Il remplit la charge d'Inquisiteur pour la Province de Toulouse de 1518 à 1530 (Sur Raymond Gosin, cf. Quétif et Echard, II. et Arch. dép. de la Haute-Garonne, Dominicains, H 188.)
(20)- Le Père Pierre de Lalaine fut un des prédicateurs attitrés de ces missions solennelles organisées en 1565 à Toulouse et dans tout le Languedoc. Cf. Quetif et Echard, II, et Salvan, Histoire de l'Eglise de Toulouse, IV, 93.
(21)- Cf. Jean de Réchac, op. cil.
(22)- Des auteurs protestants, entre autres HAAG, La France protestante, V. p.:161, sont obligés de convenir des atrocités commises par leurs coreligionnaires.
(23)- Jean de Réchac, op. cit.
(24)- Les hérétiques voyant que le P. Pierre Guillot ne se résoudrait jamais à apostasier résolurent d'en finir avec lui. Ils le revêtirent d'ornements sacerdotaux, et le faisant monter sur un âne la face tournée vers la queue, un mors de cheval à la bouche, ils lui tirent parcourir ainsi les rues de la ville jusque sur le pont de l'Agout, « chacun le huant et injuriant comme sçait le faire une populace mutinée ». Arrivés là, « un coquin par le commandement des Echevins de la ville, lui donna un coup de poignard, et les autres le jetèrent dans l'eau. Le P. Pierre Guillot revint peu après sur l'eau, et levant son bras, criant tant qu'il pouvoit : Credo, Credo, Credo ! ». Cela fait les hérétiques se ruèrent sur le couvent et y massacrèrent 39 religieux et 400 catholiques dont 80 avaient été pris à Pence (ce doit être plutôt Ventis dont parle Faurin dans son Journal en racontant le même fait) à deux lieues de Castres. Tous reçurent un grand coup de massue sur la tête et furent jetés dans un puits que l'on combla entièrement après. Cf. Jean de Réchac (op. cit.).
Nota. -- Cet affreux massacre souleva l'indignation des Calvinistes eux-mêmes. Dans son Journal sur les atterres de Castres (Bibi. munie. de Toulouse, 260-E). Jean Faurin le juge sévèrement et ajoute : « Despuy on a bien senti le jugement de Dieu sur nous ! » — Pour ce fait, voir aussi les Mémoires de Gaches.
(25-26)- Jean de Réchac, op.cit.
(27)- Dans les années 1561-1562 la pauvreté de leur couvent confinait déjà à la misère, puisque le Parlement de Toulouse leur accorde une aumône de 50 livres (Arch. du Parlement, BB 55, fox 509-511).
(28)- Requête au Parlement par les Frères Prêcheurs de Revel, avec commission de Mr Jean Bouvier, 24 novembre 1567.
(29)- Autre requête du 18 février 1568.
(30)- « Requête des Frères Prêcheurs de Revel au Sénéchal de Lauragais avec le consentement du Roy et Reyne au dos » (3 janvier 1571).
(31)- Le 13 décembre 1576, selon les documents de Revel ou le 13 décembre 1577 selon l'Histoire de Languedoc.
(32)- Ceci fut plus tard l'occasion d'un procès entre les Frères Prêcheurs et M. de Moncalvol qui fut condamné par arrêt du Parlement du 8 octobre 1667 à leur délaisser la ruelle qui bordait le couvent
(33)- « Attestation sous la foy du serment des habitants catholiques de Revel devant M' Bertrand, juge, comme quoy sans la présence ininterrompue des Jacobins à Revel, le culte catholique auroit été entièrement perdu » (Docum. inédits de Revel).
(34)- Ordonnance de MM. les Commissaires députés par le Roy pour l'exécution de l'Edit de pacification (Arch. munie. de Revel).
(35)- Il y eut dans la suite un procès entre les Frères Prêcheurs et M. de Moncalvol qui fut condamné par arrêt du Parlement du 8 octobre 1667 à délaisser la ruelle qui bordait le couvent et qu'il avait indument usurpée. — Ordonnance signifiée par Arnaud Calvet, sergent, à quelques usurpateurs de maisons appartenant aux Frères Prêcheurs de Revel, 7 août 1602 (Arch. munie. de Revel).
(36)- Requête présentée à la Chambre de l'Edit séant à Castres sur les insultes souffertes par les Frères Prêcheurs de Revel de la part des Huguenots du 25 septembre 1602. Le 22 janvier suivant, le Père Maigneri porte une nouvelle plainte sur le même sujet, et un jugement est rendu eu sa faveur par Me Jean Bertran. juge de Revel.
(37)- On trouve le Père Maigneri déjà Inquisiteur Général de Toulouse à la date de 1579. A cette époque il fait un rapport contre Pierre Charron. théologal de Dax, accusé d'avoir avancé plusieurs propositions hérétiques touchant les images sculptées. L’encensement du maitre autel, la continence des prêtres, etc... (Arch. dépar. de la Haute-Garonne, Dominicains. 11 188).
(38)- Acte retenu par Pierre Lacoste, notaire à Lavaur (Arch. munie. de Revel).
(39)- Le 14 juillet 1604, par une transaction retenue par W Devalier,
(40)- Lorsqu'en 1682 les Frères Prêcheurs voulurent reprendre l'usage de ces terrains, les locataires se refusèrent à le leur rendre, et il faHut arrêt du Parlement pour les y contraindre (Arch. munie. Revel).
(41)- Ibid.
(42)- Jean de Réchac ne fait aucune allusion à cette nouvelle sédition et à la troisième expulsion des religieux. Cette salle était donnée en rente perpétuelle aux MM. de Chaumet par les Frères Prêcheurs. Ceux-ci ne purent la reprendre en 1649 qu'après un long procès (Arch. Revel).
(43)- Cette salle était donnée en rente perpétuelle aux MM. de Chaumet par les Frères Prêcheurs. Ceux-ci ne purent la reprendre en 1649 qu'après un long procès (Arch. Revel).
(44)- Le 20 octobre 1626 le P. Bannes passe un acte retenu par Me Chamayou, notaire, « sous le couvert de la Garlande du côté du midy, contre Bertrand Bartissol, Jean Combes, Daniel Moisset et autres. qui avoint jouï l'année précédente 1625 à cause des troubles, tous les biens du couvent scitués dans la juridiction de Revel, ensemble les obits en argent, et néantmoing, n'avoint pas païé la taille de ladite année » (Arch. munie. de Revel).
(45)- 14 septembre 1629. Rentrée du Prieur des Jacobins de Revel dans cette ville par l'autorité des commissaires députés par le Roy pour la démolition des remparts (Arch. Parlementaires, BB 1629).
(46)- Cf. Jean de Réchac (op, cit.).
(47)- Dans la suite cette maison fut abandonnée par les Frères Prêcheurs; en 1696 elle appartenait à M. de Gouttes, ancien procureur du Roi (Arch. munie. de Revel).
(48)- Cette cloche fut échangée pour une autre de deux quintaux et demi, Ie 24 avril 1698. Cette seconde cloche s'étant brisée, elle fut refondue en 1704 (Ibid.).
(49)- 29 juillet 1636. « Sentence arbitrale rendue par deux présidents et deux conseillers de la Chambre de l'Édit séant à Castres, par laquelle les consuls et habitants de Revel de la R. P. R. sont condamnés à rétablir l'église et le couvent des Jacobins dans l'état où ils étaient eu l'année 1621 (Ibid.).
(50-51)- Arch. munic. de Revel.
(52)- Cf. Arch. générales de l'Ordre des Frères Prêcheurs à Rome, reg. S. Cavalli, IV, 40, fo 172.